samedi 24 janvier 2015

Appels divins !

3e Dimanche du T.O. 15/B  -  

[après un temps de silence dû à une mauvaise bronchite, je reprends un peu la plume et le clavier sans avoir aucunement délaissé par le pensée et la prière mes lecteurs ! ]

En route vers Ninive, la grande ville païenne, le prophète Jonas ruminait de sombres pensées : "Pourquoi Dieu m'envoie-t-il à ces gens-là ? Après tout, ce ne sont que des païens pleins de méchancetés".
Il "ronchonne", Jonas ! Mais il nous est sympathique, car on lui ressemble tellement, n'est-ce pas ? Non, il ne voulait pas y aller, Jonas, en mission à Ninive ! Pourquoi son Dieu, le Dieu des juifs, voulait-il sauver des païens ?
Quand Dieu lui avait confié cette mission, Jonas avait bien essayé de s'y soustraire en fuyant, - oh ! la "sainte" fuite silencieuse, si facile ! - ; cependant, il avait fini par obéir, contraint et forcé, mais sans aucun zèle : dans une ville qu'on mettait trois jours à traverser, il avait prêché pendant un seul jour. Et il s'était arrêté, là, Jonas !  Or, chose incroyable, tous les habitants de Ninive avaient cru en Dieu et s'étaient détournés de leur mauvaise conduite. Alors, Dieu avait renoncé au châtiment, lui montrant ainsi, à Jonas, qu'il n'était pas seulement le "Dieu des juifs", mais le "Dieu de tous les hommes", à qui les juifs devaient le faire connaître.

Trop souvent, nous réagissons, nous aussi, comme Jonas. "Pourquoi s'intéresser à tels ou tels hommes ; ils n'en valent pas la peine ! D'ailleurs, ils sont irrécupérables - leur vie dépravée en témoigne -" ! Ou bien : "Tiens, un tel, une telle ici ! Est-ce bien sa place ?" Combien de fois avons-nous dit ou pensé de telles phrases, avons-nous jugé, classé un peu vite les gens qui nous entouraient, qui même venaient humblement vers nous, les plaçant facilement en bas de l'échelle qui monte vers Dieu, nous-mêmes étant bien plus haut évidemment. Notre intolérance pharisaïque - plus ou moins consciente - nous empêche parfois d'admettre que nous ne sommes pas les seuls à détenir la vérité, cette vérité qui mène toujours sur le chemin de Dieu. Car "Celui qui fait la vérité, dira St Jean (3.21) vient à la lumière !".

D'ailleurs, nous sommes souvent étonnés par les jugements de Dieu, si différents des nôtres. Quand Jésus appelle des hommes pour devenir ses apôtres, ce ne sont pas ceux auxquels les juifs pouvaient s'attendre. Ce ne sont pas des gens instruits, des gens qui connaissent les Ecritures et appliquent les lois juives à la lettre pour plaire à Dieu. Non, ce sont de simples pêcheurs, en train de travailler sur les bords du Lac de Galilée, qui vont devenir les plus proches compagnons du Fils de Dieu. A-t-on suffisamment réfléchi à cette manière de faire de Jésus ?

On entend souvent : s'affirmer chrétien oui, certes ! (Ce n'est déjà pas mal, n'est-ce pas ?). Mais recevoir une mission si petite soit-elle, je n'en suis pas capable, pas digne ! Et on fait comme Jonas !  Mais peut-on faire cette réflexion, quand on est appelé par Dieu, comme les simples pécheurs du lac de Galilée ? Or, tous, nous sommes appelés à une mission au fil du temps. A nous de découvrir, même à l'intérieur d'un monastère, cette mission d'un moment, d'un jour, d'une semaine peut-être, voire une mission plus permanente... En tous les cas, Dieu appelle à chaque instant ! A nous d'être à l'écoute..., comme le petit Samuel (de Dimanche dernier) au temps du prêtre Eli : "Parle, Seigneur, ton serviteur écoute !"

Lorsque Jésus appelle, Simon, André, Jacques et Jean quittent tout pour le suivre ; ils abandonnent leur père et la barque de pêche familiale, ils renoncent à leur avenir tout tracé. Et quand on connaît l'importance du clan familial chez les Juifs pour la survie d'un chacun, rompre les liens de parenté était une folie quai-suicidaire ! De plus, ces pécheurs qui quittent barque et filets ne savent même pas, en contrepartie, à quoi ils s'engagent. Pour eux, devenir des "pêcheurs d'hommes", ça ne doit pas vouloir dire grand-chose, encore ! Et pourtant, ils suivent Jésus comme si c'était tout naturel pour eux.

Dans la deuxième lecture, Paul veut dire la même chose aux Corinthiens, d'une manière qui peut nous paraître aujourd'hui assez brutale et catégorique. Mais il s'adressait à des chrétiens qui vivaient à Corinthe, en un monde très matérialiste et même dépravé. Pour pouvoir répondre à l'appel de Jésus, semble-t-il dire, ne soyez pas centrés sur vous-mêmes, vos intérêts, vos plaisirs ; votre petite vie personnelle n'a que peu d'importance par rapport à la mission qui vous est confiée par Dieu. Il y a urgence, dit Paul ; "le temps est limitée !".

Aujourd'hui, c'est à chacun d'entre nous que Dieu s'adresse. Oh, bien sûr, je ne crois pas qu'il nous demande de laisser tomber travail et famille, et de partir sur les routes prêcher l'Evangile.
Plus simplement, à notre place, nous pouvons répondre à son appel, que nous recevons souvent par l'intermédiaire des autres, comme pour les apôtres. Et cet appel de Dieu, si nous y répondons, entraîne une rupture avec nous-mêmes, une remise en question de notre existence bien organisée.
Il est vrai que ce n'est pas toujours facile de changer de vie, même en partie, de changer ses habitudes, de donner de son temps. Oui, il faut accepter d'être dérangé ou tout simplement accueillir, acquiescer, accepter…  Dans le cas des apôtres Jacques et Jean, il n'a pas dû être très simple pour leur père de voir partir ses deux fils !  Sa réponse, à lui, fut d'abord d'accepter !

Des exemples actuels de ce "oui" nous viennent facilement à l'esprit.
Assez régulièrement, nous entendons parler de gens qui consacrent un temps plus ou moins long et tout à fait bénévolement, au service de la prière, de la prière mariale, au service des autres ; peut-être même en connaissons-nous ! Tel père de famille qui, en plus de son travail, s'organise pour rendre service. Telle mère de famille déjà assez occupée qui prend en charge une équipe de catéchisme. Que sais-je encore ? Ces personnes-là, nous en connaissons tous. Bien sûr, elles ne font rien d'extraordinaire, mais leur "oui" n'en a pas moins de valeur pour autant.

On dit facilement aujourd'hui que les diverses associations manquent de plus en plus de responsables. Et certaines disparaissent, faute d'encadrement. L'Association fondée par le Christ et qui s'appelle "Eglise" va-t-elle manquer, elle aussi, de membres actifs et dévoués ? Il ne s'agit pas seulement de vocations sacerdotales ou religieuses, si importantes soient-elles. Il s'agit de chacun d'entre nous ! Dieu appelle toujours, à tout âge, à toute heure ! Chacun a une vocation propre, personnelle, certes ! Ne serait-ce que la vocation de l'amour dans le mariage, vocation la plus commune sans doute, mais vocation consacrée par un sacrement. Mais chacun doit trouver également sa vocation en l'Eglise, vocation ecclésiale. "Dieu a besoin des hommes", de vous tous, de nous tous. De nous tous, même en Communauté où il y a très souvent de multiples "missions" à découvrir, à accomplir, comme le remarquera Ste Thérèse de Lisieux qui s'écrira : "Au cœur de l'Eglise, je serai l'amour !".

"Venez derrière moi..." Comme aux apôtres il y a deux mille ans, cette phrase s'adresse aujourd'hui à chacun de nous. Saurons-nous l'entendre et faire cette supplique, à notre tour : "Seigneur, que faut-il que je fasse ?"

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