T.O.
11 Vendredi - (II Rois 11.1sv ; Mth 6.19sv)
Depuis quelques jours, la liturgie
nous fait lire parfois des récits assez épouvantables, tel celui d'aujourd'hui
! Ce ne sont certes pas des contes à la manière de Mme de Ségur !
Le contexte historique comporte de
multiples scandales politiques assortis de meurtres : tandis que le Royaume du
Sud, autour de Jérusalem, est assez stable, on assiste dans le Royaume du Nord
à une succession d'usurpateurs. Et c'est très "sauvage" !
Alors une question vient à l'esprit
: pourquoi ces récits "sauvages" font-ils partie de la Bible,
de la "Parole de Dieu" ? Pourquoi ? C'est qu'ils veulent souligner,
me semble-t-il, une grande leçon que l'on retrouve tout au long de notre propre
existence :
Si le peuple de Dieu garde
l’identité qu’il a trouvée dans le désert, s’il conserve l’Alliance avec Dieu,
il n’a aucune raison de craindre. La fidélité au Dieu de l’Alliance est le
secret de sa réussite ! S’il est
infidèle, la terre elle-même, cette terre promise et donnée par Dieu, devient
une terre qui “vomit“ ses habitants ! C’est le chaos ! Car Dieu, par
respect pour la liberté qu'il a donné aux hommes, permet alors les conséquences
de leurs infidélités. Et ce sera, par exemple, un peu plus tard, l’invasion des
rois Assyriens, la déportation à Babylone !
En ce sens, on peut faire une
réflexion importante pour nous-mêmes : certes, Dieu est
miséricordieux ! Il pardonne toujours. Il pardonne nos fautes. Mais il
ne peut pas supprimer - sauf miracle ! - les conséquences de nos actes
mauvais.
Si un enfant, par désobéissance,
utilise un couteau dont l’usage lui est interdit et se blesse, sa mère peut
pardonner sa désobéissance ; mais elle ne peut ôter la conséquence de sa
désobéissance : la blessure ! Elle ne peut s’employer qu’à la
soigner…, ce qui peut prendre du temps !
Pour nous, quand la blessure est plus
spirituelle, elle peut être soignée par un accroissement de charité, de repentir…
etc. (C’est
le sens des indulgences, pas toujours comprises !). Et si cette
blessure comporte un aspect visible (un vol, par exemple), il faut
s’employer à la guérir par une “réparation“ adéquate (rendre l’objet
volé…, compenser),
ce qui, là encore, peut prendre du temps…
Soyons attentifs à cette
évidence : nos actes (même pardonnés et par Dieu - c’est évident
- et parfois par les hommes) nous “suivent“ toujours…, et parfois très
lourdement. C’est logique.
Cependant, la logique divine est encore
celle-ci démontrée en Jésus Christ : du mal (conséquence de nos fautes), Dieu peut en
faire du bien ! Et même un bien suprême !
Certes, le peuple de Dieu, le peuple
de l’Alliance, sera déporté, en Assyrie, à Babylone…, conséquence de ses
infidélités diverses. Alors il “crie“ vers Dieu. Et Dieu non seulement promet une
délivrance, mais lui annonce surtout une “Nouvelle
Alliance“, une alliance “perpétuelle“ (proclamée par les prophètes, tels
Isaïe, Jérémie, Ezéchiel)
Car Dieu, lui, malgré notre
déchéance, reste fidèle ! “Si
nous sommes infidèles, lui, dit St Paul, demeure fidèle !“ (2 Tim 2.13). Une fidélité divine déjà
expérimentée, justement, tout au long de l’histoire biblique.
Nous pouvons être sûrs de la
fidélité de Dieu ! Pourquoi ? “Parce
qu’il ne peut se renier lui-même“, dira St Paul ! Parce que Dieu est
Amour ! Il reste fidèle par un amour purement gratuit, un amour qu’il veut
renouveler, de telle sorte qu’après les infidélités et les repentirs, dira le
prophète Osée, il y ait des "épousailles" encore plus belles que les "fiançailles"
originelles, un amour qui va présider à une “Nouvelle Alliance“ qui ne
sera rien moins qu’une nouvelle création.
Nous le savons : cette
“Nouvelle Alliance“ sera établie par le Christ qui, lors de son baptême,
descend dans le Jourdain (Yarden
= descendre),
dans ce fleuve qui descend jusqu’à la mer morte, symbole du péché du monde.
En y “descendant“, il prend sur lui
toutes nos infidélités et remonte vers le temple qu’il restaure en son propre
Corps ressuscité et glorifié. “Lui, de
condition divine, s’est dépouillé, devenant semblable aux hommes… C’est
pourquoi Dieu l’a souverainement élevé et lui a conféré le Nom qui est
au-dessus de tout Nom“ (Cf. Phil. 2.6 sv).
En lui, nous sommes déjà “re-créés“. Il est le Grand
Prêtre (“Pontifex“,
celui qui fait le “pont“ entre Dieu et les hommes) ; il est désormais
le garant d’une nouvelle Alliance, dira la lettre aux Hébreux (Cf. Heb.
7.22 ; 8.7sv),
scellée par son sang (Heb.
8.15 sv),
instaurée par pur Amour divin, précisera St Jean (Cf. I Jean).
Cette “Nouvelle Alliance“
réalisée une fois pour toutes (Cf. Heb 9.25) est ré-actualisée
par chaque Eucharistie. Ayons foi en ce mystère d’Amour - “Il est grand le mystère de la foi ! -“. Malgré nos
infidélités, Jésus nous redit : “Celui
qui croit en moi, même s’il meurt (par son péché), vivra !“ (Jn
11.25).
Et voilà pourquoi,
ces récits sauvages que l'on trouve dans la Bible me semblent très instructifs.
Ils montrent l’attitude de Dieu, du Dieu Unique, du Dieu vivant aux prises
avec les hommes faits de chair et de sang (et nous le sommes encore !).
A mon avis, ces récits valent tous les manuels de morale ! Voir de telles
situations… et se rendre compte de leurs dénouements…, à court terme humain et
à long terme divin c’est, me semble-t-il, plus précieux que tous les traités
abstraits de morale qui donnent des principes précieux, certes, mais que peu de
personnes ne lisent (sauf les professeurs !).
Il faut savoir
regarder en face tous ces actes iniques que commettent les hommes (aujourd’hui
encore) et les conséquences qu’ils entraînent. Et alors on enrichit notre
mémoire de tous ces récits épouvantables pour éduquer ce que l’on appelle -
dans la morale de la Somme théologique de St Thomas d’Aquin - la vertu de
prudence qui est à la charnière des vertus intellectuelles et des vertus
morales : La véritable prudence est une lumière qui nous est donnée pour
que notre liberté s’exerce avec pleine lucidité ! "Si ton œil est limpide, tout ton corps sera dans la
lumière", nous dit Notre Seigneur aujourd'hui !
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