8 Septembre : Nativité de la Vierge
Marie (Michée 5.1’4 ; Mth 1.1-23)
La
lecture du prophète Michée nous emmène directement à Bethléem : “Toi, Bethléem Ephrata, le plus petit clan
de Juda, c’est de toi que je ferai sortir celui qui doit gouverner Israël“.
-
Bethléem, c’est la ville de David, parce qu’il y est né !
-
Jérusalem, c’est la ville du roi David qui a choisi Sion, cette toute petite
montagne, pour que Dieu vienne “y faire
habiter son Nom“ !
- Jérusalem,
c’est la ville des accomplissements éclatants…
- Bethléem,
c’est la ville des origines obscures.
Entre
l’époque de David et la naissance du Messie, à la plénitude des temps, un grand
silence plane sur cette bourgade de Bethléem. Il n’est rompu, dans l’Ancien
Testament, que par deux textes : le livre de Ruth, - Ruth qui est nommée
paradoxalement, elle la Moabite, dans la généalogie du Christ selon St Matthieu
; et ce texte de Michée que la liturgie invite à méditer en ce jour.
“Après un temps de délaissement, dit Michée, viendra un jour où enfantera celle qui doit
enfanter“. St Luc fait allusion à ce verset dans le récit de la nativité de
Jésus : “Or il advint, comme ils (Joseph et Marie) étaient là, que les jours où elle (Marie) devait enfanter furent accomplis“ (2.6). L’évangéliste a
bien compris que ce verset de Michée avait une valeur prophétique non seulement
comme annonce de la naissance du Messie, successeur de David, nouveau roi en
Israël, mais relativement aussi à celle que Dieu avait prédestinée de toute
éternité à être sa mère et dont nous célébrons aujourd’hui la naissance.
Comme elle était à Bethléem... où elle devait enfanter ...
Bethléem,
lieu caché des origines du Messie…
Et
le lieu de la naissance de sa mère est encore plus obscure tant les grandes
œuvres de Dieu ne se déchiffrent que peu à peu tout au long de l’existence. Le
Seigneur choisit également chacun d’entre nous pour une mission ; et nous
partons, comme Abraham, comme tant d’autres, comme la Vierge Marie, “sans savoir où nous allons“ pour
accomplir une œuvre que nous avons à déchiffrer jour après jour.
Oui,
le lieu de naissance de La Vierge Marie reste bien obscur. Au temps des
croisades, on avait cru découvrir ce lieu en la ville de Sepphoris, naguère
capitale secondaire d’Israël, en basse Galilée, à quelques kilomètres au nord
de Nazareth. Et l’on y voit aujourd’hui encore les restes d’une basilique bâtie
à cette époque en l’honneur de Sts Anne et Joachim.
D’autres
livres, apocryphes, très exploités par l’iconographie traditionnelle localisent
la maison de la naissance de Marie à proximité du temple de Jérusalem.
Et l’Eglise vénère toujours cette tradition tant occidentale
qu’orientale ; cette tradition nous a valu une des plus belles réussites
architecturales chrétiennes en la ville sainte : l’église Sainte Anne
près de l’emplacement du temple.
Historiquement,
rien n’est sûr, évidemment. Cette tradition est un bel exemple des
transpositions que l’on a souvent fait des certitudes théologiques les plus
belles en des lieux et espaces qui viennent les conforter. Marie, dans cette
hypothèse, serait née près du temple parce que n’est-elle pas, Marie, le
nouveau temple du Seigneur, la nouvelle arche de Dieu, la demeure de Dieu
au sens plénier, demeure qui n’est pas faite “de mains d’homme“ (cf. Mc 14.58) et que la présence divine envahit à la
plénitude des temps ? “Quand vint la
plénitude des temps, Dieu envoya son Fils, né d’une femme“ (Gal 4.4).
L’évangile
de ce jour, lui, nous invite à concentrer notre attention, à l’école de
Matthieu, ce “bon scribe qui tire de son
trésor du neuf et de l’ancien“ (Mth. 13.52), sur le texte qui fait charnière
entre l’Ancien et le Nouveau Testament, cette généalogie de Jésus qui résume
toute l’Histoire sainte en la faisant converger vers ce verset : “Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, en
laquelle fut engendré Jésus que l’on appelle le Messie“.
Cette
généalogie se termine à Joseph. Mais Matthieu, à propos de Marie, se souvenant
du mystère de la “Demeure“ de Dieu au milieu de son peuple, élargit
aussitôt la perspective en dépassant les continuités dynastiques de l’Ancien
Testament : “La Vierge concevra et
mettra au monde un fils auquel on donnera le nom d’Emmanuel qui se
traduit : ’Dieu avec nous !’“. Marie est bien le temple
de Dieu ! La Demeure de Dieu ! En cela, Matthieu rejoint Luc qui,
lui aussi, se réfère au thème si riche de signification, ce thème de la
“Demeure“ : “La puissance du
Très-Haut te couvrira de son ombre ; et celui qui naîtra de toi
sera appelé Saint et Fils de Dieu !“ (Lc 1.35). C’est, dans
l’exode, le langage de la Gloire divine qui remplit la “Demeure“ quand sa
construction est achevée : “La
nuée couvrit la tente du rendez-vous ; et la gloire de Dieu emplit la
demeure“ (Ex
40.30),
texte qui sera repris par Salomon lors de l’inauguration du temple de
Jérusalem : “La nuée remplit le
temple de Dieu… La gloire de Dieu remplissait le temple !“.
Finalement,
en cette fête de la nativité de Marie, la liturgie nous invite à méditer sur la
prédestination éternelle de celle qui devait être la “Théotokos“, la “Mère de
Dieu“ !
La
Vierge Marie, déclarée bien plus tard Immaculée, est la première personne
humaine parvenue au terme de la destinée de tout homme : être demeure
de Dieu ! Et si ce dessein de Dieu n’est pas encore accompli en chacun
de nous, en toute l’humanité, il existe déjà, à l’état de projet, dans la pensée
de Dieu et signifié dans la Vierge Marie : la naissance terrestre de la
Vierge Marie est immédiatement déjà sa naissance céleste ; et elle annonce
la nôtre.
En
Marie, Dieu signifie ce qu’il veut accomplir pour chacun de nous, et ce qu’il
accomplira : “ce qui est dernier
dans l’ordre de l’exécution est premier dans l’ordre de l’intention“, dit
l'adage philosophique. Et cette intention est annoncée en Marie : être
“demeure de Dieu“ !
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