T.O. 11 Dimanche
2013 - Risque de tout "classer" ou...
d'aimer !
Ce récit de l'évangile est un peu comme un
drame avec trois personnages :
- Il y a Simon qui a invité Jésus et
qui est catalogué comme étant pharisien.
- Il y a la femme
dont on ignore le nom, cataloguée comme une pécheresse.
- Il y a Jésus que Simon a invité
par curiosité car il est - dit-on - un Prophète.
Ainsi, chacun des trois protagonistes porte
une étiquette : il y a le pharisien, la pècheresse, et peut-être le
prophète !.
On a toujours éprouvé le besoin de classer
les gens. Chacun de nous possède un grand classeur…, parfaitement invisible. Un
classeur à classer les personnes en lequel les interactions entre les fiches
sont, comme dans un ordinateur, multiples, variées et fréquentes. Chaque
personne a souvent une place précise, typée que les conversations dévoilent
parfois :
- Ici, “C'est un homme de droite ou de
gauche !” ; là, un “homme de bien !”
- Ici, encore, “c’est un progressiste” ;
là “un intégriste” !
Et, sans le vouloir, on en arrive à la
médisance, voire la calomnie.
Une conversation animée provoque parfois à
un paroxysme de qualificatifs : "Oh
! dit l'une, une telle, vraiment, c'est
une 'pas grand-chose !'" - "'Une
pas grand-chose ?', rétorque une seconde. Vous voulez dire : 'Une rien du tout !'" - Et une troisième de conclure
péremptoirement : "'Une rien du tout
?'. C'est même 'Une moins que rien !'". - Et la première de tout
légitimer aussi sérieusement qu'invraisemblablement : "Elle passe tout son temps à dire du mal des autres !".
Pesée ! Emballée ! Expédiée ! Comme l'on dit d'une marchandise !
Notre-Seigneur lui-même n'échappait pas à
ce classement : “C'est un prophète !”,
disent les uns. - “Ce n'est qu'un glouton
et un ivrogne", disent les autres, "un
ami des publicains et des pécheurs”.
Ce genre de classement est inné :
l’autre, parce qu’il est plus ou moins méconnu, parce qu’il est différent de
moi, est insécurisant ! Alors, avec un besoin de sécurité, un souci de savoir
où l'on avance, à qui l’on parle, on se rassure en posant des étiquettes sur
chaque personne. Et par ce moyen, nous pensons voir plus clair dans nos relations
! Notre route est ainsi balisée pour mieux avancer dans la vie…, selon
également le rang qui doit nous être reconnu, un rang à estimer, évidemment ! Car,
il faut le remarquer, les avis portés ainsi sur les autres, parce qu'ils sont
souvent négatifs, nous permettent de nous valoriser nous-mêmes, ce qui est une
manière d'affirmer qu'on est quand même meilleur, et que l'on doit nous respecter.
Ainsi, le très respectable Simon avait mis
une distance entre lui, la femme et Jésus. Mais s'enfermer
soi-même ou enfermer tel individu dans une catégorie, c'est en faire une
"chose", non une "personne"; c'est le méconnaître
totalement.
Alors, Jésus va tout déranger. Par sa seule
présence, il attire à lui cette femme dans la maison ! Il se laisse approcher,
embrasser ! Imaginez ! Que vont penser les amis de Simon ? Car, certainement,
ils ont vu Jésus et cette femme, ensemble, chez lui ! Du coup, le
"classeur" de Simon se met à tournoyer et toutes les fiches commencent
sérieusement à voltiger ! Jésus est comme un "virus informatique" ;
et l'ordinateur devient complètement fou. Simon avait "classé" Jésus
; il avait "classé" cette femme ; il s'était "classé"
lui-même, en bonne position, bien sûr ; et voilà que Jésus brouille tout !
Alors
Jésus explique :
- Simon, cette femme, tu dis que c'est une
"pécheresse". C'est vrai, elle a péché. Mais, n'oublie pas :
tout le monde est pécheur, plus ou moins. L'important, c'est de le reconnaître.
Or, elle, elle l'a reconnu, et d'une manière exceptionnelle : elle s'est
humiliée. Et parce que pardonnée, elle témoigne par son grand amour. Et
n'est-ce pas cet amour qui est le plus important, finalement ? Or, entre
elle et toi, entre elle et tous tes amis que tu dis "gens très bien",
qui a montré le plus d'amour ? N'est-ce pas elle ? Alors, moi, je vois d'abord
en elle celle qui aime à la folie, celle dont l'amour est capable de faire des
saints.
- Simon, tu te demandes si je suis un prophète.
Et tu es tenté de répondre : ”Non, ce n'est pas un prophète, car il se laisse
approcher, toucher par une pécheresse !”. Pour toi, un homme de Dieu, c'est
donc celui qui s'écarte des pécheurs et les rejette. Tu n'as donc rien compris
! C'est précisément parce que je suis un homme de Dieu, l'envoyé du Dieu “lent à la colère et plein de miséricorde”
que je me laisse approcher par cette femme. Ce n'est pas pour les
"parfaits" que je suis venu, mais pour les malades !
- Simon, toi “le pharisien”, qui
donc es-tu réellement ? Tu t'attaches aux commandements de Dieu ; tu calcules
exactement ce que tu dois faire : quand je suis entré, tu n'étais pas obligé de
me rafraîchir les pieds, ni de me parfumer la tête. Tu ne fais que ce qui est
obligatoire, rien de plus.
Ta religion ressemble à un livre de compte
bien en règle. Mais, est-ce bien cela la vraie foi ? Est-ce simplement s'attacher
à des commandements, à des règles ? N'est-ce pas s'attacher à Quelqu'un ? - “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu !”… Tu
aimeras… Vis-à-vis de Dieu, nous sommes toujours des débiteurs, nous n'aurons
jamais fini de répondre à son amour. La femme, toute pécheresse qu'elle était,
a montré, elle, un immense amour.
Ainsi, Jésus se met toujours du côté de la
vie, et jamais du côté de la mort !
Il terminera sa vie terrestre en passant de
la mort à la vie. Il retire cette femme de son "tombeau" pour la
placer face à la vie, face à l'amour. Car Dieu qui est Vie, est Amour.
Tous, nous sommes appelés à sortir de nos
"tombeaux" plus ou moins profonds, et à vivre, à aimer véritablement
!
- Simon, aurait pu conclure Notre Seigneur,
qui vas-tu être, toi ? - Vas-tu en rester encore à tes classements bien
ordonnés ? Vas-tu rester le pharisien “correct” ? Mais, - dis-toi le bien -
cette correction, cette médiocrité, c'est ton "tombeau" à toi ! Et
moi, je t'appelle à la vie ! Vas-tu découvrir la joie d'aimer, la joie d'aimer
comme cette femme ?
D’aimer
Dieu et de prendre le risque d’aimer comme Dieu ?
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