Avent 1 Mercredi 12-13 -
“De
grandes foules vinrent à lui, avec des boiteux, des aveugles, des estropiés,
des muets, et beaucoup d’autres infirmes…
Jésus les guérit“ ! Et il multiplia des pains pour toute la foule…
Il y aurait beaucoup à dire sur la
multiplication des pains, ce Signe des signes accomplis par Notre
Seigneur ! Le Signe par excellence !
Ce
Signe est à la fois mémoire du passé et Annonce de l’avenir !
- Ce signe est mémoire des hauts
faits de Dieu envers son peuple : “Pour
le nourrir, Dieu fit pleuvoir la manne !“, dit le psaume 78ème
(Cf.
Ex. 16 ; Nb 11).
Et, de même, au nom de Dieu, le prophète Elisée multiplie orge et blé, car,
dit-il, “on mangera et il y aura des
restes !“ (2
Reg 4.43).
La manne, le blé que Dieu donne est le
symbole de sa présence efficace. C’est ainsi, dit Dieu, “que vous connaîtrez que c’est moi le Seigneur, votre Dieu !“ (16.12).
- Ce
signe est aussi annonce de l’avenir ! Il annonce les hauts faits
que le Seigneur accomplira encore si l’on met toute sa confiance en sa parole,
car “l’homme ne vit pas seulement de
pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu !“. (Mth 4.4 – Cf. Dt
8.3).
Aussi, le vrai pain, c’est Jésus
lui-même ! “Je suis le pain vivant
qui descend du ciel !“. Il est le vrai pain, étant le “Verbe de Dieu“, la Parole de Dieu dont
il faut se nourrir, qu’il faut garder : “Celui qui garde ma parole ne verra pas la mort“ (Jn 8.51). Table de la
parole et table du pain qu’il ne faut jamais séparer !
Jésus, au soir du Jeudi-Saint,
à la veille d’accomplir son mystère pascal,
son “exode“ dont il s’était entretenu avec Moïse et Elie sur la montagne de la
Transfiguration (1),
avant d’accomplir cet exode au plein sens
du mot - sa Pâques, son passage de la mort à la vie -,
Jésus prit du pain, le distribua en
disant : “Faites ceci
en mémoire de moi !“
.
- Une
mémoire d’un haut fait divin en vue du salut à venir pour la multitude des
hommes,
- une mémoire qui annonce un avenir,
car ce pain est déjà, pour notre propre exode à la suite du Christ, “pain des anges devenu pain des voyageurs“
(2).
Oui, ce pain est “le pain de Dieu qui descend du ciel et qui donne la vie au
monde !“ (Jn
6.33).
Celui qui mange de ce pain “a la vie
éternelle ; et moi, dit Jésus, je
ressusciterai au dernier jour“ (Jn 6.54).
Et St Jean écrira dans son
Apocalypse : “Au vainqueur, je
donnerai de la manne cachée !“. La “manne cachée“ est
une allusion à la manne du désert conservée, cachée, dans l’arche de
Dieu avec les tables de la Loi et le bâton de Moïse (Cf. Ex. 16.32 ;
Heb. 9.4).
Et cette arche fut elle-même “cachée“ par Jérémie au Mont Nébo, après la
ruine de Jérusalem. Selon la tradition juive, elle sera retrouvée “au jour du Seigneur“, au jour où nous
serons tous un dans le Christ, comme lui-même est Un avec son Père (cf. Jn 17.21sv). Car alors, “nous serons semblables à lui puisque nous
le verrons tel qu’il est !“ (I Jn 3.2).
“Nous serons semblables à lui… !“. Finalement, par
l’Eucharistie - pain et vin donnés en nourriture -, c'est moins le Christ qui
descend en nous que nous qui sommes rendus présents à son Corps, en avant-goût
de l'éternité. Ainsi le pain et le vin deviennent-ils apparence, transparence en
totale référence au Corps du Christ désormais glorieux.
Je me permets de préciser un détail :
St Matthieu, à la charnière des deux Testaments, ce “bon scribe qui tire de son trésor de l’Ancien et du neuf“,
autrement dit qui discerne dans les paroles et les gestes de Notre Seigneur
l’accomplissement des actions divines au travers des âges passés (3) pour
annoncer sa présence efficace dans les âges à venir, est le seul à insister sur
la présence des aveugles, des estropiés…, des muets, etc.
Pourquoi ?
C’est que ce bon scribe de Matthieu connaît
bien son “Histoire Sainte“. Quand David est sur le point de conquérir la petite
colline des Jébuséens qui deviendra Jérusalem où sera construit le temple de
Dieu, ses ennemis lui firent savoir : “Tu
n’entreras ici qu’en écartant les
aveugles et les boiteux !“. C’était pour dire : “David n’entreras pas ici !“.
Et pourtant, David s’empara de la colline
de Sion ; Alors, une rumeur circula rapidement : “Quant aux boiteux et aux aveugles, ils dégoûtent David“. Et l’on ira répétant : “Aveugles et boiteux n’entreront pas dans la Maison“, dans la Cité
de David, dans le Temple. (cf.
2 Sam 5/6 sv).
Voilà pourquoi les aveugles et les boiteux… ne pouvaient entrer dans le
temple ! Seul le Messie, d’après les prophètes (Isaïe) pourra supprimer
cette exclusion, cette discrimination.
Aussi, Jésus, descendant de David certes,
mais nouveau Moïse que Moïse lui-même avait annoncé comme plus grand que lui (Cf. Dt. 18), fera mieux que
lui : il donnera à tous sans exception le vrai pain venu du ciel ;
il donnera accès pour tous au vrai Temple de Dieu qu’il est lui-même (son Corps !).
Ainsi, Jésus répondra simplement aux
émissaires de Jean-Baptiste qui lui demandaient : “Es-tu celui qui doit venir ?“…, : - “Allez dire à Jean : les aveugles voient, les sourds entendent,
les boiteux marchent, les pauvres sont évangélisés…“. Ce qui veut dire : Je suis le Messie
annoncé par les prophètes, Messie pour toutes les nations sans exception,
Messie pour la multitude des hommes, ce
Messie qu’Israël doit lui-même reconnaître et annoncer au monde entier.
C’est un détail historique mais qui
entraîne une seule et importante remarque : Désormais, même si nous sommes
aveugles, estropiés, muets, infirmes… - et nous le sommes tous d’une
manière ou d’une autre -, sachons que Jésus nous accueille et nous accueillera
à son festin du Royaume de Dieu dans la Jérusalem céleste, à ce festin dont
l’Eucharistie est le repas viatique pour y parvenir.
Mais : “Savons-nous nous reconnaître
suffisamment aveugles et infirmes ? Car Jésus n’a-t-il pas dit : “Je suis venu appeler non pas les justes,
mais les pécheurs !“. Qu’en sera-t-il donc de ceux qui se disent et se
déclarent justes… ?
(1) “Ils
parlaient de son exode qu’il allait accomplir à Jérusalem !“ (Lc 9.30)
(2) “Ecce panis angelorum, factus cibus
viatorum“ (Seq.
Lauda Sion…)
(3) Ici : la
manne, et le miracle d’Elisée.
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