vendredi 18 janvier 2013

"Lève-toi et marche !


T..O. 1 Vendredi   Mc 2.12 – “Lève-toi et marche !“

“Lève-toi et marche !“  Pour illustrer ce mot de l’évangile d’aujourd’hui, je citerai volontiers la phrase de Bergson : "Ce qui m'a frappé dans le Jésus des Evangiles, c'est cette consigne d'aller toujours plus avant, de sorte qu'on pourrait dire que l'élément stable du christianisme, c'est l'ordre de ne jamais s'arrêter"

Et, faute de temps - je l’avoue simplement -, j’illustrerai ce propos par le début du panégyrique de Bossuet sur St Benoît, texte qui peut inspirer tout chrétien, me semble-t-il.

« Toute la perfection de l’Evangile, toute la discipline chrétienne est entièrement renfermée dans cette seule parole : “Egredere !” - “Sors !”. 

La vie du chrétien est un long et infini voyage durant le cours duquel, 
quelque plaisir qui nous flatte, 
quelque compagnie qui nous divertisse, 
quelque ennui qui nous prenne, 
quelque fatigue qui nous accable, 
aussitôt que nous commençons à nous reposer, une voix s’élève d’en haut qui nous dit sans cesse et sans relâche : “Egredere !” - “Sors !”, et nous ordonne de marcher plus outre.  
Telle est la vie chrétienne !

Dans ce grand et infini voyage, où nous devons nous avancer sans relâche et marcher sans repos, je remarque trois états et comme trois lieux où nous avons coutume de nous arrêter.
ou bien nous nous arrêtons dans le plaisir des sens,
ou bien dans la satisfaction de notre esprit propre,
ou bien enfin dans la vue de notre perfection.
Voilà comme trois pays étrangers dans lesquels nous nous arrêtons et ensuite nous n’arrivons pas en notre patrie !

Et remarquons les divers progrès que fait l’âme durant ce voyage.
ou nous nous arrêtons au-dessous de nous ;
ou nous nous arrêtons en nous-mêmes ;
ou nous nous arrêtons au-dessus de nous.

Lorsque nous nous attachons au plaisir des sens, nous nous arrêtons au-dessous de nous !
C’est le premier attrait de l’âme encore ignorante, lorsqu’elle commence son voyage. 
Elle trouve premièrement en son chemin cette basse région ; elle y voit des fleuves qui coulent, des fleurs qui se flétrissent du matin au soir ; tout y passe dans une grande inconstance.
 Mais, dans ces fleuves qui s’écoulent, elle trouve de quoi rafraîchir sa soif ; elle promène ses désirs errants dans cette variété d’objets ; et quoiqu’elle perde toujours ce qu’elle possède, son espérance flatteuse ne cesse de l’enchanter de telle sorte qu’elle se plaît dans cette basse région.
“Egredere !” - “Sors !”. Songe que tu es faite à l’image de Dieu ; rappelle ce qu’il y a en toi de divin et d’immortel ; veux-tu être toujours captive des choses inférieures ?

Que si elle obéit à cette voix, en sortant de ce pays, elle se trouve comme dans un autre, qui n’est pas moins dangereux pour elle ; c’est la satisfaction de son esprit propre
Nuls attraits que ses désirs, nulle règle que ses humeurs, nulle conduite que ses volontés.
Elle n’est plus au-dessous d’elle, elle commence à s’arrêter en elle-même : la voilà dans des objets et dans des attaches qui sont plus convenables à sa dignité !
Et toutefois, l’oracle la presse et lui dit encore : “Egredere !” - “Sors !”.  Ame, ne sens-tu pas, par je ne sais quoi de pressant qui te pousse au-dessus de toi, que tu n’es pas faite pour toi-même ? Un bien infini t’appelle ; Dieu même te tend les bras : sors donc de cette seconde région, c’est-à-dire de la satisfaction de ton esprit propre.

Ainsi elle arrivera à ce qu’il y a de plus relevé et de plus sublime, et commencera de s’unir à Dieu.
Et alors, ne lui sera-t-il pas permis de se reposer ? 
Non, il n’y a rien de plus dangereux : car c’est là qu’une secrète complaisance fait qu’on s’endort dans la vue de sa propre perfection. Tout est calme, tout est apaisé ; toutes les passions sont vaincues ; toutes les humeurs, domptées ; l’esprit même, avec sa fierté et son audace naturelle, abattu et mortifié : il est temps de se reposer !
Non, non ! “Egredere !” - “Sors !”. Il nous est tellement ordonné de cheminer sans relâche, qu’il ne nous est pas même permis de nous arrêter en Dieu ! Car, quoiqu’il n’y ait rien au-dessus de lui à prétendre, il y a tous les jours à faire en lui de nouveaux progrès ; et il découvre, pour ainsi dire, tous les jours à notre ardeur de nouvelles infinités. Ainsi, nous enfermer en certaines bornes, c’est entreprendre de resserrer l’immensité de sa nature.

Allez donc, sans vous arrêter jamais : perdez la vue de toute la perfection que vous pouvez avoir acquise ; marchez de vertus en vertus, si vous voulez être digne de voir le Dieu des dieux. Telle est la vie chrétienne ! ».


Rien n’est un terme ici-bas. Tout est seuil, départ, commencement ! Le Seigneur nous a dit, nous dit et nous dura toujours : “Viens ; suis-moi !“ N’ayons pas peur de le suivre.
 A qui possède Dieu, rien ne manque ! "Dieu seul suffit !", disait Ste Thérèse d'Avila

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