lundi 11 mars 2013

Résurrection !


Carême 4 - Lundi  - Création - Recréation   (Is 65.17-21 - Ps 29 - Jn 4.43-54)

Vous avez certainement remarqué dans la lecture la répétition du mot “créer“ :Voici que je vais créer des cieux nouveaux et une terre nouvelle... Soyez pleins d'allégresse et exultez de ce que moi, je vais créer : car je vais faire de Jérusalem une exultation et de mon peuple une allégresse“. 

Ce verbe “créer“ est bien connu : c’est le deuxième mot du premier chapitre de la Genèse : “Bereshit BARA Elohim“ : “Au commencement Dieu créa … “.

Et ce mot qui se trouve aux origines, apparaît également tout au long de l’histoire : “Je vais créer des cieux nouveaux, une terre nouvelle !“.  Car le peuple élu fera sans cesse, depuis la sortie d'Egypte, l’expérience des merveilles, des délivrances que Dieu seul, dans sa toute puissance illimitée, peut opérer. A chaque fois, c’est comme une “création nouvelle“.

Ainsi, au temps de l’exil à Babylone, lorsque le peuple n’est plus qu’“ossements desséchés“ (cf. Ezéchiel) et que Dieu le ressuscite pour le faire revenir à Jérusalem, la délivrance est si déconcertante qu’elle prend l’allure d’une nouvelle création. C’est ainsi que le mot “Bara“ est employé. Le texte d’aujourd’hui est d’un disciple d’Isaïe, contemporain de ce retour miraculeux. Et il ne trouve pas de mot plus expressif - “bara“, créer - pour parler de ce que Dieu opère et continuera d’opérer dans l’histoire au profit du peuple élu.

C’est l’époque où Jérémie et Ezéchiel parlent d’une “nouvelle alliance“ qui ne sera rien moins qu’une “nouvelle création“. Jérusalem va ressusciter ! Alors que beaucoup de peuples, plus importants que la tribu de Juda, ont complètement disparu, cette toute petite tribu de Juda, victime d’un véritable anéantissement, va être l’objet, contre toute espérance humaine et par une véritable “résurrection des morts“, d’une nouvelle création ; et son histoire qu’on aurait pu croire définitivement interrompue reprend dans une espérance universelle : “oui, je vais créer un ciel nouveau et une terre nouvelle, on ne se rappellera plus le passé, il ne reviendra plus à l’esprit“.

Ce langage de “recréation“ collectivement vécu par le peuple élu se transfèrera peu à peu sur le plan individuel - un Juif, beaucoup plus que nous, pense à la fois collectif et personnel. On le trouve déjà ce langage, de façon implicite, dans la bouche de David, après sa faute avec Bethsabée. Dans sa repentance, il reprend ce langage de recréation : Crée en moi un cœur pur. Renouvelle en ma poitrine un esprit de générosité“ (Ps 50,12).

Ce mot de “bara“ exprime l’expérience que fait le peuple élu - et finalement tout croyant - d’un Dieu créateur et recréateur : “Notre Dieu est un Dieu de délivrance, à Lui sont les issues de la mort !“. (Ps 68.21).

Les professeurs disent que le premier chapitre de la Genèse est tardif. Par son style et par sa parfaite construction mathématique, il doit être de l’époque Perse. Les juifs, après l’exil à Babylone, ont vécu sous la domination de l’Empire Perse. Or, les Perses avaient une religion dualiste : pour rendre compte du mal, ils posaient que deux principes étaient en lutte dans l’histoire du monde, un principe bon et un principe mauvais. Sous l’inspiration divine, l’auteur (ou les auteurs) du début du livre de la Genèse a jugé bon, à cette époque, de rompre avec ce dualisme. La phrase Dieu vit que cela était bon, revient comme un refrain, dans les jours de la création.

Ainsi la foi du croyant, dès le début, rejoint bien la condition humaine jusqu’au fond du problème que pose le mystère du mal…
- pensons à Job, à certains psaumes et à bien d’autres passages de la Bible…
 - pensons surtout aux anéantissements du Verbe Incarné qui meurt sur la croix, de la mort des esclaves ! ...

Mais, cette foi du croyant, refusant toujours ce dualisme, affirmera haut et fort, après l’expérience extraordinaire du retour d’exil, que tout ce que Dieu fait est “bon“ ! Il proclamera que, face à la réalité du mal, ce “Dieu bon“ est un “Dieu de délivrance“, qu’“il a les issues de la mort“, qu’il peut recréer comme il a nous a créés ; et si un jour nous lui remettrons notre “dernier souffle“, c’est dans la certitude qu’il pourra nous le rendre :
“Tu caches ta face, ils s'épouvantent,
tu retires leur souffle, ils expirent, à leur poussière ils retournent.
Tu envoies ton souffle, ils sont créés, tu renouvelles la face de la terre“. (Ps 104).

C'est ce que conclura fortement et magnifiquement St Paul au cours de son procès à Césarée devant le roi Agrippa : Toi qui es juif, lui dit-il, tu devrais comprendre tout cela. "Pourquoi juge-t-on incroyable parmi vous que Dieu ressuscite les morts ?" (Act. 25.19).

N’est-ce pas ce que veut souligner Jésus dans l’évangile ? Comme un “re-créateur“, face au mal suprême de la mort, il dit à l’intendant royal : “Va, ton fils vit !“. Il vit ! Il vivra !  C’est notre foi, notre espérance !

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