Fête de Ste Jeanne d'Arc
Aujourd'hui, nous fêtons Sr
Marie-Jeanne-d'Arc ; et, en lui offrant tous nos vœux, nous prions sa sainte
patronne de la protéger, de lui donner sa grande foi, sa grande patience...
Un grand romancier catholique a
beaucoup - et très profondément - médité sur la sainteté de Jeanne d'Arc :
Georges Bernanos. Il a écrit un petit essai intitulé : "Jeanne,
relapse et sainte".
Il affirme nettement que la sainteté
de Jeanne d'Arc n'est pas d'abord une sainteté de faits d'armes ! Heureusement
!
La couleur dominante de sa sainteté,
c'est l'endurance de la patience pour le nom du Christ, devant le tribunal.
C'est d'autant plus à remarquer que
ce tribunal était un tribunal d'Église ! Et Bernanos de souligner que
l'inquisition était alors un tribunal absolument redoutable qui employait des
moyens capables presque de dissoudre la personnalité humaine. Et d'ajouter : une
des plus grandes souffrances de Jeanne d'Arc est qu'à la fin de son procès, on
avait fini par la faire douter d'elle-même, de ce qu'elle était et de sa
mission. On le sait, c'est parfois le lot de très grands saints, tels Thérèse
de Lisieux, Mère Térésa... et bien d'autres...
Bernanos
écrivait : "C'est désormais à elle-même que la petite martyre fait
face, et elle ne s'en doute pas. Ses juges ne s'en doutent pas davantage.
Comme ces insectes
qui au cœur de leur proie vivante déposent un ver, ils ont fait rentrer le
doute dans cette âme d'enfant, et l'ignoble fruit venu à terme, ils ne
reconnaissent plus leur victime, la cherchent, implorent d'elle ce que, par
leur faute, elle n'est plus capable de donner, une parole pure, intacte, qui
leur apporterait la certitude ou le pardon.
Littéralement, ils
lui ont volé son âme. Deux jours encore, avec une impatience grandissante,
ils secoueront vainement ce cadavre, puis las de cette lutte ridicule, ils
jetteront au feu le jouet brisé. Qu'on brûle bien les os ! Qu'on sème au vent
la cendre ! A quoi bon ? L'enfant inconnue a emporté son secret. La nuit
qu'ils ont appelée sur elle les recouvre à leur tour."
Oui, la grande épreuve de Jeanne d'Arc
a été précisément qu'au moment où on en était arrivé, comme le dit Bernanos, "à
lui voler son âme", elle ait pu tenir dans la constance et dans le
témoignage de sa fidélité jusqu'à la mort.
Mais il y a une différence
fondamentale entre les tribunaux d'Inquisition et les tribunaux modernes. C'est
que, précisément, dans les tribunaux d'Inquisition, la sainteté finit
toujours par triompher. Et, en réalité, la réhabilitation de Jeanne d'Arc,
c'est, à l'intérieur même de l'Église et sur l'initiative de l'Église, la
remise en cause de ceux qui avaient jugé Jeanne d'Arc. Dans certaines sociétés
modernes, ce genre de choses ne peut malheureusement se produire.
Et c'est pourquoi Bernanos conclut par
cet éloge de l'Église à travers la sainteté de Jeanne d'Arc, éloge qui est une
très belle page de notre littérature contemporaine et qui peut nous aider à
comprendre le sens profond de la sainteté de Jeanne d'Arc.
Il n'y a
maintenant, dit-il, qu'un seul procès à retenir, celui qui proclame : "désormais
Jeanne est sainte, et nous la prions comme telle. Si l'on mesure à l'aune de
l'expérience humaine une telle aventure, elle apparaît invraisemblable. La
chance de la pauvre fille était si petite, l'affaire si obscure et les intérêts
en jeu si puissants. Mais Dieu sait venger ses saints."
Et en son
grand style souvent provocateur, provocateur de foi,, Bernanos poursuivait :
"Notre Église
est l'Église des saints.
Nous respectons les
services d'intendance, la prévôté, les majors et les cartographes, mais notre
cœur est avec les gens de l'avant, notre cœur est avec ceux qui se font tuer.
Nul d'entre nous
portant sa charge, patrie, métier, famille, avec nos pauvres visages creusés
par l'angoisse, nos mains dures, l'énorme ennui de la vie quotidienne, du pain
de chaque jour à défendre et l'honneur de nos maisons, nul d'entre nous n'aura
jamais assez de théologie pour devenir seulement chanoine. Mais nous en savons
assez pour devenir des saints !
Que d'autres
administrent en paix le royaume de Dieu ! Nous avons déjà trop à faire
d'arracher chaque heure du jour, une par une, à grand-peine, chaque heure de
l'interminable jour, jusqu'à l'heure attendue, l'heure unique où Dieu daignera
souffler sur sa créature exténuée". Il soufflera de son souffle de vie divine et éternelle !
"O mort, où est
ta victoire ?", demandait
St Paul. Nous sommes tous des destinés à la Vie de Dieu dès maintenant et
éternellement. Tel fut le témoignage suprême de Jeanne d'Arc ! Imitons la
constance de sa patience !
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