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T.O. Lundi 12/B (Gal 4.22..5.1)
Même
si St Paul a été en quelque sorte très sévère avec les Galates, il s’est laissé
aller cependant à exprimer son affection envers eux en rappelant notamment leur
accueil généreux d’autrefois, à son égard. C’était juste avant le passage que
la liturgie nous faire lire aujourd’hui. Mais aussitôt Paul reprend son
argumentation interrompue par l’effusion de son cœur !
L’argument
le plus puissant des Juifs, celui qui paraissait s’appuyer sur l’Ecriture
elle-même, c’était - on le sait - la perpétuité de la Loi ! St Paul a
déjà répondu à cet argument en comparant la Loi à un “pédagogue“, un
“surveillant“ chargé de nous conduire à Celui en qui se sont réalisées les
promesses faites à Abraham ! La Loi est simplement une institution
temporaire mise en jeu par Dieu-Père et qui devait disparaître à l’arrivée du
Fils Unique, le Fils de Dieu !
L’argument
paraissait décisif. Mais l’apôtre a pensé qu’il serait à propos de chercher,
pour son affirmation, un point d’appui dans l’Ecriture elle-même.
Et
il va chercher les figures du fils de la servante qu’était Agar et celle du
fils de la femme libre qu’était Sara qui enfanta ensuite, selon la
promesse divine ! C’est une “allégorie“ (1), dit-il ! Ces deux
femmes qui ont eu des positions successives par rapport à la promesse
faite à Abraham représentent ces deux dispositions prises successivement
par Dieu pour réaliser son plan de salut en faveur de l’humanité. La
première est imparfaite, celle des serviteurs ; la seconde est
parfaite, celles des fils. Ainsi la solution s’impose : la moins
parfaite doit céder la place à l’autre !
St
Paul ne dit pas : puisque Sara représente la nouvelle Alliance, vous êtes
donc libres. Il dit plutôt : entre Sara et l’Eglise, il y a cette
ressemblance qu’elles sont mères de fils libres enfantés selon la promesse
de Dieu et ainsi assurés de ses bénédictions. Le Judaïsme étant une
religion de crainte, une religion d’esclaves, Il est évident qu’il doit céder
la place à la religion des fils.
Vous
en voulez une preuve, ajoute encore l’apôtre dans un paragraphe que le texte
liturgique n’a pas retenu ? Que dit l’Ecriture ? Et Paul de s’en
reporter à un épisode peu glorieux pour Sara qui oblige Abraham à chasser sa
servante avec son enfant Ismaël. Mais peu importe de l’aspect moral - là n’est
pas le sujet pour le moment -. La raison de ce geste peu honorable est à transposée : “Il ne faut pas que le fils de la servante
hérite avec le fils de la femme libre“. Car les deux fils ne peuvent
coexister ensemble, c’est-à-dire les deux Alliances ne peuvent coexister ensemble,
l’une ayant seulement préparée l’autre ! Désormais, la nouvelle
Alliance est la seule qui compte auprès de Dieu !
Etre
fils d’Abraham selon la chair (2) comme le fils d’Agar, laisse l’homme dans la
servitude qui caractérise l’ancienne Alliance. - Etre
fils d’Abraham selon l’Esprit comme Isaac, libère l’homme et lui donne accès à
la Jérusalem qui vient d’en haut, au Royaume qui est l’héritage promis.
L’homme
moderne dira non sans raison : ce sont là arguties bien rabbiniques, peu
convaincantes pour nos contemporains. Bien sûr ! Mais on ne peut reprocher
à l’ancien élève de Gamaliel d’être parfaitement de son temps et de sa race !
Cependant,
St Paul propose une conclusion qui traverse les temps et les espaces : “Si le Christ nous a libérés, c’est pour que
nous soyons vraiment libres !“. Et il dira un peu plus loin : “Tous, vous avez été appelés à la liberté.
Seulement que cette liberté ne donne aucune prise à la chair ! Mais par
l’amour, mettez-vous au service les uns des autres “ (5.13).
Oui,
une grande question se pose toujours ! Qu’est-ce que la liberté et
comment l’exercer ? De tout temps, la
liberté a été le rêve de l'humanité, dès le début, mais particulièrement à
l'époque moderne. Nous savons que Luther, par exemple, s'est inspiré du texte
de la Lettre aux Galates pour
conclure que la Règle monastique, la hiérarchie et le magistère lui
apparaissaient comme un lien d'esclavage dont il fallait se libérer. Par la
suite, la période du “siècle des Lumières“ a été totalement guidée, pénétrée
par ce désir de liberté, que l'on considérait avoir finalement atteint. Mais le
marxisme s'est lui aussi présenté comme la voie vers la liberté !
Comment
pouvons-nous donc être libres ? St Paul nous aide à comprendre
cette réalité compliquée et complexe. Il dit : “Que cette liberté ne se tourne pas en prétexte pour la chair ; mais
par la charité, mettez-vous au service les uns des autres“. “La chair“,
dans le langage biblique, est l'expression du “Moi“ rendu absolu, qui veut
être tout et prendre tout "pour soi". Le “Moi absolu“, qui ne dépend
de rien ni de personne, semble posséder réellement, en définitive, la liberté.
Je suis libre si je ne dépends de personne, si je peux faire tout ce que je
veux. Mais ce "Moi" rendu absolu est précisément “chair“, c'est-à-dire
dégradation de l'homme, échec de la liberté. On le sait par trop d’expériences
malheureuses !
Alors
Paul ose proposer un paradoxe : “Par
la charité, mettez-vous au service“, c'est-à-dire que la liberté se
réalise paradoxalement à travers le service ; nous devenons libres, si nous
devenons serviteurs les uns des autres. Ainsi, Paul place tout le problème de
la liberté à la lumière de la vérité de l'homme. Se réduire “à la chair“, en
s'élevant en apparence au rang de divinité - “Moi seul suis l'homme“ -
introduit au mensonge. Car en réalité, il n'en est pas ainsi : l'homme n'est
pas un absolu, comme si le “Moi“ pouvait s'isoler et se comporter selon sa
propre volonté. Cela est contre la vérité de notre être.
Notre
vérité est que nous sommes avant tout des créatures, des créatures de
Dieu et que nous vivons dans la relation avec le Créateur.
Nous
sommes des êtres relationnels !
Ce
n'est qu'en acceptant notre nature relationnelle que nous entrons dans la
vérité, une vérité qui rend libre, sinon nous tombons dans le mensonge et en
lui, à la fin, nous nous détruisons.
“La liberté, disait le pape Jean-Paul II, est la mesure de l'amour dont
nous sommes capables“.
(1) Ou plutôt un
“type“, le “type“ étant en littérature le reflet d’une réalité non encore
totalement dévoilée, révélée
(2) “Selon la chair“ : en
l’occurrence, selon les lois ordinaire de la nature (Rm 7.5sv), sans une
intervention spéciale de Dieu pour réaliser sa promesse
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