dimanche 18 novembre 2018

Apocalypse ? !


33e T.O.  18/B

Aucun texte, qu'il provienne d'une source biblique ou de toute autre origine, n'est à prendre mécaniquement, trop littéralement. Il doit être interprété à partir du milieu d'où il est sorti et de la mentalité qui en a guidé la composition. - C'est particulièrement vrai des textes qui nous sont proposés aujourd'hui. Ils appartiennent à ce genre de littérature très spécial que l'on appelle "apocalypses".
             
Un texte apocalyptique est toujours riche en images, très coloré et parfois marqué d'une certaine incohérence, d'autant que nous sommes toujours portés à penser trop vite que nos goûts, notre logique sont les seuls critères valables.
Selon Daniel, les "morts dorment dans la poussière", et les justes "brillent comme des étoiles".*
Et selon St Marc, "le soleil s'obscurcit, la lune perd son éclat, les étoiles tombent du ciel". Ces comparaisons appartiennent à une imagerie fantastique dont les époques difficiles se montrent toujours très friandes.
             
En effet, époques difficiles que rappelle le livre de Daniel. C'est le temps de la déportation à Babylone ou, un peu plus tard, du drame que provoque un grand persécuteur d'Israël : Antiochus Epiphane.
Epoques difficiles que celles au cours desquelles Marc, sous l'influence de Pierre, transmet le message de Notre Seigneur : agitations, drames, épreuves, bruits de guerre, persécutions troublent alors les chrétiens qui verront peu après la prise et l'anéantissement de Jérusalem en 70.
             
Et l'angoisse est d'autant plus profonde que l'appréhension d'un écroulement mondial remet la foi en question. Angoisse qui est toujours présente de nos jours où les "mass-médias" nous rapportent si vite
ce qui parfois nous fait frémir,
ce qui nous fait si terriblement craindre pour nos enfants au point que certains préfèrent, dit-on, renoncer à la joie d'un nouveau-né pour mieux le soustraire aux malheurs futurs et, affirme-t-on, inévitables.

Et les croyants de toujours se posent alors la question : suffit-il donc de quelque tyran barbare ou des aléas innombrables de l'histoire pour que soit mise en échec l'œuvre de Dieu ? Les promesses divines, l'annonce du Règne par Jésus, le salut du monde, tout cela, n'est-ce qu'un beau rêve, destiné comme on le dit,  à "mourir sur les rives inhospitalières de l'histoire" ?
             
Questions graves, questions permanentes ! Qui de nous ne les a pas senties sourdre en son cœur désemparé par un événement qui le touche, le blesse ? Les réflexions que nous rapporte le livre de Daniel ne sont-elles pas venues à nos lèvres : les amis de Dieu sont persécutés, parfois mis à mort. La justice qu'ils se sont appliquée à suivre ne leur sert à rien ; les malhonnêtes triomphent : "l'honnêteté ne paye jamais". Alors, à quoi bon ?
             
Et l'auteur nous répond : Non, la fidélité de Dieu est sans repentance ; elle ne peut être enfermée dans le bref laps de temps que les justes passent sur terre. La puissance divine est telle qu'elle ne peut être mise en échec par la mort.
Et la réflexion que nous propose l'Evangile va dans le même sens. Elle veut répondre à cette interrogation : Jésus, "était-il vraiment celui qui devait venir, ou fallait-il en attendre un autre ?" La tentation du doute est encore plus grande aujourd'hui : l'action du Christ est si peu perceptible ! Ne vaut-il pas mieux chercher ailleurs le remède à nos maux ?
             
Non, répond l'Evangéliste, à son tour ! Le Christ, le Fils de Dieu, destiné à triompher de l'histoire et des tragiques vicissitudes qu'elle impose aux hommes, viendra, reviendra rassembler ses fidèles. Si son action n'est pas encore très visible, on la saisira mieux demain. Et si demain encore, la vie s'avère indigne de l'Evangile, on n'aura que plus d'ardeur pour attendre la fin… la "fin des fins", ce moment où toutes choses seront transformées, récapitulées pleinement, totalement dans le Christ, comme aimait à le répéter St Paul.
Car tout doit être reformé dans le mystère du Christ, ce mystère de mort et de résurrection : il est passé par les humiliations de la mort pour attendre la gloire de la résurrection : destin mystérieux dont les véritables disciples prendront leur part, en "portant leur croix" après lui, pour parvenir, avec lui, à son triomphe !
             
Mais, attention, nous dit l'Evangile : il ne s'agit pas de rester fascinés par le futur qui pourrait donner occasion à une fuite enfantine vers l'avenir, à un certain refus de la réalité impossible à supporter, à une évasion dans l'imaginaire.
Le regard du croyant animé par l'authentique foi évangélique, loin de s'enfermer dans le futur, perçoit en même temps et le présent et le futur ; la seconde partie de l'évangile d'aujourd'hui, et plus encore les versets qui suivent l'exigent. Le futur est attendu dans le présent. C'est dans le présent qu'apparaissent les signes discrets d'un futur dont la date relève du seul mystère de Dieu. Ces signes réclament attention croyante, mais aussi vigilance efficace, application au travail quotidien. Il n'est de futur qu'au bout du présent. Il n'est d'avenir substantiel qu'au terme d'une actualité soigneusement organisée.
             
S'il est à craindre d'oublier le futur quand les tâches présentes sont si absorbantes, il est aussi dangereux pour notre foi que les promesses du Christ nous conduisent à oublier les tâches actuelles et quotidiennes.

Aussi, avant de proclamer notre "credo", demandons-nous si notre foi ne se porte vaguement que sur des réalités promises, futures, ou si, ne nous laissant pas abattre par les difficultés présentes, elle est bien un engagement actualisé  déjà par la présence du Christ glorieux dans tous les domaines de nos activités : familiales, sociales, professionnelles… 
Si le Christ n'est pas présent dans notre cheminement actuel avec tous nos frères, n'espérons pas le trouver au terme de notre pèlerinage terrestre.

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