lundi 7 janvier 2013

Foi et Charité !


Lundi après Epiphanie  C 13 

St Jean est souvent d’une lecture un peu difficile. Son discours est comme les vagues d’une marée montante. Chacune, se nourrissant du reflux des précédentes, ne fait que ramener ce qu’elles contenaient avec, cependant,  un enrichissement, une vigueur nouvelle, en vue d’une avancée plus importante !  -  Dans la lecture d’aujourd’hui, l’Apôtre ne fait que conclure son enseignement précédent.

Tout d'abord, il nous encourage : “Tout ce que nous demandons au Seigneur, il nous l’accorde !“. C’est le privilège du chrétien d’avoir l’assurance d’être écouté du Seigneur, d’être exaucé ! Notre Seigneur lui-même disait : “Demandez et l'on vous donnera ; cherchez et vous trouverez... Car quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve...  Si vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est dans les cieux en donnera-t-il de bonnes à ceux qui l'en prient !“ (Mth 7.7—11).

Pour St Jean, cette assurance s’enracine dans la foi du chrétien et dans la conformité de son vouloir avec la volonté divine : “garder ses commandements et faire ce qui plaît au Seigneur !“.
La logique est absolue : soucieux d’obéir aux commandements de Dieu, le croyant ne peut rien demander qui ne soit accordé à cette volonté divine. St Paul dira que dans une telle prière, Dieu reconnaît son Esprit : “L'Esprit vient au secours de notre faiblesse ; il intercède pour nous en des gémissements ineffables. Et Celui qui sonde les cœurs sait quel est le désir de l'Esprit et que son intercession pour les saints correspond aux vues de Dieu !“ (Rm 8.26-27).

Cela étant affirmé, St Jean revient au thème qui lui est cher : la foi et les commandements dont le principal est de “nous aimer les uns les autres“.
Autrement dit : pour faire des actes de charité explicites, il faut faire des actes de foi. La foi et la charité sont liées ! On l’oublie parfois facilement. Et souvent, on baptise un peu vite du nom de “charité“ tout sentiment d’amour éprouvé ! Pour un chrétien, normalement, il y aura toujours un acte de foi pour que la charité s’exerce véritablement en lui. Un regard de charité est un regard inspiré par la foi. Il faut sans cesse dépasser le regard naturel, spontané que nous pouvons porter sur nos frères pour les regarder d’abord en Jésus qui est notre Vie. Avoir foi en Notre Seigneur nous donne la faculté de poser de véritables actes de charité. C’est à ce prix que la charité coule de source. Sinon nous vivons facilement au gré de nos humeurs. Et l’on s’en va nous détournant d’un frère en disant : “Oh ! Aujourd’hui, il a ses humeurs !“, oubliant, bien sûr, que ce frère fait la même réflexion à notre propos !

Et St Jean de préciser : c’est en gardant les  commandements du Seigneur - surtout celui de la charité exercé dans la foi -  que Dieu demeure en nous. Et nous savons que Dieu demeure en nous “puisqu’il nous a donné son Esprit !“.

Encore faut-il faire bien attention à la maïeutique, à la dialectique de St Jean :
- Dire que je demeure en Dieu et Dieu en moi, parce que je tends, avec foi, à aimer mes frères, cela peut être légitime du fait que je peux constater mes actes de charité qui sont de l’ordre du concret, du palpable, du visible…
- Mais dire : parce que j’ai reçu le Saint-Esprit, Dieu demeure en moi, et moi en Dieu, ce peut être, simplement, de la présomption du fait que le Saint-Esprit, je ne le vois pas !

Aussi, St Jean précise ensuite ce que fait l’Esprit Saint en nous de façon que je puisse facilement le reconnaître !

- Il précise d’abord de façon négative : Ne croyez pas n’importe quel esprit ; ne vous fiez pas à tout esprit, c’est-à-dire à toute inspiration. Car il y a, de par le monde, beaucoup d’inspirés, beaucoup de prophètes : ceux de la race (comme Hitler), ceux de la classe sociale (comme Marx), ceux de l’honneur militaire (comme de Gaulle), ceux de l’art (comme Picasso)… et que sais-je encore…, ceux de la mystique aussi (ils sont plus nombreux qu’on ne le pense, ceux-là !). Aussi, l’important, c’est d’éprouver les inspirations, savoir qui nous inspire…, savoir ce qui vient du monde - pour mieux le renier - et ce qui vient de l’Esprit !

- C’est pourquoi St Jean précise de façon positive : “Tout inspiré qui proclame que Jésus Christ est venu parmi nous dans la chair, celui-là appartient à Dieu !“. - Jésus Christ parmi nous, dans la chair ! Une expression qui veut certainement combattre les courants du gnosticisme du temps de St Jean. Bien sûr ! Mais c’est une phrase qui vaut pour tous les temps. Autrement dit, le discernement véritable est celui-ci : est-ce que j’incarne véritablement le don de Dieu dans ma vie ? Est-ce que je suis fidèle à la logique de l’Incarnation ?

Certes, je crois que le Verbe s’est fait chair, qu’il est né à Bethléem, de la Vierge Marie, qu’il est mort sur une croix  “pour la multitude des hommes“. Cela, c’est ma foi théorique. Est-ce que cette foi s’incarne dans ma vie. Voilà le critère de discernement pour pouvoir affirmer : “Parce que l’Esprit m’a été donné…“.

L’Esprit me poussera toujours à “incarner“ au maximum le don de Dieu dans ma vie. L’Esprit ne nous poussera jamais à une sorte d’évasion, de désincarnation, à une spiritualisation de moi-même qui ne peut être que fausse. L’Esprit nous pousse à assumer le plus pleinement possible tous mes actes dans ma condition charnelle.

Dès lors, on ne peut pas souscrire à ce que certains nous disent : Oh ! Vous les religieux, les religieuses, vous êtes dans le spirituel… Nous, nous sommes obligés d’être dans le charnel ! Quelle fausseté ! : tous, nous y sommes jusqu’au cou, dans le charnel ; car nous avons un corps, et un corps non encore spiritualisé. Cela arrivera, à l’exemple du Christ pascal, au jour de notre éternité !

Mais St Jean nous console : “Celui qui est en vous est plus grand, c’est-à-dire plus fort, que celui qui est dans le monde“ : le prince de ce monde. C’est une affirmation catégorique : Satan est extérieur à nous ; il ne peut être véritablement en nous. Seul, Dieu peut nous habiter, dit St Jean. Vous les avez vaincus les “anti-Christs“ parce que vous vous êtes laissés pénétrés par l’Esprit-Saint !

Et puis, dernière remarque : dans son raisonnement, St Jean discerne : il y a “vous“, il y a “eux“, il y a “nous“ ! Et ce “nous“, ce sont les Apôtres, le corps épiscopal. Voilà certainement un deuxième critère de discernement.
Le premier, c’est la foi, l’incarnation de la vie de foi, la présence de l’Esprit Saint en tous nos actes.
Le second, c’est écouter l’autorité de l’Eglise, entrer volontiers, librement dans ce que demande l’autorité de l’Eglise, non par une obéissance mécanique, rituelle, mais par une obéissance spirituelle. Et cela pose bien des problèmes, surtout à certaines époques !
Mais pour celui qui accepte cette obéissance dans la foi, c’est toujours fécond et pour l’Eglise et pour lui-même. 
Certes, l’autorité rendra compte de ses décisions. Et il sera demandé davantage à ceux qui ont reçu davantage. Mais pour chacun, nous rendrons compte de notre obéissance profonde, joyeuse, spontanée, même si quelques fois c’est difficile.

Aucun commentaire: