jeudi 26 novembre 2009

Ce monde qui passe…! (2) - T.O. 34 imp. Jeudi - (Da. 6.12sv)

Exercer son esprit critique (comme on l’a vu ces jours derniers), prendre ses distances, voire refuser de se conformer au « monde », ça peut être dangereux. Tous les psaumes l’affirment ; et le livre de la Sagesse est formel : Sg 2, 12-20 : “Tendons des pièges au juste, puisqu'il nous gêne et qu'il s'oppose à notre conduite… Il se flatte d'avoir la connaissance de Dieu et se nomme enfant du Seigneur. Il est devenu un blâme pour nos pensées… car son genre de vie ne ressemble pas aux autres, et ses sentiers sont tout différents. …Voyons si ses dires sont vrais, expérimentons ce qu'il en sera de sa fin. Car si le juste est fils de Dieu, Il l'assistera et le délivrera des mains de ses adversaires. Eprouvons-le par l'outrage et la torture afin de connaître sa douceur et de mettre à l'épreuve sa résignation. Condamnons-le à une mort honteuse, puisque, d'après ses dires, il sera visité“.

Trouver sa stabilité dans la certitude que la Providence, contre toute apparence, existe et s’exerce dans les pires crises de l’histoire, amène obligatoirement à une certaine solitude, à un certain isolement par rapport à l’ensemble de l’humanité. Il faut le savoir !

Les textes de ces derniers jours nous ont rappelé tout cela, et nous ont montré que ce qui était déjà assez clairement formulé dans l’Ancien Testament, avait été vécu pleinement par le Christ. En conséquence, on ne peut devenir son disciple que si on considère comme un privilège de l’imiter le plus possible - “l’imitation de Jésus Christ“ - : Imiter le Christ qui marche, dans la solitude de sa mission messianique souvent incomprise même de ses disciples, vers l’accomplissement de son mystère pascal de mort et de vie !

La lecture d’aujourd’hui poursuit notre éducation dans ce sens. L’histoire de Daniel qui refuse d’adorer le roi qui prend la place de Dieu, ressemble beaucoup à celle de Mardochée dans le livre d’Esther : Le sinistre Aman a obtenu du roi Assuérus le droit de faire se prosterner devant lui tout le monde. Mardochée lui est dénoncé comme un réfractaire. Cela rend Aman tellement furieux qu’il décide de condamner à mort, non seulement, ce juif mais tout le peuple juif. Est 3, 5-9 : “Aman put en effet constater que Mardochée ne fléchissait pas le genou devant lui : il fut prit d’un accès de fureur. Comme on l'avait instruit du peuple de Mardochée, il lui parut que ce serait peu de ne frapper que lui ; et il prémédita de faire disparaître, avec Mardochée, tous les Juifs établis dans tout le royaume d'Assuérus... Aman dit au roi Assuérus : "Au milieu des populations, dans toutes les provinces de ton royaume, est dispersé un peuple à part. Ses lois ne ressemblent à celles d'aucun autre et les lois royales sont pour lui lettre morte. Les intérêts du roi ne permettent pas de le laisser tranquille. Que sa perte soit donc signée …“.

L’accusation qu’il porte est à la base, non seulement de tous les antisémitismes de l’histoire, mais aussi de tous ceux qui ont affirmé la foi chrétienne en temps de persécution. : “Ses lois ne ressemblent à celles d'aucun autre et les lois royales sont pour lui lettre morte. Les intérêts du roi ne permettent pas de le laisser tranquille“.

Mais une autre loi, heureusement, ressort de toute la littérature biblique et trouve son accomplissement dans la mort et la résurrection du Christ. Cette loi, c’est que le persécuteur est toujours pris à son propre piège. C’est Aman qui sera pendu à la potence qu’il avait préparée pour Mardochée...

Pharaon, qui au temps de l’exode, avait commandé de jeter les bébés mâles dans le Nil, voit le peuple qu’il vouait à l’esclavage, sauvé par un petit garçon dont le berceau flottait sur le fleuve et qui fut recueilli par sa propre fille.

On pourrait multiplier les exemples. On trouve chez les Pères de l’Eglise, l’idée que Satan s’est cassé les dents sur la divinité du Christ cachée dans son humanité humiliée dans l’anéantissement de la Croix.

L’Ancien Testament traduit les expériences vécues dans l’histoire par des récits fabuleux, de grandes images qui frappent l’imagination (et qui intéresseraient les enfants, plus que les bandes dessinées de plus ou moins bon goût, parfois…) Tous ces récits, qui restent gravés dans la mémoire, nous aident à garder notre identité dans ce qu’elle a de plus pur et de plus authentique.

Je ne dirais pas qu’avec le Nouveau Testament, on passe de la fiction à la réalité. L’Ancien Testament n’est pas une fiction, c’est du vécu dans la réalité de l’histoire ; et si on se sert du genre épique, apocalyptique, c’est pour faciliter l’attention, pour regarder, comme avec une loupe, la condition humaine et les situations qu’on a à vivre, tout au long des siècles, situations si étrangement semblables malgré la distance temporelle et culturelle.

Et tout cela se condense, se résume, s’accomplit dans le Christ, comme nous le fait sentir, chaque jour, la liturgie en nous faisant lire simultanément et l’Ancien et le Nouveau Testament

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