Avant la
célébration de l'Eucharistie :
Au seuil de cette
Eucharistie, avec tous nos frères chrétiens, avec tous nos compatriotes, nous
pensons aux victimes du 14 juillet à Nice, aux blessés de cet affreux attentat,
aux membres de leurs familles, à leurs amis....
Nous prions pour
eux tous.
Inutile, en cette horrible
circonstance et à notre niveau, de surenchérir à des suspicions, accusations rapides,
à des sentiments de colère, de haine...
Il nous suffit, par
notre prière, de manifester notre pleine solidarité en Dieu, notre pleine
solidarité humaine, fraternelle.
Et en recevant sur
nous l'eau que je vais bénir et qui rappelle celle de notre baptême,
reconnaissons simplement que devant Dieu, devant nos frères, nous manquons
parfois à une meilleur communion entre nous.
16ème Dim. Ord. 16/C
Le soleil était
haut dans le ciel ! Il tapait dur. Non loin de Sodome et Gomorrhe, sous un
chêne de Mambré, Abraham, le nomade, est assis !
Je m'en souviens
très bien : j'ai pratiquement vu, naguère, cette scène lors d’un pèlerinage en
Terre Sainte. Nous étions près de Beersheba, dans le désert. Notre pique-nique
était terminé lorsqu'un homme - un palestinien certainement - est venu, à une
centaine de mètres de notre groupe, est venu s'asseoir, jambes croisées, sous
un arbre. Ce n'était pas un chêne, mais un tamaris ; peu importe ! Et là, les
yeux clos, le buste droit, il s'était abstrait de son environnement, de notre
entourage ! Il méditait ! "C'était
l'heure la plus chaude du jour !". Dans mon souvenir, je l'appelle
Abraham. Lui aussi devait méditer ainsi, à l’heure du repos, à l’heure du calme
! Dans le désert !
Peut-être, Abraham,
était-il habité par ce grand souci : il avançait en âge ; et toujours pas
d'héritier légitime. Pourtant, il croit en Dieu qui l'a fait sortir d'Our en
Chaldée et qui lui a promis une nombreuse descendance. Mais la promesse ne se
réalise pas !
Soudain, ouvrant
les yeux, Abraham aperçoit trois hommes qui approchent sous le soleil. Il court
à leur rencontre. C'est l'accueil, un accueil empressé et même fastueux, un tel
accueil que le récit de la Bible en fait un "acte-modèle" qui fera
loi dans le peuple d'Israël, qui doit faire loi, aussi, chez nous, chrétiens !
Mais, sachons-le, l'hospitalité
est une vertu très exigeante !
1) D'abord elle
doit accepter l'inattendu, le dérangement ! Abraham était assis bien
tranquillement à l'entrée de sa tente, au plus chaud du jour, au moment de la
sieste. C'est à ce moment-là qu'on le dérange. Il n'hésite pas. il accueille !
C'est facile d'inviter quand on fixe le jour et l'heure. C'est beaucoup plus
difficile d'accueillir au moment inattendu.
2) Et puis, l'hospitalité
est empressée, généreuse. Abraham, à cette heure de midi, de repos, met
toute sa maison debout, active tous ses gens pour la préparation d'un somptueux
repas ! ...
3) Surtout, l'hospitalité
doit venir du cœur. Il est dit dans la Bible : "Vous aimerez l'étranger !" - "Vous aimerez l'étranger,
car vous-mêmes, vous avez été étrangers, dans le pays d’Egypte" (Deut 10/18).
Et cet "amour"
envers l'étranger s'accompagne de mille délicatesses : eau versée sur les
pieds, huile parfumée versée sur la tête, baiser de paix..., gestes que Simon
le pharisien n'a pas faits - nous l'avons vu dans un évangile récent ! - et
auxquels la femme pécheresse supplée avec humilité et amour !
4) Enfin, l'hospitalité
invite à la table, c'est à dire elle accueille l'hôte comme une personne
respectée et digne d'amitié. La table signifie le partage du pain et des
pensées. Le pain du corps et le dialogue du cœur donnés en partage. L'hospitalité
va jusque là !
Oui, l'hospitalité
est une grande vertu ! Et, en temps de vacances, il est bon de s’en souvenir !
C'est ainsi que l'on peut faire la rencontre de Dieu lui-même ! D’ailleurs, Jésus
nous a dit : “j'ai eu faim, j'étais nu,
prisonnier..., et vous m'avez donné à manger, m'avez vêtu, visité...”.
Et le texte même de
la Genèse signifie ce mystère de l’accueil, par l’homme, d'un Dieu qui se
fait de plus en plus proche de nous !
Ainsi, dans les
trois hommes qui apparaissent à Abraham et que celui-ci interpelle curieusement
au singulier ("Seigneur",
leur dit-il à tous les trois !), la tradition chrétienne, dont l’icône de
Roublev en est le plus bel exemple, s'est plu à reconnaître une annonce du mystère
de la Trinité. Dieu vient rallumer dans la conscience d'Abraham quelque peu
découragé, la certitude de la proximité divine, de sa présence active au milieu
des hommes. Il est déjà perçu dans le mystère de son Unité et dans la richesse
de sa Trinité !
Aussi, la lettre
aux Hébreux, développant une catéchèse inspirée de ce texte de la Genèse, fera
cette recommandation : "Persévérez
dans l'amour fraternel ! N'oubliez pas l'hospitalité ; car c'est grâce à elle
que quelques uns, à leur insu, hébergèrent des anges", c'est à dire,
dans le langage biblique, Dieu lui-même !
Et si nous
rapprochons ces textes de l'évangile d'aujourd'hui, nous constatons que les
deux sœurs, Marthe et Marie, si différentes pourtant l'une de l'autre, mais
parce que l'une et l'autres hospitalières, ont ouvert leur maison à un hôte de
passage. Or, cet hôte de passage est le "Seigneur", dit le texte.
N'oubliez donc pas
l'hospitalité, pourrait-on dire encore aux chrétiens d'aujourd'hui ; c'est
grâce à elle que certains, telles les deux sœurs Marthe et Marie, hébergèrent
le Seigneur !
Mais accueillir le
Christ dans sa vie, c'est - et voilà pourquoi l'hospitalité est si difficile -,
c'est, nous dit St Paul, à la fois terrible et sublime.
- terrible
parce que c'est introduire chez soi un crucifié, et un crucifié qui entend rester
"en agonie jusqu'à la fin du monde",
comme disait Pascal !
- sublime,
car - et c'est la découverte de Paul -, car, disait-il, "je trouve maintenant ma joie dans les
souffrances que j'endure" - Pourquoi ? "Parce que - moi qui fait partie du Corps du Christ, mort et
ressuscité - j'achève en mon propre corps
ce qui manque à la Passion du Christ", (pour la rédemption - actuelle
- de tous les hommes !) pour la rédemption actuelle - des membres de ce
Corps du Christ (et du mien d'abord !). N'est-ce pas exaltant de savoir, comme
dit encore St Paul, que "nous
portons dans notre corps l'agonie de Jésus afin que la vie de Jésus soit, elle
aussi, manifestée dans notre corps... Aussi, ajoute-t-il, la mort est à l’œuvre en nous, mais la vie
en vous !" (2
Cor 4/10).
Oui, accueillir le
Christ sera toujours l'accueillir dans son mystère pascal de "mort et
de vie" ; ce sera toujours "achever
l'annonce de la Parole de Dieu afin de rendre chacun parfait dans le
Christ".
Alors, "n'oubliez donc pas l'hospitalité! !".
Et St Paul ramasse dans une formule extraordinaire la théologie de
l'évangélisation : "Le Christ est au
milieu de vous l'espérance de la gloire". Paul est celui qui
contemple, détecte, révèle, développe la présence du Christ toujours mourant
et ressuscitant au cœur du monde et des hommes.
Alors, n'oubliez
donc pas l'hospitalité ! Oui, pratiquez l'hospitalité comme Marthe et Marie.
Pour ne pas être trop long, je vous laisserais méditer cette page merveilleuse
de l'évangile.
A propos de
"l'Unique nécessaire", on a beaucoup parlé d'activité et de
contemplation, quelquefois en les séparant, voire en les opposant.
En réalité, c'est
Jésus seul qui est au centre de cette scène d'hospitalité. C’est lui qui
unit les deux sœurs, Marthe et Marie. Et à toutes les deux, il dit : "une seule chose est nécessaire".
Un humoriste a traduit : "un seul
plat est nécessaire" : l'écoute de la Parole de Dieu. Autrement dit,
toute l'activité chrétienne doit provenir de l'écoute du Seigneur. La part de
Marthe - l'activité de service - doit s'inspirer de ce "nécessaire",
de cette écoute de Dieu qui seule rend le service valable. Le meilleur dans
notre activité de chrétien est la part d’écoute du Seigneur, d'intimité
avec le Christ qui doit rejaillir ensuite sur nos paroles et sur nos mains !
Vous le savez, St
Luc est dénommé : l'évangéliste de la femme. Et, comme modèle d'hospitalité
envers le Seigneur, il a choisi deux femmes ! Veut-il nous dire que Jésus
désire que la femme soit, par son accueil, par son hospitalité (la
maternité n'est-elle pas l'hospitalité par excellence ?), comme un pivot
d'équilibre spirituel dans la famille, dans la société, comme une source
d'équilibre matériel et spirituel ? Je laisse à d'autres - les femmes - le soin
de répondre à cette interrogation !
En tous les cas, "n'oubliez pas l'hospitalité. Car c'est
grâce à elle que quelques-uns, à leur insu, hébergèrent Dieu lui-même" !
Et aujourd'hui
particulièrement, accueillons en notre prières toutes les victimes innocentes
de par le monde. Elles rappellent la mort innocente du Christ. Mais cette mort fut cause de vie.
Restons dans cette espérance !
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