mercredi 11 novembre 2015

Un moine évangélisateur !

Saint Martin - 11 Novembre

La fête de la St Martin était, en France, très populaire jusqu'à la Révolution, et aussi dans le reste de la chrétienté occidentale.

Une pieuse légende raconte que, lorsqu'on transféra la dépouille du Saint de Candes à Tours, les buissons se mirent à refleurir à son passage le long de la Loire ! Ce miracle serait à l'origine de ce que l'on appelle "l'été de la Saint-Martin", un redoux dont nous bénéficions particulièrement cette année mais qui est, en fait, occasionné par des vents du sud-ouest qui touchent souvent la France autour du 11 novembre.

Plus historiquement, notons : c'est en référence à St Martin qu'en 1918, à l'instigation surtout du général Foch - un chrétien qui récitait tous les jours son chapelet - que les négociateurs français auraient fixé au 11 novembre la date de l'armistice. On a du mal à penser que Georges Clemenceau réputé comme libre penseur notoire au bord de l'athéisme, ait voulu faire cet honneur au Saint, de même en ce qui concerne ses collaborateurs gouvernementaux. Quoi qu'il en soit, c'est pour nous une occasion de prier pour tous ceux qui ont donné leur vie pour notre pays... !

Prions aussi pour ceux qui risquent parfois leur vie pour maintenir paix et ordre en tous lieux de France, puisque St Martin a été choisi comme Saint Patron par la Communauté chrétienne des policiers de France, le 19 Janvier 1993, et reconnu et accepté comme tel par la Conférence des évêques le 22 mars de la même année. Et - chose plus curieuse - St Martin a été noté et enregistré comme "Patron de tous les policiers de France", le mois suivant, par Charles Pasqua, ministre de l'Intérieur !

St Martin, nommé encore "Martin le Miséricordieux", est né dans l'Empire Romain, à Savaria (l’actuelle Hongrie), en 316 ou 317.

Son père était tribun militaire, officier supérieur chargé de l’administration de l’armée. Aussi, n'est-il pas étonnant qu'il attribuât à son fils le prénom de "Martin", mot qui signifie "voué à Mars", dieu de la guerre !
Ayant été muté à Pavie, Martin le suivit. Et c'est en cette ville qu'il entra en contact avec des chrétiens. Il n'avait que dix ans environ et voulait déjà se convertir au christianisme, se sentant attiré par le service du Christ.

Cependant son père, irrité de voir son fils se tourner vers une religion nouvelle, le force, dès ses 15 ans, à entrer dans l’armée. En tant que fils de vétéran, il a le immédiatement le grade de "circitor" : le "circitor" est chargé de mener les rondes de nuit et d’inspecter les postes de garde.

Affecté à Amiens en Gaule, un soir de l’hiver 338, il rencontre un pauvre, transi de froid. Sans argent, ayant déjà généreusement distribué sa solde, il tranche son manteau ou du moins la doublure de sa pelisse pour le couvrir. Il a alors 18 ans ! La nuit suivante le Christ lui apparaît en songe vêtu de cette étoffe. Le reste de son manteau, appelé "cape" sera placé plus tard, à la vénération des fidèles, dans une pièce dont le nom est à l'origine du mot "chapelle".

Selon Sulpice Sévère - un de ses biographes -, Martin sert encore deux années dans l'armée ; puis, toujours en garnison à Amiens, il se fait baptiser à Pâques 336. Notons que cette époque - appelée improprement "époque de l'invasion des Barbares" - est un temps de grande transition, la fin d’un règne et le début d’un autre règne où tous, même les soldats, sont pénétrés par les idées nouvelles. Ne vivons-nous pas, nous-mêmes, une époque analogue ? Aussi, prions St Martin avec optimisme.

Ayant pu quitter l’armée, Martin se rend à Poitiers pour rejoindre le renommé évêque Hilaire qui a le même âge que lui et appartient comme lui à l’aristocratie. Cependant l'évêque est moins tourné vers la mortification et plus intellectuel ; cependant il accueille Martin avec joie.

La Chrétienté est alors déchirée - déjà ! - par divers courants de pensée. Les chrétiens se combattent violemment et même physiquement. Il y a surtout les "ariens" qui nient que le Christ soit "Dieu fils de Dieu ", au contraire des "trinitaires" de l’Église romaine. Mais les premiers sont très influents auprès du pouvoir politique. Alors que Hilaire, un "trinitaire", tombe en disgrâce et est exilé, Martin est averti "en songe" qu’il doit rejoindre ses parents en Illyrie afin de les convertir. Il réussit à convertir sa mère mais son père, apparemment, reste étranger à sa foi.

Mais, en Illyrie, c’est la foi arienne qui domine. Et Martin, fervent représentant de la foi trinitaire, est publiquement fouetté puis expulsé. Il se réfugie à Milan ; mais là encore, les ariens dominent et Martin est à nouveau chassé. Il se retire alors avec un prêtre dans une île déserte, se consacrant au Christ, par la prière et la pénitence !

En 360, après le concile de Nicée (325), les "trinitaires" regagnent leur influence politique et Hilaire retrouve son évêché. Martin en est informé et revient lui-même à Poitiers. Agé de 44 ans, il s’installe en un domaine gallo-romain qu'Hilaire lui indique près de Poitiers. C'est en ce lieu - appelé Ligugé - que Martin crée la première communauté de moines en Gaule. Mais ce premier monastère sera aussi le lieu de l’activité d’évangélisation que St Martin va mener activement pendant dix ans.

En 371, à Tours, l’évêque Lidoire vient de mourir ; les habitants veulent choisir Martin qui n’aspire nullement, lui, à l'épiscopat. Les habitants l’enlèvent - mœurs du temps ! - et le proclament évêque le 4 juillet 371 sans son consentement ; Martin se soumet en pensant qu’il s’agit là sans aucun doute de la volonté divine. "Vox populi, Vox Dei !".

Désormais, même s’il est évêque, Martin ne modifie en rien son train de vie. Il poursuit ses mortifications et continue à porter des vêtements rustiques et rugueux. Il crée un nouvel ermitage à 3 km au nord-est des murs de la ville : c’est l’origine de Marmoutier, avec pour règle la pauvreté, la mortification et la prière. C’est une vie faite d’un courage viril et militaire que Martin impose à sa communauté.

Mais Marmoutier va devenir un centre de formation pour l’évangélisation. Martin et ses disciples vont sillonner les campagnes qui, à cette époque, sont païennes. Il prêche avec efficacité les paysans, forçant le respect par l’exemple et le refus de la violence. Il sait parler au peuple des campagnes alors que la foi chrétienne est encore essentiellement urbaine.

Au soir de sa vie, sa présence est requise pour réconcilier des clercs à Candes, à l'ouest de Tours. Malgré fatigue et vieillesse, il s'y rend. Son intervention est couronnée de succès ; mais le lendemain, épuisé par cette vie de soldat du Christ, Martin meurt le 8 novembre 397. Disputé entre Poitevins et Tourangeaux, son corps, subtilisé par ces derniers, est rapidement reconduit par le fleuve à Tours et enterré le 11 novembre.

St Martin fut toute sa vie un soldat ! Il avait certainement médité ce mot de St Paul adressé à son disciple Timothée : "Prends ta part de souffrances, en bon soldat du Christ Jésus. Dans le métier des armes, personne ne s'encombre des affaires de la vie civile, s'il veut donner satisfaction à qui l'a engagé" (2 Tim 2.3-5)..

St Benoît, avec toute la tradition monastique (St Bernard, en particulier) soulignera fortement qu'en entrant au monastère, on entre en une milice, celle du Christ. Comme l'avait souligné St Paul lui-même : "Rendez-vous puissants dans le Seigneur et dans la vigueur de sa force. Revêtez l'armure de Dieu, pour pouvoir résister aux manœuvres du diable. Car ce n'est pas contre des adversaires de sang et de chair que nous avons à lutter, mais contre... les esprits du mal...
C'est pour cela qu'il vous faut endosser l'armure de Dieu, afin qu'au jour mauvais vous puissiez résister et... rester fermes.Tenez-vous donc debout, avec la Vérité pour ceinture, la Justice pour cuirasse, et pour chaussures le Zèle à propager l'Evangile de la paix ; ayez toujours en main le bouclier de la Foi, grâce auquel vous pourrez éteindre tous les traits enflammés du Mauvais ; enfin recevez le casque du Salut et le glaive de l'Esprit, c'est-à-dire la Parole de Dieu. Vivez dans la prière et les supplications ; priez en tout temps, dans l'Esprit ; apportez-y une vigilance inlassable et intercédez pour tous les saints". (Ephes. 6.10-20).

Prions ! Pour être tous, d'une manière ou d'une autre, de bons soldats du Christ !"Tout chrétien, dira le pape Léon XIII, doit être un vaillant soldat du Christ !" (encyclique Sapientiae christianae, 1890).

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