Toussaint 18
Dans une ancienne tradition biblique
du livre de Tobit, le fils de ce grand croyant dit à Sara, sa fiancée : "Sara, lève-toi et prions Dieu avant de
nous unir par le mariage", car dit-il "nous sommes les enfants des saints ; et nous ne pouvons
pas nous unir comme on le fait dans les nations qui ne connaissent pas Dieu
!". (Tob
8.4sv selon trad Crampion)
"Nous
sommes les enfants des Saints" ! C'est un peu ce que l'Eglise nous
dit aujourd'hui !
Elle nous invite à nous souvenir de "ceux qui nous ont précédés marqués du
signe de la foi et qui dorment dans la paix" !
Elle nous invite à nous souvenir que
c'est d'eux - parents, ancêtres - que nous avons reçu et la vie et aussi la
foi.
Elle nous invite à reconnaître en
eux des fragments de la sainteté que l'Esprit Saint suscite dans l'humanité
tout au long des siècles.
Nous sommes invités à contempler la trame de sainteté divine dans tout le tissu de notre humanité !
"Nous sommes les enfants des
Saints" !
Car la
sainteté que nous fêtons aujourd'hui n'est pas seulement cette sainteté si légitimement
reconnue en ceux qui furent les grands serviteurs de l'Eglise, en ceux dont
l'action et l'enseignement ont changé la face de l’Eglise et celle du monde
lui-même.
Nous
célébrons également la sainteté au quotidien, la sainteté tout
ordinaire.
En
célébrant cette fête de tous les saints, connus ou inconnus, l'Eglise nous
invite à nous souvenir - si je puis dire - de la première "cérémonie de
béatification" qui ait eu lieu : celle que Jésus lui-même célèbre dans
ce sermon sur la montagne où il nous donne la liste des bienheureux :
"Bienheureux les pauvres,
Bienheureux
les assoiffés de justice,
Bienheureux
les artisans de paix,
Bienheureux
ceux qui pardonnent... ".
Bienheureux, saints sont-ils, tous
ceux-là !
Il est vrai que dans la pratique,
les chrétiens ont eu du mal à entendre ce message de Jésus. Tout au long des
siècles, ils ont eu tendance à ranger dans la catégorie des saints et des
bienheureux
d'abord les seuls martyrs,
ensuite seulement les évêques et les
moines, puis les religieuses.
Ce n'est que relativement tard que
l'on s'est avisé que la sainteté fleurissait également dans la vie courante
des gens ordinaires autant que dans les couvents et les cathédrales.
Certes,
Jésus
considère comme bienheureux
tous ceux qui furent des champions
de la foi,
mais également ceux qui, dans leur
vie tout ordinaire, ont répondu à l'appel de Dieu : "Soyez saints comme moi, le seigneur votre Dieu, je suis Saint
!" (Lev
19.2),
ceux qui se sont battus pour la
justice et ont eu à en souffrir,
ceux qui ont travaillé à réconcilier
des ennemis,
ceux qui ont eu un cœur droit,
ceux qui ont su utiliser leur argent
pour le bien commun sans avarice ni accaparement...
Voilà ceux que Jésus proclame
bienheureux, saints !
Cette fête montre que les chrétiens
n'ont rien de spécial à faire. Leur terrain d'action est le même que celui des
autres hommes. C'est le "tous
terrains" de la vie
quotidienne, le terrain de la vie familiale, du travail, des affaires, de
l'engagement politique, social, associatif... etc...
Certes, Jésus nous enseigne, en
insistant fortement, que la pratique de la prière, la méditation de la Parole
de Dieu, de l'Evangile, la fréquentation des sacrements sont les moyens
extraordinaires pour que nous parvenions à réaliser, dans la vie de tout le
monde, la volonté de Dieu, notre Père, qui est notre sanctification et celle du
monde.
Cependant - sachons-le - d'autres,
qui ne sont pas nécessairement des “piliers de cathédrales”, parviennent à
réaliser cette volonté du Père : Bienheureux les pauvres, les cœurs purs
et droits, les pacifiques, les doux … La
puissance de la grâce de Dieu dépasse le cadre étroit de nos églises visibles ;
elle est catholique, universelle.
Bien plus, nous croyons que l'Esprit
Saint est assez puissant pour susciter la perfection même parmi ceux qui ne
professent pas la foi chrétienne, n'ayant pas eu, comme nous, l'occasion ou
plutôt la grrâce de connaître le Christ ! Ce fut la première expérience de
l'apôtre Pierre lui-même appelé à se rendre chez le Centurion Corneille à
Césarée, tout au début de la vie de l'Eglise !
Aussi, rendons grâce à Dieu pour la grâce
particulière que nous avons eu de recevoir l'Evangile et de bénéficier de
l'aide de nos frères, de nos ancêtres chrétiens pour avancer vers la
réalisation de cette volonté du Père des cieux que Jésus nous révèle, notre
sanctification : "Nous sommes les
enfants des Saints" !, disait le jeune Tobie !
Ainsi donc, en ce jour de la fête de
tous ces saints anonymes, venus de tous les horizons, qui nous ont tant aidés à
connaître le Christ, célébrons avec grande foi l'Eucharistie en laquelle
certains ont puisé les forces immenses dont ils avaient besoin pour vivre
authentiquement leur vie chrétienne d'hommes et de femmes, de jeunes ou
d'enfants. L’Eucharistie est une force de sainteté que trop souvent nous
ignorons ou délaissons trop facilement.
En partageant le pain que Dieu nous
donne, nous aurons la force de poursuivre notre route et d'aider nos frères,
chrétiens ou non, à poursuivre la leur. Notre idéal est de transformer ce monde
pour en faire le Royaume de Dieu, un Royaume de paix, de justice et d'amour, un
Royaume en lequel circule déjà la vie divine, une vie de sainteté, celle de
Dieu.. "Soyez saints comme moi, le
seigneur votre Dieu, je suis Saint !" En écoutant la Parole de Dieu,
nous trouverons une lumière supplémentaire pour vivre autrement ce que tout
le monde vit tous les jours.
Oui, chaque fois que nous célébrons
ce mémorial de la mort et de la résurrection du Seigneur, pour que nous
sachions accueillir la Vie de Dieu en notre existence, nous proclamons
activement notre attente du jour où il viendra inaugurer son Royaume,
c'est-à-dire éclairer pleinement notre existence de sa sainteté.
Puissions-nous, ce jour-là,
y trouver notre place avec tous les Saints que nous fêtons aujourd'hui.
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