27ème
Dim. T.O. 03/B -
“Celui qui n'accueille pas le Royaume de
Dieu comme un enfant, n'y entrera pas... ” !
Même
si aujourd'hui, chez nous, la télévision, la publicité mettent abusivement
l'enfant en vedette, cependant comme il est réconfortant pour parents,
grands-parents, de faire cercle autour d'un enfant, de s'amuser de ses malices,
attitudes, réflexions inattendues et de lui manifester grande tendresse. Aujourd’hui,
l'Évangile de Marc nous rapporte toute l'attention, l'affection que Jésus
portait aux enfants !
Mais
lorsque le Christ, devant un auditoire d'adultes, cite en exemple un enfant, ce
n'est pas pour faire l'apologie de l'innocence, la pureté, la naïveté enfantine
; c'est pour en faire un signe éclatant du Royaume de Dieu qu'Il est
venu annoncer, instaurer sur terre. Pour Jésus, les enfants, grâce à leur disponibilité,
leur confiance naturelle, leur accueil pour tout ce qui est neuf,
sont les seuls à pouvoir entrevoir ce Royaume.
Ce
matin, quelle que soit notre situation personnelle, familiale, ecclésiale,
aurons-nous la disponibilité, l'ouverture d'un enfant, pour
accueillir ce que Dieu veut nous dire de l'amour et en particulier de l'amour
conjugal ? A l'heure de l'ouverture, à Rome, du Synode sur la famille !
Le
mariage chrétien ! Voilà bien une institution souvent remise en cause de bien
des manières. Et les objections ne sont pas nouvelles. Avec des formes variées,
elles sont de tous temps comme celles des pharisiens venus consulter Jésus : “Est-il permis à un mari de renvoyer sa
femme ?”
Jésus
ne se dérobe pas. Mais à ceux qui voulaient seulement comme réponse - et c'est
souvent notre cas - un “Oui” ou un “Non”, un “Permis” ou un “Défendu”, un
"légal" ou un "illégal", Jésus propose une réflexion qui va
les atteindre non pas en surface - "légal" ou "illégal" -,
mais en la profondeur de leur cœur. Les pharisiens posaient une question-piège
; le Christ répond, comme souvent, en retournant la question pour mieux les
engager, les rendre disponibles à une ouverture : “Voyons, dit-il, que vous a
prescrit Moïse ?”.
Et
au cours de la conversation, alors que les pharisiens, - comme nous bien
souvent -, voulaient s'en tenir à l'application d'une Loi, le Christ va faire
comprendre quel est le projet de Dieu sur l'homme, quel est son
dessein d'amour. Et c'est bien cela qui importe avant tout : “Au commencement, quand Dieu créa l'humanité,
il les fit homme et femme... ; et tous deux ne feront plus qu'un...”. Et
Jésus élargira singulièrement : "Aimez-vous
comme je vous ai aimés", comme Dieu aime !
Ce
matin, avec l'ouverture d'un cœur d'enfant, allons-nous savoir accueillir, dans
nos situations diverses, cette Parole de Dieu ?
Quelle
idée avons-nous de l'Amour et de l'Amour conjugal en particulier
? Sont-ils, pour nous qui nous disons chrétiens, expressions du dessein
généreux de Dieu, de Dieu-Amour ?
Dieu
a confié sa Création à notre liberté. Comment, mariés ou engagés
diversement, répondons-nous librement à l'Amour de Dieu pour nous, afin
de l'accueillir et en vivre ? Y-a-t-il toujours en nous cet esprit juvénile de
création, le courage enfantin des commencements et des re-commencements ? Nos
fidélités diverses sont-elles simple soumission à une Loi, à des règlements ou,
malgré nos faiblesses, l'expression d'un amour divin à sans cesse faire croître
?
Il
nous arrive de juger, de condamner des frères en difficultés, en échec. Est-ce
à cela que le Christ nous appelle ? Autant il est exigeant pour proposer un
Idéal du mariage et de l'amour en général, autant son accueil respire bonté,
respect vis-à-vis de ceux qui apparemment échouent. Et notre propre conduite
personnelle, communautaire, familiale, ecclésiale est-elle vraiment en accord
avec l'Évangile ? Pour ma part, je ne saurais l'affirmer tant - comme dira St
Paul - "ce que je veux, je ne le
fais pas ; et ce que je ne veux pas, je le fais". (Rm 7.18-19). - Aussi, Jésus pose la question
véritable : Pour vous qu'est-ce qui est premier ? Une Loi ou des personnes
toujours aimées de Dieu malgré leurs défauts, fautes ou échecs ? Et cette question
- je le redis - est pour tous, est pour moi !
Et
si nous avons la grâce d'une certaine fidélité conjugale, religieuse ou autre,
comment allons-nous réentendre la parole de Jésus comme un appel à recréer sans
cesse, comme un enfant, la vie, l'amour déjà reçus de Dieu ? Nous ne sommes pas
des parfaits ; mais avec l'aide du sacrement de mariage, ou d'un autre
engagement, nous avons certainement quelques progrès à réaliser. Car Jésus ne
pose pas la question pour les autres ; c'est à chacun, à moi-même qu'il la
pose !
Et
pour nous encourager, je prendrai un exemple conjugal dans un roman (les «Noces d'Or»), en lequel une femme
avouait à son mari : “Parce que tu
m'offrais bijoux et fourrures, parce que tu me laissais acheter tout ce qui me
plaisait, tu te croyais un bon mari. Tu n'avais pas compris que le mariage est
un dialogue incessant, une création quotidienne où, comme dans un nid d'oiseaux,
s'enchevêtrent les éléments les plus disparates : souvenirs et projets, corps
et pensées, caprices et raisons, erreurs et pardons... Tout y a sa place sauf
l'indifférence !”
Oui,
l'amour que nous avons à exercer est un dialogue incessant, une création
quotidienne..., comme celle d'un enfant, sous le regard de Dieu ! Et
il en est pour la vie religieuse, sacerdotale comme pour la vie conjugale.
Pourtant,
dira-t-on, autour de nous, tout concourt à rendre soupçonneuse la parole du
Christ : “Ce que Dieu a uni, que l'homme
ne le sépare pas !”. Et on montre la courbe ascendante des divorces, des
promesses avortées. On susurre que l'Église devrait se faire moins rigoureuse,
qu’elle devrait chanter l’Evangile au rythme des variations des temps et des
cultures.
Non,
il s'agit pour tout chrétien, de relever un des défis les plus exigeants
de toute époque : savoir dépasser le régime de toute loi, comme le dira
St Paul aux Romains : "Vous avez été
mis à mort à l'égard de la Loi pour appartenir à un Autre le Ressuscité d'entre
les morts afin de porter des fruits pour Dieu" (Rm. 7.4). Il s'agira toujours, avant tout, de manifester
l'originalité de tout amour chrétien : amour voulu par Dieu Créateur et
sanctifié par le Christ Rédempteur afin de nous l'infuser ! Oui, il s'agit
toujours - tels que nous sommes et là où nous en sommes - de magnifier l'Amour
de Dieu toujours présent et toujours à recevoir comme un enfant aimé de son
père ! N'est-ce pas cela l'important ?
Comprenons : l'existence à laquelle accède tout
baptisé est marquée d'un caractère irréversible et déjà eschatologique,
c'est-à-dire anticipant déjà la vie céleste. Certes, cette existence se
développe dans le temps, parfois à travers difficultés et conflits, mais toujours
sous le signe de l'espérance. Notre vie doit témoigner de la vocation
ultime de la liberté humaine toujours capable de don et de fidélité. Pourquoi ?
Parce que Dieu, en Jésus, est allé jusqu'au bout de l'amour et que l'alliance posée
au jour de Pâques est une alliance éternelle, alliance qu'il nous propose sans
cesse.
En n'importe quelle situation - voire
contradictoire apparemment, tout chrétien doit avoir le souci de rester
fidèle au plan de Dieu, de servir l'homme au delà de l'homme pécheur, de
servir l'homme en alliance éternelle avec son Dieu, malgré ses fautes ou ses échecs !
C'est ce à quoi le Synode romain veut répondre, me semble-t-il. Car l'Amour de
Dieu est toujours fidèle, Lui ; et, toujours cet Amour nous envahit et nous
pousse à y répondre, d'une manière ou d'une autre, dans les diverses situations
où nous sommes. Et, ici-bas, celles-ci sont souvent entachées de faiblesses,
chutes, erreurs.
Que le Christ que nous allons rencontrer
dans l'Eucharistie guérisse nos cœurs souvent sclérosés et que, par-delà les lois
et règlements, Il nous aide, là où nous en sommes, à témoigner du véritable
Amour, celui d'un enfant de Dieu.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire