T.O. 17
Dimanche
Les textes de ce jour paraissent
disparates. Sans vouloir à tout prix les réunir sous un même intitulé, nous
pouvons, sans doute, y découvrir, une fois de plus, la cohérence de vie que
la foi chrétienne nous propose.
l - St Paul nous place immédiatement
devant l'essentiel de la foi et de la vie chrétienne. Pour lui, pour nous avec
lui, la foi n'est pas une idée mais une personne : Jésus-Christ. Paul
écrira aux Philippiens (1.21) : "to zèèhn
Cristoj" ("to dzèn Christos"). "Vivre
Christ !", tant les deux mots sont pour lui interchangeables. La vie,
c'est laisser vivre en nous le Christ ! Si bien que St Paul pourra écrire : "Ce n'est plus moi qui vis, c'est le
Christ qui vit en moi !" (Ga. 2.20). Elle est très importante cette
affirmation. Souvent, trop souvent, on réduit la prédication, l'apostolat à des
dogmes, à des certitudes intellectuelles, voire - et c'est affreux si c'est
restrictif - à tout un système de lois morales. Pour Paul, la foi, c'est
rencontrer Jésus Christ, c'est faire l'expérience d'une alliance avec
Dieu ! Certes, cette rencontre, cette alliance ont des caractéristiques qui
obligent l'intelligence et la vie morale. Il reste que l'important, c'est de
"rencontrer" le Seigneur, de "marcher
avec Dieu", de "marcher
devant Dieu", de "marcher
vers Dieu", selon les termes fréquents de l'Ancien Testament.
Le texte de Paul, parce que concis, trop
concis souvent, a donné occasion à bien des difficultés dans l'histoire de
l'Église. Paul nous dit en effet que ceux que Dieu sauvera, "il les a appelés de toute éternité"
et, comme par avance, il les a "prédestinés"
à devenir ses fils.
Certains ont pu conclure de cette "prédestination"
à la négation de la liberté humaine. Si je suis sauvé par avance, c'est
bien que je n'ai aucun poids personnel dans la décision de mon salut. A ce
sujet, il convient de se rappeler que Dieu est dans l'éternité. Pour lui il n'y
a ni passé, ni présent, ni avenir. Pour Dieu le mot "prédestination"
ne signifie rien. Il n'a de sens que pour nous qui sommes dans le déroulement
du temps.
Ce que St Paul exprime par des expressions
de ce genre, c'est la découverte qu'il a faite, par le Christ, de l'amour
infini de Dieu, amour éternel, amour qui nous précède évidemment puisque
dès le premier instant de notre existence nous sommes déjà aimés. Oui, nous
sommes aimés par avance.
Or le propre de l'amour c'est bien
d'attendre la réponse de l'aimé. Lorsque cette réponse est donnée, fruit de la
liberté de celui qui est aimé, il est clair que ce n'est pas cette réponse
qui crée l'amour. Certes, la liberté de celui qui est aimé est totale. Et
pourtant ce n'est pas elle - cette liberté - qui fait que l'amour existe. Sans
l'amour préalable de Dieu, jamais une réponse humaine n'aurait existé.
Essayons, au fil de nos moments libres, de
contempler cet amour qui nous précède et
qui nous destine à l'éternité de Dieu.
- Essayons aussi de réfléchir à notre réponse à cet amour, à l'aide de
l'Évangile de ce jour.
2 - Cette page
de St Matthieu, au fond, ne nous dit qu'une seule chose. Le véritable
croyant, c'est celui qui a reçu le "coup de foudre" de la personne du
Christ, avec lui, en lui ! Ce "trésor" caché dans un champ, c’est
l'amour de Dieu. Une fois qu'il l'a vraiment découvert, comment un croyant
ne donnerait-il pas tout ce qu'il a pour l'acquérir ? Cette espèce de frénésie,
de polarisation totale des énergies que tous les amateurs de trésors sont
capables d'exercer en vue d'obtenir l'objet de leur désir, comment se fait-il
qu'elle ne devienne pas nôtre, si vraiment l'amour de Dieu nous apparaît
comme l'essentiel, comme un "trésor" ? L'acharnement à "jouir"
du trésor qu'est l'amour de Dieu, pourquoi ne devient-il pas le nôtre si vraiment
cet amour divin nous semble primordial ?
C'est à ce manque
d'enthousiasme et d'acharnement que nous mesurons toute la distance qui nous
sépare de notre vocation, du but auquel l'amour de Dieu nous destine, nous
"prédestine". Nous avons dit "oui" à cet appel, mais nous
nous attardons encore à nos vieilles amours. Nous demeurons attachés aux
fausses idoles, aux faux "trésors" qui sont placés au centre de nos
vies par notre égoïsme, nos envies de toutes sortes. - Va, "vends tout ce que
tu possèdes", est-il dit à l'homme riche. Nous sommes loin de
cette radicalité. Notre foi n'est pas encore la foi d'un profond amour.
Et voilà pourquoi
l'Evangile de ce jour nous conseille un lent et patient labeur de tri. Comme le
pêcheur qui passe un à un les poissons de son filet pour garder les bons et
jeter les mauvais, c'est à ce travail que nous sommes invités pour replacer
Dieu et son Royaume à leur vraie place dans nos vies.
3 - Si notre réponse à l'amour fou de Dieu
ne peut encore prendre la forme éclatante et soudaine d'un “coup de foudre”
comme pour Paul et de bien des saints, qu'elle sache emprunter les chemins plus
sinueux et laborieux de la sagesse, d’un cœur qui sache écouter à
l'exemple de Salomon (1ére
lect.).
Certes, Salomon n'a pas encore reçu la révélation du Fils donné par Dieu au
monde dont nous parle St Paul. Pourtant, à cause de cette capacité d'écouter,
d'accueillir, il en porte une totale espérance. À cause de cette espérance, il
ne demande donc qu'une seule chose : "avoir un cœur qui écoute".
Cette nécessité d'écouter, d'accueillir - qui est le secret de la Sagesse et
qui contient déjà les prémisses de la foi - est capable de permettre les grands
choix de la vie et de faire éclore en nous l’espérance. Cette espérance n'est
pas encore la lumière fulgurante de l'évidence. Elle est, cependant, la
boussole qui permet de s'orienter dans la nuit.
L'Eglise a toujours reçu, parmi ses
membres, de grands amoureux de Dieu comme un St Paul, un St François et de tant
d'autres. Leur fulgurance aide tous les autres chrétiens à marcher avec
persévérance sur les chemins de l'espérance et à acquérir, peu à peu, en place
de la fausse sagesse qui vient des hommes, la vraie Sagesse qui vient de Dieu
et qui prépare notre cœur à l’accueillir.
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