30ème
Dimanche T.O. 15/B -
Connaissez-vous Bartimée, ce fils de
Timée ?
Regardez. Il est là, au bord de la
route, à la sortie de Jéricho, tendant la main, vers chacun, vers tout le monde
et vers personne tout à la fois !
Il est là, aveugle. Seul dans la
foule bruyante. Un aveugle ! On le sait bien, il faut le savoir :
qu’il perde ses points de repère et le voilà dans l'angoisse ! Alors il est là,
assis. Que voulez-vous qu'il fasse d'autre ? A quoi bon aller ailleurs ? Pour y
faire quoi, y trouver quoi ? Où aller ? Où se situer ? Terribles
questions, n’est-ce pas, et si fréquentes pourtant ! Même encore de nos
jours ! Car ne sommes-nous pas tous, plus ou moins des aveugles ?
Or, Jésus de Nazareth vient à
passer. Il se dirige vers Jérusalem pour la dernière fois ; il va vers
l'accomplissement de son mystère pascal ! Sera-t-il, comme tant d'autres,
indifférent ?
Non ! Jésus n'est jamais
indifférent. Mais il respecte la liberté d'un chacun ; il attend d'être
annoncé, reconnu, accueilli. Autrement dit, Jésus a besoin de ses apôtres, de
ses disciples, de nous tous pour transmettre ses appels, les appels de Dieu. Le
savons-nous suffisamment, nous qui nous disons voir clair ?
Et une fois l’appel transmis, le
dialogue établi, Jésus va à l'essentiel : “ta
foi t'a sauvé”. La foi qui sauve ! Et alors l'aveugle voit,
l'homme prostré bondit, le mendiant partage sa joie et il suit Jésus sur
la route.
Combien de
Bartimée, aujourd’hui,
sur le bord de nos routes humaines…, suppliants..
- suppliants..., pour quelques pièces
d'argent, certes : “J'ai faim”, “Je suis
sans travail”, “sans logement” !...
- suppliants..., pour ne pas s'enfoncer dans
le découragement, le désespoir... : “Aidez-moi
; je suis à bout !”...
- suppliants..., pour être accompagné dans
une solitude... : “Donnez-moi votre main,
votre présence et j'aurai moins peur... !”...
- suppliants..., pour être rassuré sur un
amour fidèle : “M'aimes-tu vraiment ?”,
comme demandera Jésus lui-même à Pierre !
- suppliants..., pour scruter l'Invisible : “Vous avez de la chance, vous, d'avoir la
foi” !
Et ainsi combien de Bartimée plus ou moins
aveugles dans notre monde si complexe et parfois hostile. Combien d’aveugles,
c’est-à-dire : qui ne savent pas où ils vont. Ai-je bien choisi la
bonne route, la bonne filière scolaire, professionnelle, le chemin d’une
heureuse rencontre pour un avenir familial harmonieux ? Et que sais-je encore ?
Combien d’épreuves au bout de ces
interrogations, n’est-ce pas ! Et combien baissent les bras : “Que voulez-vous qu'on y fasse ? Que
voulez-vous que je fasse ?”, entend-on, souvent. “C’est ma destinée, je n’y puis rien !”.
Notre vie, tel un fil, se déviderait-elle au
rouet de la fatalité ?
Non ! Car, sur nos routes humaines comme sur
celle de Bartimée, Jésus passe. Jésus "passait de village en village", nous disent les
évangiles (Cf. Mth
9.15 ; Lc 8.1). Jésus
passe toujours près de nous !
Certes, on voit, on voit bien sur notre route
humaine personnes et choses, et les couleurs de la nature. On voit des
événements plus ou moins heureux, malheureux ! Mais Lui, Jésus, le vois-t-on
?
Voit-on au cœur des réalités humaines,
éclairés par l'Évangile,
- Celui qui en est l'auteur ?
- Celui qui peut en donner sens malgré les
apparences contradictoires ?
- Celui qui est venu habiter parmi nous ?
- Celui qui donne sa vie pour ses frères afin
qu'à notre tour nous donnions la nôtre pour eux, pour Lui,
- pour Lui qui "n'a pas retenu le rang qui l'égalait à Dieu" (Phil. 2.6sv), mais s'est fait l'un de nous,
Fils de Marie de Nazareth.
- pour Lui qui a pris sur lui toute notre
humanité, sauf le péché.
- pour Lui qui a fait de nous des frères
parce qu'Il nous révèle qu'en lui, dans l'Esprit d'amour, nous sommes capables
de dire à Dieu : “Père” !
Oui, sur la route de nos existences, Jésus
passe. Le savons-nous ?
Et comment savoir que c'est Jésus qui passe,
si d'autres, des “voyants” n'en révèlent la présence ? Et qui nous disent sans
cesse et toujours : “C’est le
Seigneur !”. Comment sortir de l'enfermement sur soi, du fatalisme, si
personne ne dit : “Confiance,
lève-toi, il t'appelle... !” ?
Voyez ! Annoncer Jésus Christ est une
nécessité pour tout baptisé. Cette mission est un devoir de solidarité
chrétienne avec tous nos frères.
Avec le Christ, en Lui, par Lui, pour Lui, il
nous faut dire, nous aussi :“Lève-toi il
t'appelle !”. Voilà bien le cri libérateur… ! Un cri qu'il nous faut sans
cesse lancer !
Oui, "il
t'appelle !" ; L'entendons-nous ? ...Au cœur des événements, ou encore
dans le service aux autres qu'exercent tant d'hommes et de femmes de bonne
volonté.
Oui, il y aura toujours, il faut qu'il y ait
toujours cette exclamation : "Il
t'appelle !".
- "Il
t'appelle !", il t'appelle à croire que l'espérance maintient
ouverte la porte de l'avenir, même et surtout peut-être, dans le désarroi des
circonstances difficiles ou cruelles.
- "Il
t'appelle !", il t'appelle à écouter sa parole qui depuis des
siècles ouvre les yeux des aveugles, fait entendre les sourds et parler les muets.
- "Il
t'appelle !", il t'appelle à entrer en son Église qui est son
Corps et le Temple de l'Esprit Saint ! Peuple de Dieu ! Peuple d'aveugles, de
boiteux, de maladroits certes, mais Peuple de frères, de croyants en la
puissance de la résurrection et qui, de ce fait, reçoivent sans cesse cette
parole de réconfort et d'avenir : "Va
! Ta foi t'a sauvé !".
Aujourd’hui, nous-mêmes, ayons la simplicité
confiante de Bartimée en acceptant de crier notre désarroi, notre désir de
voir. De voir les réalités du monde et celles de nos vies, de tout voir
à la lumière du Christ ressuscité que célèbre toute Eucharistie !
Ne craignons pas d'appeler Jésus !
Osons nous dire, les uns aux autres : “Confiance, levons-nous, Il nous appelle !”.
Il nous appelle et nous donne rendez-vous au
carrefour de l'Espérance, à l'auberge d'Emmaüs. En cette pauvre
auberge, après une journée de marche épuisante, d'autres, avant nous,
découragés, en sont repartis le cœur brûlant car ils l'avaient "reconnu à
la fraction du Pain" (Cf. Lc 24.31).
Il nous appelle ! Et il vient vers nous en l'auberge
de son Eucharistie !
Alors, il nous sera peut-être dit, à nous
aussi, ce qu'avait dit naguère le Cal Shuster, alors archevêque de
Milan, à un moine de Solesmes devenu aveugle : "Vous ne voyez pas ce que nous voyons ! Mais vous voyez
certainement des choses que nous ne voyons pas encore !".
Ainsi donc,
que chacun puisse très humblement se reconnaître aveugle pour qu'avec Jésus il
commence à voir véritablement !
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