Epiphanie C 13 -
Après toutes les fêtes de ces derniers
jours, l’évangile d’aujourd’hui s’apparente - avouez-le avec moi - à un merveilleux conte
pour enfants. Il nous incite à rêver. Et pourquoi pas, après tout ?
Aussi, je me permets de vous inviter à
rêver avec moi devant la crèche, disons une crèche provençale !
Personne ne bouge, pas même l'âne ou le bœuf, pas même le chien sur le pont du
ruisseau. Tous sont muets, béats d’admiration, d’adoration devant l’Enfant-Dieu
de la crèche !
Soudain, voici que les Rois-Mages se lèvent
; ils s'inclinent profondément devant l'Enfant Jésus, et escaladent à nouveau
leurs chameaux. Ils vont repartir.
L'Evangile de Matthieu - le seul à nous
parler d'eux - nous dit qu'ils avaient été invités par un songe à ne pas
repasser chez Hérode. C’est normal : après avoir rencontré Dieu lui-même,
peut-on reprendre le même chemin ? Ce n’est plus possible. Aussi, l’évangéliste
précise : “Ils revinrent dans leur pays par un autre chemin.”
Où était leur pays ? Quel fut leur
itinéraire ? On ne sait !
Au fameux baptistère de Florence, on voit
une sculpture avec un détail assez
étonnant et pittoresque : les trois Mages, en pleine mer, sur une barque, sont
absorbés dans leur méditation ; et des poissons (poisson, “iXtus“ en grec, mot qui, lu
en acrostiche, signifie : Jésus Christ, Fils de Dieu, Sauveur“) - (1), des poissons
sortent la tête de l'eau pour regarder ceux qui vont proclamer un peu partout
que Jésus qu’ils ont vu est le Fils de Dieu, le Sauveur du monde ! Plus de
chameaux, plus de bagages : les trois hommes semblent fascinés par la Nouvelle
qu'ils portent en eux. Pensez donc ! Ils ont rencontré Dieu, Dieu parmi les
hommes !
Et nous qui avons été illuminés par le
Christ, en restons-nous fascinés ? Portons-nous cette même “Bonne Nouvelle“
tout au long du voyage de notre vie ?
Sur ce même tableau du baptistère, on voit
un marin enfoncer la rame. Vers quelle terre voguent-ils donc ces Mages, nos
premiers missionnaires ? Je crois qu'ils sont partis faire le tour de la Terre,
pour raconter partout l'étoile, Hérode, Bethléem, et le petit Roi dans
l'étable. A tous, Jaunes, Blancs ou Noirs, - car ils ne font pas de
distinction, eux - ils annoncent que ce petit est à eux et qu'il est venu pour
l'humanité entière. Pour faire la paix de la famille humaine. Entraîner tout le
monde vers la véritable humanité. Celle qu'on cherche dans la nuit. Celle pour
laquelle on vit et on meurt. Celle de Dieu.
Combien de temps ont-ils mis pour parcourir
les cinq continents ? Imaginons - rêvons ! - qu'il leur ait fallu
trente-trois ans ! Un soir, ils sont repassés discrètement par Jérusalem. On
entendait des cris, des piétinements. Il y avait des rues où l'on ne voyait
personne. Tout le monde était près de la porte de la ville.
Près de cette porte, ils virent un gibet :
trois crucifiés. Sur la croix du milieu, un écriteau : “Le roi des Juifs !”. C'était l'enfant qu'on avait refusé à
l'hôtellerie de Bethléem et qu'Hérode avait pourchassé. Ce jour-là, plus encore
que dans la nuit de Noël, il était nu, livré, toute vie donnée.
C'était un Vendredi après-midi. Mais le
dimanche matin, ses amis annoncèrent qu'il était ressuscité, et qu'ils
partaient, eux aussi, nouveaux Rois-mages, annoncer cette “Bonne Nouvelle“
jusqu'aux extrémités de la terre. Désormais, il n'y aura plus ni Juif ni Grec,
ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme. A tous il faut dire : “Vous êtes les enfants du même Père. Jésus a
ouvert une route que vous ne connaissez pas. C'est lui la véritable Etoile !“.
Dites-moi - et là, je ne rêve plus -
n’êtes-vous pas, ne sommes-nous pas des Mages, nous aussi, les Mages du 21ème
siècle ? A chaque instant, du moins chaque dimanche, nous venons à Bethléem, ce
qui se traduit “Maison du Pain” - pour recevoir le “Pain du ciel“ que Dieu donne
toujours comme une manne et que l’on doit toujours partager, “de sorte, dit le livre de l’Exode, que celui qui en reçoit beaucoup (disons chaque jour) n’en a pas de trop, et que celui qui en reçoit moins (disons : moins
souvent) en a suffisamment“ (Ex 16.18), une sorte de
“justice divine“ à méditer ! ; en ce Bethléem de tous les temps, on y
apprend toujours la “Bonne Nouvelle“ de l’“Emmanuel“, de “Dieu avec nous”, pour
la semer ensuite, d’une manière ou d’une autre, à tous les horizons !
Ecoutez ! Baptisés, ne devons-nous pas être
des rois obscurs, des rois nomades, des rois de grand vent.
…Avec Celui qui dira un jour, au bout de sa
route : “Mon Royaume n’est pas de ce
monde”.
…Avec tous ceux qui auront marché vers Lui,
et continué sur le chemin ouvert !
Il ne faut surtout pas l’oublier la semaine
prochaine et les jours qui suivront, quand la vie sera lourde, quand il faudra
lutter, quand il faudra se remettre en route : nous sommes rois et reines !
Dieu a donné la terre à aimer et l’humanité
future à faire naître !
Aujourd’hui encore Dieu veut naître !
Et aux princes de son Royaume, il donne
mission de faire apparaître son visage divin sur tout visage humain, et surtout
sur celui qui est à côté de moi, chez moi, avec moi.
Oui, nous sommes les Mages du Royaume à
venir. Et depuis Bethléem, depuis que Dieu s’est fait homme, nous devons
présenter et offrir à nos frères, à nos sœurs, à chacun que nous rencontrons… à
tout homme,
l’or de notre avoir,
la myrrhe de notre respect délicat et
l’encens de notre vénération
puisque nous proclamons depuis deux mille
ans, avec nos précurseurs, les Rois-Mages, la “Bonne Nouvelle“ de Dieu en
l’homme !
(1) Iésus Christos, Théou uios, sôtèr
Jésus Christ, de Dieu Fils,
Sauveur
Jésus Christ, Fils de Dieu,
Sauveur !
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