T.O.
1 Samedi - La Parole de Dieu -
Heb.
4.12
"Elle
est vivante, la Parole de Dieu, énergique et plus coupante qu'une épée à deux
tranchants... Elle pénètre jusqu'au plus profond de l'âme... !“.
Oui, la Parole de Dieu qui entre simplement
par les oreilles - "Shema
Israël !“ - " Ecoute, Israël !" - doit descendre au plus profond
de nous-mêmes, au plus intime de notre humanité. - "Et le Verbe s'est fait chair !", disait St Jean. Dans
cette perspective, l'incarnation du Fils de Dieu - Parole éternelle du Père -
demande que toute Parole de Dieu soit appropriée jusqu'à son "incarnation"
en nous-mêmes !
Il se produit alors comme un phénomène
étrange, à la fois une "nativité" et une "résurrection", en
quelque sorte, un miracle quasiment : la Parole de Dieu interpelle celui qui
l'écoute - tel qu'il est et là où il en est - et le transforme au point qu'il
devient, selon une image très souvent employée dans la Bible, comme un arbre
planté au bord d'un fleuve et qui porte du fruit en son temps et selon son espèce.
"Il
ressemble à un arbre planté au bord des eaux, dit le prophète Jérémie, qui tend
ses racines vers le courant : il ne redoute rien quand arrive la chaleur, son
feuillage reste vert ; dans une année de sécheresse il est sans inquiétude et
ne cesse pas de porter du fruit". (Jer.
17.7-8).
La Parole de Dieu demande
ainsi à être "incarnée" jusqu'au plus profond de notre être,
produisant son fruit, de telle sorte qu'elle entraîne comme un rebondissement
de tout l'être dans l'action de grâce : "Père,
je te rends grâce...", priait souvent Jésus ! Dans cette action de
grâce, la "Parole de Dieu" nous rajeunit déjà - elle rajeunit l'homme
intérieur, dirait St Paul - à l'image de l'éternelle jeunesse de Dieu.
Cette alors que cette
connaissance qui nous arrive imparfaitement par les oreilles nous prépare à la
connaissance parfaite que l'on aura par la vision, dans l'éternité. Le pouvoir
transformant de la "Parole de Dieu" en nous s'exercera au maximum ;
et nous serons, comme disent les Pères de l'Eglise, "divinisés"
: "ce que nous serons n'a pas encore
été manifesté. Nous savons que lors de cette manifestation (du
Verbe de Dieu)
nous lui serons semblables, parce que nous le verrons tel qu'il est",
nous dit St Jean dans un jeu de mots d'assonance comparable : "esométha" (semblables) - "opsométha" (verrons).
Aussi, pour le moment,
nouos faut-il non seulement écouter, mais "ruminer" la "Parole
de Dieu, à l'exemple de Marie qui retenait et méditait en son coeur. St Luc
le souligne par deux fois (2.19,51). Ce n'est pas sans signification !
Et, pour nous encourger à
imiter Marie, je ne peux m'empêcher de vous livrer (répéter peut-être ?) la
parabole du P. Barthélémy (o.p., professeur à Fribourg) : Au lieu de lire
commentaire sur commentaire, disait-il, il faut vous plonger dans la "Parole
de Dieu" ! Peut-être serez-vous alors dans cette situation où se trouvait
cette grenouille qui était tombée dans un bocal de lait dont les rebors étaient
verticaux et glissants. Le lait n'étant pas son milieu naturel (comme
la “Parole de Dieu“ n'est pas notre milieu naturel),
la grenouille s'est mise à nager au maximum, croyant toujours, bêtement comme
une bête, qu'elle trouverait une sortie. Et il n'y en avait pas ! Mais à force
de nager et de se débattre, elle a senti que ça prenait forme sous ses pattes.
C'est que le lait était devenu une motte de beurre... Et alors, elle a pu
sauter... Et bien, ajoutait-il, ne craignez pas de nager et de nager encore
dans la "Parole de Dieu"... et je suis sûr que vous pourrez sauter
jusque vers Dieu !
En tous les cas, c'est en écoutant la
"Parole de Dieu", en l'écoutant encore, en la ruminant que nous
deviendrons peu à peu le “pauvre“ que Dieu aime : “Bienheureux les pauvres ; le Royaume des cieux est à eux !“
(Mth
5.3).
Car le pauvre, de pauvreté radicale, est
celui, me semble-t-il, qui écoute toujours et que personne n'écoute.
Le pauvre a toujours écouté.
- A la maison, enfant, il écoutait
son père, sa mère !
- A l'école, assis devant le professeur, il
écoutait.
- Au catéchisme, à l'église, il écoutait
le prêtre.
- Au dispensaire ou au patronage, il écoutait
"la bonne sœur" comme on disait, qui lui prodiguait de bons conseils.
- Universitaire, il écoutait le
Maître ; ou, apprenti, le contremaître.
- Et quand, le soir, il rentrait chez lui à
la maison, c'était pour écouter encore son épouse, ses enfants, voire ses
voisins !
Et lui, le pauvre, personne ne l'écoutait
de la journée.
Le pauvre écoute toujours ! C'est peut-être
cela, la racine de toute pauvreté. Quand on définit ainsi le pauvre : celui qui
écoute toujours et que personne n'écoute, on rejoint une parole de
l'Ecclésiaste : "La sagesse du
pauvre est méconnue et l'on n'écoute pas ses paroles" (Qo 9,16).
Si nous voulons,
nous-mêmes, accéder à la béatitude promise au pauvre, il nous faut, d'abord,
faire ce qu'il fait : écouter toujours avant de parler. “Tu désires voir (Dieu), disait St Bernard, écoute d'abord !“.
Ce faisant, nous parvenons
à cette expérience répétée à chaque page de la Bible : "Le pauvre a crié, Dieu écoute" (Ps 34,7). Dieu seul écoute
le pauvre !
Toute
expérience baptismale, toute vocation chrétienne, religieuse s'inscrit dans
cette toute petite phrase : "Le
pauvre a crié, Dieu écoute" ! Pourquoi ? Parce que Dieu lui-même n'a
rien ; il EST seulement ! - Dieu EST ! Il n'a pas ! Et il l'a grandement
manifesté : "Lui, de condition divine, ...il s'anéantit lui-même..., il s'humilia,
obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix ! Aussi Dieu l'a-t-il
exalté..." (Eph 2.6sv).
A
cause de cela, le pauvre est capable d'accueillir la “Parole de Dieu", de
recevoir le “Verbe de Dieu“ qui, de riche qu'il était, s'est fait pauvre pour
que tous les pauvres - qui savent écouter - deviennent riches de la vie même de Dieu !
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