lundi 7 juin 2010

T.O. 10 Lundi - Le prophète Elie - (I Rois 17. 1-6 ; Mth 5.1-12)

En méditant sur la première lecture, vous ferez vous-mêmes les applications qui vous semblent bonnes ! Mais avec Elie, il y a tout une spiritualité importante. Le Carmel, c’est la montagne de la retraite et du choix. Car le problème toujours permanent est celui de garder fidélité au Dieu de l’Alliance - et Dieu veut toujours faire alliance avec chacun de nous - face à une culture, des situations qui sont souvent très indifférentes, voire hostiles ! Notre Seigneur avait bien cerné la question : “Vous êtes dans le monde, mais vous n’êtes pas du monde !“. Vous n’appartenez pas au monde, mais à Dieu ; et vous êtes dans le monde pour le “tourner“ (“metanoia“ ! = le convertir) vers le vrai Dieu !

Et lui-même, Jésus, a été très souvent vers les pays païens, soit à l’est (Décapole…), ou à l’est (vers Tyr, Sidon…), soit au nord (vers Césarée de Philippe…) pour manifester justement cet élargissement universaliste du salut concernant tout homme, afin qu’il se “tourne“ vers Dieu !

Mais cela n’est pas évident ! Etre dans le monde tout en n’étant pas du monde. C’est le drame permanent du chrétien. Et St Paul, surtout, a donné l’exemple d’une ouverture au monde tout en gardant sa fidélité au Dieu Unique, à ce Dieu manifesté en Jésus Christ, mort et ressuscité pour le salut du monde entier !

Au temps du roi Achab (9ème s.), les alliances culturelles, économiques entraînent des alliances amicales et même matrimoniales. Ainsi, Achab se marie avec la fameuse reine Jézabel qui n’est rien moins que la fille du roi-prêtre des phéniciens (ces grands navigateurs commerciaux que n’étaient pas les Hébreux !), fille d’Ittobaal, roi des Sidoniens. Et c’est ainsi que le culte de dieux étrangers (de Baal) s’introduit jusque dans la cour des rois d’Israël. On s’en rend compte : une amitié même constructive sur le plan humain (culturelle, économique, familiale…) n’est pas sans dangers…

C’est alors que le prophète Elie surgit au Carmel, à la conjonction des pays concernés. Il va convoquer le peuple pour lui dire : “Jusqu’à quand allez-vous clocher des deux jarrets ?“. Choisissez entre le Seigneur ou Baal ! Entre Dieu et le monde. “Vous êtes dans le monde, car “tout est vous“ ; mais ne soyez pas du monde, “car, dira St Paul, vous, vous êtes au Christ et le Christ est à Dieu !“.

Aussi Elie annonce un signe : “Par le Dieu vivant, il n’y aura ni rosée, ni de pluie… sauf à mon commandement… que je tiens du Seigneur !“. (Arrêter la pluie sur le Carmel, c’est assez extraordinaire… !).

Puis, ce signe étant posée, la parole de Dieu lui fut adressée : “Va-t-en d’ici, dirige-toi vers l’Orient et cache-toi au torrent de Kerrit qui est à l’est du Jourdain !“. Quand Dieu suscite un homme pour une mission importante, il commence toujours par lui dire : “Va te cacher !“.
  • Moïse demeura, réfugié, une quarante d’années dans le pays de Madiân avant la grande aventure de l’Exode (il mourut à 120 ans !!!)
  • Jésus lui-même mène une “vie cachée“, trente ans durant, avant sa “vie publique“ qui ne dura que trois ans !
  • Et pour Paul également : avez-vous compté le temps qui s’écoule entre sa conversion sur la route de Damas et puis le moment où Barnabé vient le chercher pour le conduire de Tarse à Antioche ? Je crois qu’on peut compter plus de dix ans ! Qu’a-t-il donc pu faire pendant tout ce temps, ce fougueux persécuteur qui devint un ardent missionnaire ? Après le chemin de Damas, il partit pour l’Arabie, dit-il (Gal. 1.17). Au désert ! C’est souvent au désert que Dieu parle (“midbar, dibarti“ : “au désert, je parlerai“ - Osée 2.16), et prépare ses serviteurs…

Ainsi en fut-il, en tous les cas, pour Elie. Il s’établit dans une solitude. Et Dieu lui dit : “Tu boiras au torrent et j’ordonne aux corbeaux de te donner à manger… !“. Les divers “régimes“ de vie sont souvent des voies de fécondité… Et, dans le domaine apostolique, elles sont encore plus vérifiables que dans bien d’autres. La phrase veut souligner, en tous les cas, qu’Elie refait toute l’expérience du peuple dans le désert, dans un état de dépendance, de pauvreté radicale et, de ce fait, d’écoute ! Et alors, là, dans la solitude, il va connaître Dieu, comme le peuple l’avait connu dans le désert. Tous les saints, me semble-t-il, ont fait cette expérience !

Un peu plus tard, Elie fera cette expérience extraordinaire : Lorsque, découragé, il demande à Dieu de se révéler à lui, une série de phénomènes météorologiques se produisent : tonnerre, vent, éclairs. Chaque fois, la Bible dit : Et Dieu n'était pas dans le bruit, dans le vent, dans le feu (I Rois 19/11). Et soudain le prophète entend “la voix d'un silence ténu“ (on pourrait traduire mot-à-mot : “dans l’éclatement d’un silence“ - “dans une poussière de silence“).

Sans doute que pour être dans le monde sans être du monde, pour parler de Dieu dans le tintamarre de notre siècle qui facilement parasite le langage divin, qui le tue, il faut savoir se soumettre à cette expérience de la parole de Dieu qui aime se manifester “dans le bruissement d’un silence ténu“. Aussi, ayons au moins, comme dit St Luc “un cœur qui écoute“ !

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