Dimanche de
l'octave de Noël 15-16/C
[Au Prieuré "La Paix Notre-Dame", la fête de l'Epiphanie
est célébrée le 6 janvier]
En la nuit de Noël, nous avons contemplé l'Enfant de la crèche
!
Au jour de Noël - et aujourd'hui encore -, l'Eglise nous propose
de proclamer avec St Jean (prologue de
son évangile) que cet
Enfant est le "Verbe fait chair" !
Et nous allons proclamer en un instant notre foi : Cet Enfant "est Dieu né de Dieu, Lumière née de la
Lumière ; vrai Dieu né du vrai Dieu. Il est engendré non pas créé, de même
nature que le Père... ; pour notre salut, il descendit du ciel. Par
l'Esprit-Saint, il a pris chair de la Vierge Marie et s'est fait homme !".
Jésus ! Dieu
et homme ! Sommes-nous véritablement conscients de ce paradoxe : vrai Dieu
et vrai homme ? Cette prise de conscience est importante, sinon nous
risquerions de faire de notre foi
- soit une morale de bon aloi, satisfaisante pour hommes ou femmes
vivant sans passion et mourant sans désir - cela arrive ! -,
- soit un système intellectuel très raisonnable pour hommes ou
femmes épris d'ordre et de logique, croyant avoir les pieds sur terre et la
tête déjà dans le ciel, mais sans grand cœur - et cela arrive ! -.
Non ! Notre foi doit être d'un réalisme existentiel !
Et pourtant, en notre époque, en notre Occident surtout, les deux
vieilles hérésies du 3ème siècle semblent renaître :
- l'une affirme que Jésus, vrai Dieu, n'avait qu'une apparence
humaine !
- l'autre ne voit en Jésus qu'un homme sublime que des
hommes ont divinisé.
La première tentation, toujours actuelle, est souvent celle de personnes très pieuses.
Le Christ qu'elles adorent et prient, c'est, comme elles disent, "le Bon Dieu", un Dieu
tellement Dieu qu'il a fait semblant d'être homme.
Elles ne lui refusent pas carrément un corps comme le faisaient
les "docètes" du 3ème siècle ; mais ce corps n'est finalement qu'un
vêtement, une apparence pour le rendre plus proche de nous. Certaines
dévotions finissent toujours par s'évanouir dans cette hérésie qui nie le réalisme
de l'Incarnation et, dès lors, le réalisme du mystère pascal.
La deuxième tentation est celle des "esprits forts" ou qui se croient tels.
Ils s'inclinent devant Jésus comme devant la plus grande personnalité humaine ;
mais Jésus n'est pas Dieu ; tout au plus, il ne fut qu'une
"théophanie", une apparence divine.
Dès lors, l'union à Dieu devient impossible ; et nous ne sommes
pas appelés à vivre de la vie même de Dieu. "Dieu est mort",
affirme-t-on. Seul, l'homme subsiste. Mais il reste seul et sans espérance !
Aussi, chrétiens, nous avons la vocation de faire de toute notre
vie - et non seulement de nos paroles - une belle affirmation de "foi
sincère", dirait St Paul : "Par
l'Esprit Saint, il a pris chair de la Vierge Marie et s'est fait
homme !". Et le Fils de Dieu s'est fait fils d'homme pour que les
enfants des hommes deviennent enfants de Dieu !
"Oportet
haereses esse !", disait St
Paul. "Il est bon qu'il y ait des
hérésies !" (I Co.
11.19). Elles nous
invitent à approfondir sérieusement notre foi et surtout à mieux en vivre. Dieu
s'est fait homme pour être toujours parmi les hommes !
Même si notre époque a, en quelque sorte, paganisé Noël, sachons
affirmer par toute notre vie :
- Cet Enfant-Emmanuel, tout en étant semblable à tous les enfants
du monde, n'est en rien comparable à ces petits d'hommes. Par son incarnation
dans le temps, Dieu a pris ce qu'il n'était pas - notre humanité - et nous a donné en partage la
vie divine qui était sienne. Le croyons-nous suffisamment ?
- Sachons rappeler avec St Jean : "Le monde ne l'a pas connu... Il est venu chez les siens et les
siens ne l'ont pas reçu !". Et nous, le recevons-nous réellement ? A
travers les vagissements d'un enfant, reconnaissons-nous Dieu qui vient nous
délivrer, nous libérer, faire éclater le pauvre corset de notre humanité
afin de parvenir à la stature de Jésus, homme et Dieu ?
- Savons-nous affirmer qu'avec Jésus, le salut de l'homme prend sa
source à Noël et s'achève à Pâques. Nous ne pouvons dissocier la
crèche de la croix :
+ Noël, c'est l'espérance d'une vie nouvelle qui ne demande qu'à
s'épanouir, à trouver sa place en nous-mêmes et dans le monde !
+ La croix est bien présente en notre vie de moult et moult
manières ; elle le sera par notre mort elle-même !
Mais la lumière qui jaillit dans les ténèbres de la nuit de Noël
trouvera toute sa luminosité, sa densité en la nuit de Pâques. C'est en ce sens que Jésus -
Dieu et homme - que Jésus vainqueur du mal et de la mort, est notre "Rédempteur",
notre "Sauveur".
Si Dieu s'incarne selon la chair, c'est pour que nous ayons la
vie, et que nous l'ayons en abondance, diront les apôtres.
Il nous faut donc vivre, dès maintenant, de la vie même de Dieu. Et si nous ressentons notre
grande faiblesse, rappelons-nous que Jésus a dit : "Je suis la porte" (Jn 10.7,9), la porte
qui conduit à Dieu, le Père de toute miséricorde !
Et c'est encore notre mission de rappeler cette réalité de la
"Porte" de la vie divine qui s'ouvre, grâce au Christ. "Par Lui, avec Lui, en Lui !".
L'année jubilaire de la miséricorde nous en donne l'occasion !
Symboliquement, une "Porte sainte" a été ouverte à Rome,
en notre cathédrale et en bien des lieux de notre chrétienté !
C'est donc une année d'"indulgence" ! Même si la réalité
de ce mot a été grandement galvaudée au début du 15ème siècle, même
si elle a été discréditée - il y a peu de temps encore - par un vocabulaire
quantifié, tarifé (on parlait
de 50, 100 jours d'indulgences etc.)..., cette réalité de l'"Indulgence" demeure. Elle a été
remise à l'honneur par le Concile Vatican II et, à sa suite, par le pape Paul VI
(Constitution
apostolique "Indulgentiarum doctrina" 1967).
Pratiquer l'"indulgence", c'est faire acte de foi en Jésus
- Dieu et homme - qui veut toujours manifester la plénitude de la miséricorde
divine, qui est la "porte" qui conduit à cette miséricorde.
Le Jubilé est une invitation pressante à rencontrer Dieu, une
rencontre qui se manifeste par la réception des sacrements de Réconciliation et
d'Eucharistie, principalement.
L'année jubilaire fait retentir un double appel à la conversion
personnelle et à un véritable engagement communautaire, ecclésial, social (dans le sens d'ailleurs des
années jubilaires de la Bible). Tâche onéreuse qui ne peut s'accomplir que grâce à un échange
spirituel entre les membres du Corps du Christ afin d'être, disait naguère le
pape Jean-Paul II, "toujours plus
intimement unis au Père céleste".
Sachons donc, au cours de cette année, mieux affirmer,
personnellement et communautairement : le Fils de Dieu s'est fait fils
d'homme afin que les enfants des hommes deviennent enfants de Dieu !
Par miséricorde divine !
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