lundi 17 février 2014

La persévérance

6ème T.O. Lundi

"Ce qui n'est pas clair n'est pas français", a-t-on dit (Antoine de Rivarol) ! Aussi passe-t-on le plus clair de notre temps à chasser les ombres. Et puisque nous commençons aujourd'hui la lecture liturgique de la lettre de St Jacques, permettez-moi d'essayer de tirer au clair la confusion qui règne facilement entre les personnages du Nouveau Testament qui portent le nom de Jacques.

1. Il y a Jacques dit "le Majeur", apôtre du Seigneur et frère aîné ("majeur") de Jean, tous deux étant dénommés "boarnègès", fils du tonnerre, à cause probablement de leur tempérament vif et ardent...
Avec Pierre, ces deux frères participent à des événements importants de la vie de Notre Seigneur : Transfiguration, résurrection de la fille de Jaïre ; ils seront les témoins "endormis" de la prière de Jésus à Gethsémani... etc.
Jacques fut le témoin de la troisième apparition de Jésus après sa mort, sur les bords du lac de Tibériade. C'est l'épisode la pèche miraculeuse.
Il est le seul apôtre dont la mort est rapportée dans le Nouveau Testament : "Hérode fit périr par la glaive Jacques, frère de Jean" (Act 12.2). Nous sommes probablement en l'an 44.

2. Il y a également Jacques dit "le Mineur" ou "le Petit" qui est mentionné dans les récits de la Passion pour identifier l'une des "Marie" qui étaient près de Jésus en croix et ensuite près de son tombeau (1)

3. Il y a un autre apôtre du nom de Jacques, le fils d'Alphée qui a été longtemps confondu avec Jacques "le Mineur".

4. Il y a encore Jacques, "le frère de Jésus" : figure prestigieuse du christianisme primitif. Il ne fut pas, de son vivant, "évêque de Jérusalem" parce que ce titre n'existait pas à cette époque. Cependant, dès que cette fonction commença à exister, on n'hésita pas à l'attribuer à ce Jacques tant son influence fut grande et respectée... (Concile de Jérusalem..., rapports avec Paul...).
Paul dit lui-même que ce Jacques gouverna d'abord l'Église de Jérusalem avec Céphas et Jean (Ga 2,9), mais après la mort de Jacques, le fils de Zébédée (Ac 12,2), et après l'arrestation dont Pierre s'échappa miraculeusement (donc dès 44), il régna seul à Jérusalem (Ac 12,17) jusqu'à sa mort en 62.  

St Jérôme (en particulier avec Eusèbe de Césarée... etc.) tenta, pour diverses raisons, de prouver que ce Jacques "frère du Seigneur" est le même que Jacques, le fils d'Alphée, l'un des Douze et que Jacques le Mineur. Bien que cette identification ait été, à une certaine époque acceptée par l'Église catholique - surtout en Occident, ce qui provoqua confusion pendant longtemps -, elle n'est plus soutenue aujourd'hui. L'état actuel de la recherche nous dit que ce Jacques "évêque de Jérusalem" ne fut jamais l'un des Douze.

5. Et enfin, il y a Jacques, l'auteur de la lettre qui porte son nom. Il est difficile d'attribuer cette lettre à l'un des autres "Jacques". On pense plutôt que notre auteur fut un disciple de Jacques l'"évêque de Jérusalem" et qu'il écrivit vers l'an 80.

L'écrit ressemble plus à une collection de sentences qu'à une lettre. On sent que l'intention de l'auteur n'est pas de donner un exposé de la foi, de rappeler l'enseignement de l'Evangile. Il se borne à y faire référence.
On l'a souvent - et à tort - opposé à St Paul. Probablement sensible aux relations sociales, il réagit vigoureusement contre certains chrétiens dont la foi (trop théorique sans doute - cela arrive ! -) n'a aucun effet sur leur comportement. Il insiste donc sur la nécessité des œuvres : "comme le corps sans âme est mort, de même la foi sans les oeuvres est morte" (Cf. (2.14-26). St Paul, lui aussi, attend que la foi se fasse agissante. Et s'il condamne certaines œuvres, c'est qu'elles sont trop acccomplies dans un esprit d'orgueil, en oubliant que notre seule force, c'est le mystère pascal du Christ et non notre force banalement humaine pour se conformer à une Loi : "Si la justice s'obtient par la Loi, dira-t-il, Christ est donc mort en vain !" (Gal 2.21)

Il reste que l'écrit donne l'essentiel de toute une réflexion chrétienne en matière de morale pratique.
Et le document s'achève par une forte incitation à la prière qui doit soutenir toute l'existence chrétienne. Elle peut même devenir source de santé pour les malades.

Après ces quelques réflexions, il serait bon maintenant d'entrer dans le texte lui-même ! Il ne m'en reste guère le temps. Aussi, je vous propose aujourd'hui qu'un seul mot à méditer : celui de la persévérance, malgré les épreuves ! St Jacques et St Paul se retrouveraient facilement sur ce mot.

Dans l'Ancienne Alliance, la fidélité de Dieu envers son peuple était en fonction de la fidélité de celui-ici à son égard, ce qui rendait les bénédictions divines faites "au commencement" fort aléatoires, comme le souligne le livre du Lévitique : "Si vous repoussez mes lois et rompez mon alliance en ne mettant pas en pratique tous mes commandements, j'agirai de même, moi aussi, envers vous". (Lev 26.15-16). Et le Livre du Deutéronome est encore plus précis (Cf. Det. 26.17-18 ; 28.15-69 ; cf Am. 4.6-12).

La Nouvelle Alliance établie par Jésus Christ, elle, est éternelle (Cf. Heb 8.8-9).
D'une part, elle est conclue par l'amour immuable de Dieu : "Quoi donc, s'écrie St Paul, si quelques-uns ont été infidèles, leur infidélité va-t-elle annuler la fidélité de Dieu ? Certes non !" (Rm 3.3). Et il s'écrie encore : "Si nous sommes infidèles, lui reste fidèle, car il ne peut se renier lui-même" (2 Tm 2.13). Et souvent l'apôtre manifestera son "espérance de la vie éternelle promise avant tous les siècles par le Dieu qui ne ment pas !" (Tit 1.2).
D'autre part, l'Ancienne Alliance obligeait sans procurer les moyens de remplir les obligations souscrites. Le Dieu de la Nouvelle Alliance, lui, ayant déjà donné le salut par son Fils - "Il n'a pas épargné son propre Fils mais l'a livré pour nous tous ! Comment, avec lui, ne nous accordera-t-il pas toute faveur ?" (Rm. 8.32) -, nous acccordera tous les moyens nécessaires pour persévérer (Cf. I Thess. 8.24 ; II Thess 3.3 ; I Co. 1.9 ; Phil. 1.6).
Il accordera même le pardon des fautes. Car il est fidèle dans sa miséricorde : "Si nous confessons nos péchés, lui, fidèle et juste, pardonnera nos péchés et nous purifiera de toute iniquité" (I Jn 1.9). C'est qu'il est bien plus grand que notre propre cœur, comme le souligne St Jean : "Si notre cœur venait à nous condamner, Dieu est plus grand que notre cœur, et il connaît tout" (I Jn 3.20).

En conséquence, soyons persévérants. Et que "notre persévérance, nous dit St Jacques, s'accompagne d'une conduite parfaite", la plus possible. "Restons indéfectiblement attachés à la profession de notre erspérance, dit la lettre aux Hébreux, car celui qui a promis est fidèle. Et faisons attention les uns aux autres pour nous stimuler dans la charité et les œuvres bonnes" (Heb 10.23).


(1) "Il y avait des femmes (près de la croix), entre autres Marie de Magdala, Marie mère de Jacques le petit et de Joset, et Salomé" (Marc 15.40)
Et "Quand le sabbat fut passé, Marie de Magdala, Marie, mère de Jacques, et Salomé achetèrent des aromates..." (16.1).
"A leur retour du tombeau, elles rapportèrent la aux Onze et à tous les autres" ce qu'elles avaient vu. "C'étaient Marie la Magdaléenne, Jeanne et Marie, mère de Jacques" (Lc 24.9-10).

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