samedi 19 février 2011

Soyez saints !

7e Dimanche 2011/A

«Soyez saints, car moi, le Seigneur, je suis saint », dit Dieu dans la première lecture.
« Le temple de Dieu est saint, et ce temple, c'est vous », nous dit Paul dans la deuxième lecture.
« Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait », nous dit Jésus dans l'évangile.

C'est donc un triple appel à la sainteté que le Sei­gneur nous adresse aujourd'hui.

Instinctivement, nous sommes portés à penser que la sainteté est réservée à des gens que Dieu met à part, à des gens qui sortent de l'ordinaire, qui ne vivent pas comme tout le monde. Certes, il y a en effet des gens que Dieu met à part : religieux, religieuses. Il y a aussi des gens qui ont beaucoup d'occupations spécifiquement religieuses : les prêtres, les missionnaires, les laïcs en mission…, engagés !
Mais il y a aussi tous les gens qui ont une vie ordinaire, un travail ordinaire ; des gens qui ont une famille ordinaire, des maladies et des joies ordinaires, des soucis et des préoccupations ordinaires. Bref, il y a des gens ordinaires !
Et bien, cet appel à devenir des saints que Dieu nous adresse aujourd'hui ne s'adresse pas simplement aux gens à part ; il s'adresse à nous dans la vie ordinaire de chaque jour.

Même à nous, les prêtres, religieux, religieuses, qui avons beaucoup d'occupations spécifiquement religieuses, il nous arrive souvent de nous trouver plongés dans la vie ordinaire de tout le monde. Quand nous tombons malades et que nous sommes hospita-lisés, nous sommes des malades ordinaires avec d'autres malades ordinaires, soignés par des médecins, des infirmiers ou des soignantes ordinaires, (même si leur dévouement est très souvent extraordinaire). Et nous les prêtres, nous avons bien d'autres occupations qui ne sont pas spécifiquement religieuses. Car il y a aussi des prêtres ou des religieux qui sont engagés dans des travaux professionnels ordinaires : dans l'édition, dans les médias, dans l'enseignement…, dans les soins des malades, et en bien d'autres lieux…
Alors, comme tous les chrétiens, nous nous demandons souvent, nous les prêtres, religieux, religieuses, comment devenir des saints, dans cette vie et dans ces tâches ordinaires de tout le monde, dans ce monde qui semble n'avoir aucune préoccupation religieuse ?

Il y a d'abord la PRIERE !
La prière des gens ordinaires, c'est d'abord d'être bien convaincus que Dieu n'est pas simplement présent dans nos églises ou dans nos monastères - matériellement parlant -, mais qu'il s'intéresse à toutes les occupations les plus simples et les plus ordinaires de ses enfants. Il est là, avec nous, dans le dévouement de cette infirmière ou dans la vie de cet homme (peut-être plus ou moins croyant) qui me parle de son travail et de ses responsabilités, dans le cœur de cette assistante sociale qui fait tout ce qu'elle peut pour telle ou telle famille en difficulté. Ou plus simplement encore, le Seigneur est là dans la manière de faire la cuisine, le ménage pour sa famille, sa communauté… Guy de Larigaudie avait raison, naguère, de noter qu’il peut être plus beau de peler des pommes de terre avec amour que de construire des cathédrales !

Oui, dans cette vie ordinaire et dans les activités ordinaires où Dieu semble aujourd'hui n'avoir aucune place, nous croyons qu'il est présent dans les efforts de dévouement, d’entraide, de solidarité, dans l’aspiration à bien faire ce que nous avons à faire pour le bien de ceux, de celles qui nous entourent !

Alors, quand on commence à y croire, notre prière s'élargit à tous ceux que nous côtoyons chaque jour. La prière des gens ordinaires, c'est celle qui prend en charge tous ceux qui sont comme nous, avec nous ; c'est la prière qui s'enracine dans la vie ordinaire qu'on mène tous les jours ; c'est la prière des simples gens de l'Eglise visible - comme nous ce matin pour cette Eucharistie - qui présente à Dieu la vie des gens de l'Eglise invisible, je veux dire celle des gens qui n'ont pas encore pris conscience de leur vocation à entrer dans l'Eglise visible et dont leur vie, pourtant, s'inspire de l'Evangile. C’est cela aussi la “communion des saints“ !

Et puis, bien sûr, comme Jésus nous le dit aujourd’hui, vivre en chrétiens dans la vie ordinaire de tout le monde, c'est vivre dans l'AMOUR DES AUTRES.
Aimer les autres, c'est les prendre tels qu'ils sont et là où ils en sont, à l'exemple de Jésus qui nous prend nous-mêmes tels que nous sommes et là où nous en sommes ; c'est les respecter dans leurs convictions profondes, alors même que nous pouvons légitimement nous opposer à eux par des opinions diverses, voire opposées ; c'est leur pardonner, les aimer "quand même" malgré leurs défauts - défauts que nous avons tous, d’ailleurs -, à l'exemple de Jésus qui ne cesse de nous offrir son pardon.
Progresser dans cet amour semblable à celui de Jésus, mort et ressuscité pour tous les hommes sans distinction, c'est progresser dans la sainteté, c'est devenir de plus en plus de vrais fils de notre Père qui est dans les cieux, lui qui “fait lever son soleil sur les méchants comme sur les bons, et tomber les pluie sur les justes comme sur les injustes“ (Mth 5.45).

Dans la sainteté ordinaire, il y a aussi souvent l'EXPERIENCE DE LA SOUFFRANCE, physique ou morale, comme Jésus l'a faite : la souffrance qu'on ne peut plus supporter, qui vous prend tout entier, qui vous rend incapable de penser à quoi que ce soit d'autre. On comprend alors à quel point on n'est qu'un pauvre homme ordinaire, pas plus courageux que les autres. Même prêtre ou évêque ; Je pense, par exemple, aux paroles du Cardinal Veuillot sur son lit de mort : “Ne parlez pas de la souffrance, tant que vous ne l’avez pas vécue“, disait-il. Ce fut son chemin de sainteté !
Etre chrétien, être saint, ce n'est pas forcément être plus fort, plus héroïque que les autres. La sainteté ordinaire, ce n'est pas affaire d'héroïsme, c'est affaire de persévérance, c'est affaire de confiance en Dieu quoi qu'il arrive

« Soyez parfaits, comme votre Père céleste est parfait ». Oui, la sainteté n'est pas réservée à une élite. La sainteté, c'est une voie ouverte à tous. C'est laisser entrer en nous Jésus et son évangile ; c'est nous laisser évangéliser, transformer par l'Esprit de Jésus. Tous les événements, petits ou grands, de notre vie familiale ou religieuse, voyons-y des appels de Dieu à mieux aimer, à être plus attentifs aux autres, à être plus fidèles dans toutes nos tâches ordinaires, et avec le sourire si possible. Comme Ste Bernadette que nous avons fêtée il y a quelques jours ! Alors qu’elle était alitée depuis plusieurs semaines, sa supérieure lui dit (sans grande charité, me semble-t-il) : “Vous êtes un poids pour la Communauté! Et elle de répondre avec un humour hautement spirituel : “Oui, c’est vrai ; mais un poids, il sert à faire avancer les aiguilles de l’horloge !“

Faire avancer l’heure sainte ! Pour nous, pour tous !
Soyons saints, non pas des héros, non pas des saints extraordinaires, mais des saints ordinaires, dans la vie ordinaire de chaque jour. C’est l’appel permanent que Dieu nous lance, quel que soit notre âge, lui qui cherche sans cesse à faire alliance avec nous, qui veut s’unir à chacun d’entre nous. Mais pour s’unir à lui, il nous appelle - avec son aide qui ne manque jamais - à être saint comme il est saint : “Soyez saints, puisque moi je suis saint !“.

1 commentaire:

Archange a dit…

"Ayez du sel en vous-même" : c'est avoir commencé le combat spirituel. Sans cela, pas de paix avec soi-même ni avec les autres. Si les hommes sont toujours en conflit, c'est parce qu'ils ne sont pas d'accord sur le vrai bien. Seul Dieu peut nous montrer le vrai Bien.