vendredi 11 juillet 2014

"Patron de l'Europe !"

11 Juillet - St Benoît,                              

Fête de St Benoît (+ 547), proclamé "Patron de l'Europe", par le pape Paul VI, le 24 Octobre 1964.

Si on parcourt le second livre des "Dialogues" du pape St Grégoire le Grand (+ 604) qui relate la vie de St Benoît, on constate que le grand fondateur de la vie monastique en Europe est souvent qualifié d'"homme de Dieu" ou de "serviteur de Dieu" !
Les deux expressions sont, me semble-t-il, identiques : l'"homme de Dieu" est au service de Dieu, au service du Christ, le "Serviteur" par excellence qu'il doit imiter, suivre.
Il doit être comme Marie, la mère du Christ, qui, elle-même, dès l'Annonciation, se reconnaît "Servante de Dieu" (Lc 1.38), de sorte que toute l'Eglise dont elle est l'image doit sans cesse être, elle aussi, en "diaconie", en état de service !
Autrement dit, l'"homme de Dieu", le "serviteur de Dieu" doit faire de toute son existence une vie "diaconale", doit s'élever, du fait même de son baptême, à la dignité de "diacre" (1) sans obligatoirement recevoir le sacrement de l'ordination diaconale.

Il est à remarquer d'ailleurs qu'une tradition issue de St Bonaventure rapporte que St Benoît était diacre. Probablement ! En tous les cas, toute sa vie fut un "service du Seigneur", un "opus Dei", un travail pour Dieu.
Et ce serait pour suivre cet exemple que St François d'Assise serait resté diacre sa vie durant, par humilité.
Il est à remarquer encore que le Concile Vatican II fait du ministère épiscopal lui-même une "diaconie", un véritable "service" en faveur de Dieu, en faveur du peuple de Dieu (L.G. 24). Aussi, le pape lui-même se dit "Serviteur des serviteurs" de Dieu !

St Benoît avait bien conscience que sa fonction de Père Abbé (du "Mont-Cassin") devait être pour lui non pas un titre honorifique, mais un signe, le signe de la présence du Christ, lui qui n'était venu en ce monde que pour servir et non pour être servi (Mth 20.28).

Ainsi, quand on prend conscience de notre vie de baptisé - a fortiori d'une vie consacrée, d'une vie sacerdotale -, on doit tendre obligatoirement à une vie de sainteté, celle du Christ, "Serviteur et Sauveur" ; et "Sauveur" parce que "Serviteur" ; on doit tendre à cette vie de sainteté que le Christ-Serviteur communique à celles et ceux qui veulent le suivre véritablement et humblement sur le chemin de l'Evangile !

De ce fait, la vie "diaconale" dont St Benoît est un exemple, cette vie de "service", - celle de tout baptisé d'abord - qui exige donc une vie sainte, comporte obligatoirement un aspect pastoral, un "ministère de la parole" afin, dit St Benoît dans sa Règle (2.5), de répandre autour de soi le "ferment de la sainteté" !

Aussi est-il dit encore que, pour témoigner, pour prendre la parole au milieu de ses frères en bien des circonstances, le P. Abbé doit avoir grand souci de fréquenter assidûment la "Parole de Dieu", les Ecritures, tant à l'Office divin que dans ce qu'on appelle la "lectio divina", la lecture amoureuse de la "Parole de Dieu" !
C'est sans doute pour cette raison que le "Patriarche des moines d'Occident" est facilement représenté avec un livre à la main. Non pas spécialement le livre de sa Règle ! Mais bien plutôt celui des Evangiles, le Livre de la Parole de Dieu ! St Benoît en était si pénétré que personne - pas même un cruel tyran du nom de Zella venu pour le maltraiter (2.31) - ne pouvait le distraire de cette lecture, ne pouvait lui ôter la paix de l'âme qu'il en recevait, ne pouvait l'empêcher de transmettre cette paix même à ce tyran qui de féroce devint doux comme un agneau... !
A l'exemple de ce Père spirituel qui reçut tellement force et puissance de vie de la "Parole de Dieu", aimons, nous aussi, nous en nourrir. Elle nous maintiendra en "paix" malgré les adversités du monde présent - si cruelles soient-elles -, en cette "paix" devenue la caractéristique de toute "maison monastique" : "Pax" - "Paix" !
[Avec l'aide, bien sûr, de Marie, la mère de Dieu, bâtissons véritablement et sans cesse le Prieuré "La Paix Notre-Dame" !].

De même encore, cette "vie diaconale", cette "vie de service", fera acquérir pour tous - même non prêtres ou diacres - une grande et respectueuse attention pour le "Corps du Christ" qu'est l'Eucharistie. St Benoît recevait ce "Pain venu du ciel" avec une foi si profonde et en même temps avec une si grande liberté que beaucoup en étaient étonnés.

Un jour, il avait menacé d'excommunication des Religieuses bavardes et médisantes (Cela peut arriver, mais rarement, à n'en point douter !). Elles moururent et, même ensevelies, on les voyait quitter l'église au moment de la communion. Benoît à qui ces faits furent rapportés donna la consigne suivante : "Allez, et faites présenter pour elles au Seigneur cette offrande (de l'Eucharistie), et elles ne seront plus séparées de la communion des fidèles !".
Et St Grégoire le Grand d'ajouter : "Dès que cette offrande fut présentée pour elles et que le diacre avertit, selon l'usage, ceux qui ne communiaient pas de sortir de l'église, on ne les vit plus sortir comme auparavant, ce qui prouve avec évidence... qu'elles avaient été reçues à la communion de Dieu, par le ministère de son serviteur", Benoît (2.23). Récit bien naïf, amusant, et peu historique sans doute ! Cependant il souligne chez St Benoît une grande foi en la puissance de l'offrande eucharistique pour les vivants comme pour les défunts. Pratique moins fréquente aujourd'hui ! C'est dommage. Car célébrer le Christ en son mystère pascal renouvelé par l'Eucharistie, c'est toujours relier pour quiconque ciel et terre, c'est établir pour vivants et défunts un "pont" entre terre et ciel. Le Christ est bien notre "Pontifex", celui qui fait le "pont", le lien entre Dieu et les hommes !

Et à propos de sa propre mort, St Benoît, dit St Grégoire le Grand, "prépara son passage à une autre vie par la réception du Corps et du Sang de Notre Seigneur !" (2.37). Il est impressionnant de constater combien St Benoît, dès le 6ème siècle, était assidu à la participation de l'Eucharistie, combien il avait compris cette parole du Seigneur : "Celui qui me mange vivra par moi" (Jn 6.57).

St Paul, en sa lettre aux Colossiens, évoquant les questions complexes de nourriture et de boisson, de fêtes, de lunes et de sabbats, écrivait : "Tout cela n'est que l'ombre des choses à venir ; mais la réalité, c'est le Corps du Christ !" (2.17). Le Réel, c'est le Corps du Christ. Réalisons-nous, à l'exemple de St Benoît, que l'Eucharistie contient substantiellement le Bien spirituel de toute l'Eglise, contient le Corps du Ressuscité qui seul peut donner Vie éternelle ?

Facilement, nous cherchons, nous, non plus des solutions à des questions "de nourriture, de boisson", etc, comme au temps de St Paul..., mais nous recherchons des impressions, des relations, des affections et que sais-je encore. Et c'est parfois bon. Mais souvent, nous nous faisons illusion et nous trompons notre faim et notre désir. Laissons-nous surtout attirer par le Christ, aimons son Corps eucharistique ; c'est par Lui que nous faisons déjà partie de son Corps qu'est l'Eglise en attendant de participer pleinement et éternellement à la vie de son Corps glorieux !
Laissons cette parole descendre en notre âme comme elle était descendue en celle de St Benoît : "La réalité, c'est le Corps du Christ !".

 (1) "Diacre" en grec signifie "service".

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