samedi 29 septembre 2018

Eglise et "Eglise" !


26e Dimanche du T.O.18.

Quel est celui d'entre nous qui n'a pas été témoin un jour ou l'autre du dévouement, de la générosité, ou de l'esprit de sacrifice d'un homme (ou d'une femme) complètement indifférent ou étranger à la foi chrétienne ?
             
Trois manières de réagir sont alors possibles.
             
La première, réaction de rejet, de méfiance, peut-être aussi de jalousie : "Cet homme n'est pas chrétien ; s'il agit ainsi, c'est par intérêt ; ou bien, il fait semblant, ce n'est qu'un hypocrite !".  C'est un peu la réaction de l'apôtre Jean dans l'évangile de ce jour.
             
Deuxième réaction possible : étonnement, émerveillement : "Cet homme est chrétien sans le savoir ! C'est un chrétien qui s'ignore !". Non ! Cet homme n'est pas chrétien sans le savoir, car un chrétien, c'est celui qui a fait connaissance avec le Christ et qui croit en lui ; on ne peut pas être chrétien sans le savoir, c'est contradictoire dans les termes.
             
Mais la troisième réaction est celle que nous suggère Jésus : réaction d'heureuse surprise et d'accueil : "Celui qui n'est pas contre nous est pour nous !". Voilà un homme qui se laisse animer par l'Esprit de Dieu, par l'Esprit d'amour qui remplit l'univers.

Nous avons toujours tendance, nous les chrétiens, et même les chrétiens pratiquants, à croire que nous avons le monopole du bien et du vrai, que nous sommes plus ou moins propriétaires du vrai Dieu, et qu'il faut être chrétien pour profiter des grâces divines, comme si Dieu ne s'intéressait qu'à ses fidèles. C'est la réaction d'un "cléricalisme" que dénonce le pape François.

Mais non ! Dieu est au travail dans le monde entier. "Mon Père travaille toujours, et moi aussi je travaille" (Jn 5.17), disait N.S.  Dieu sème ses dons, sa lumière, son amour, dans le cœur de tous les hommes de bonne volonté. Il pousse tous les hommes quels qu'ils soient à mieux fraterniser, à se réconcilier et à mieux s'aimer.
Car le projet de Dieu, c'est l'union de tous les hommes en lui, c'est de réaliser la communication universelle des hommes, le rassemblement de tous les hommes en une seule immense famille, la famille des enfants de Dieu. C'est à cela que l'Église visible doit travailler.

Mais au-delà de cette Église visible (nous baptisés, prêtres, évêques, pape), il y a comme une Église invisible : peuple de tous ceux qui se laissent animer par l'Esprit de Dieu, peuple sans frontières, peuple répandu dans toutes les races, peuple immense de tous ceux qui s'efforcent de vivre dans l'amour de Dieu, dans l'amour et le respect des autres, dans un esprit de dévouement et de service.

L'Esprit de Dieu a des disciples partout ! C'est ce que nous suggérait déjà la première lecture de ce jour. Deux hommes, bien qu'ils ne soient pas venus à la tente de la réunion, furent remplis de l'Esprit de Dieu ! Et Moise de s'écrier : "Ah ! Si le Seigneur pouvait mettre son Esprit sur eux, pour faire de tout son peuple un peuple de prophètes !"
Et de même, dans le livre des Actes des Apôtres, il y a un récit où l'on voit l'apôtre Pierre s'écrier tout émerveillé : "Même les païens ont reçu l'Esprit Saint !".

Chez tous ceux qui veulent bien écouter "avec un cœur noble et généreux", dit St Luc (Lc 8.15) - littéralement, "avec un cœur bel et bon", deux qualificatifs qui, pour un Grec, désignent l'homme de qualité -, Dieu suscite chez eux ces milliards de petits ou grands gestes d'amour qui se font chaque jour dans le monde entier et qui tendent à l'union à Dieu, qui tendent à rapprocher les hommes entre eux, à les unir en Dieu finalement. Le monde baigne dans cette action invisible de Dieu. "L'Esprit de Dieu souffle où il veut !", disait Jésus à Nicodème (Cf Jn 3.8)).

Oh non ! Nous les chrétiens, nous n'avons pas le monopole de l'amour de Dieu et des autres, le monopole du bien, de la justice, de la défense des droits de l'homme, de la solidarité... Beaucoup de non-chrétiens travaillent et agissent dans le même sens, sous la poussée de la grâce.

Bien sûr, comme en nous-mêmes, il y a, chez eux aussi, de l'ivraie mélangée au bon grain. Car partout, les forces du mal et du mensonge s'opposent aux forces de l'amour et de la vie.

Alors, nous les chrétiens qui croyons au Christ, nous Eglise visible du Seigneur, quel est notre rôle ?
             
Notre rôle, c'est d'abord de témoigner de ce vrai Dieu qui ne s'intéresse pas qu'à ses fideles, mais qui aime tous les hommes sans exception, quelles que soient leur langue, leur race, et qui les attire tous à lui.  "Quand j'aurai été élevé de terre, j'attirerai à moi tous les hommes",  a dit Jésus (Jn 12.32).
             
Naguère, je disais facilement aux enfants du catéchisme que l'Eglise est comme un immense iceberg. Or, ce que l'on voit d'un iceberg ne constitue que le dixième de l'ensemble. Les neuf-dixième sont invisibles, sous l'eau. Mais s'il n'y avait pas le premier dixième, l'Eglise visible, nous n'aurions pas le témoignage de cet amour de Dieu qui veut rassembler en lui tous les hommes de bonne volonté !
             
Ainsi, chacun de nous rassemblés en Eglise visible, L'Esprit de Dieu nous pousse à dire à ceux qui nous entourent :  "Vous aussi, Dieu vous connaît, Dieu vous aime, et chaque fois que vous vous laissez animer par l'amour désintéressé des autres, vous êtes tout proches de lui".  "Dieu est Amour" aimait à répéter St Jean. Aussi, "Là où est l'Amour, Là est Dieu !".

Notons-le bien : s'il n'est pas question d'imposer aux autres notre foi, nous n'avons pas, non plus, à avoir peur d'en témoigner. Pourquoi seules les voix de la violence, de la haine ou du mensonge auraient-elles le droit de se faire entendre ? Nous n'avons pas à rougir de notre foi, mais à en témoigner joyeusement, car elle va dans le sens de la vraie réussite de nos vies et de la vie du monde.

Et n'oublions pas que notre témoignage de foi, pour être efficace, doit se faire par notre manière de vivre autant que par nos paroles. Si notre style de vie contredisait nos paroles, comment pourrions-nous être crédibles ?

C'est l'enseignement de la seconde partie de l'évangile de ce jour : Si ta main..., ou ton pied..., ou ton œil t'entraîne au mal..., alors, n'hésite pas, coupe, arrache...

Le cœur de Dieu est sans frontières et ouvert à tous. Et, nous-mêmes, chrétiens, avons-nous un cœur assez, accueillant, ouvert, compréhensif... ?

Aucun commentaire: