dimanche 10 avril 2016

Présence du Christ ressuscité !

3ème Dimanche de Pâques  - 2016 -

"Vous dites que Jésus est toujours vivant ! Eh bien, qu'il se montre ! Depuis le temps que je souffre, j'ai l'impression que Dieu est très loin, s'il existe. Et s'il existe, pourquoi tant de souffrances, de haines, d'injustices ?".

Ces cris de révolte, jaillis du cœur des blessures humaines, nous les entendons chaque jour. Comment ne pas les redire, au lendemain de cette fête de Pâques où nous proclamons le Christ ressuscité ? Le Christ, toujours vivant !
Alors que tant d'hommes et de femmes aujourd'hui croient que Dieu a déserté ce monde, peut-on croire encore que Jésus est là, sur le rivage des eaux de nos vies parfois si tumultueuses, si vides, si angoissantes ?

Oui, nous sommes souvent comme ces disciples qui repartent, jour après jour, jeter leur filet. Ils font leur travail de pêcheurs. Comme eux, avec, souvent, plus de courage que d'entrain, nous reprenons chaque matin une journée de travail, de peine, de soucis ou de maladie... Et comme eux, nous nous activons souvent sans rien prendre, c'est-à-dire sans que notre vie ne donne de ces fruits qui apportent joie, paix, confiance, enthousiasme.

Alors, la nuit risque de tout envahir : nuit de peine, de tristesse, de désespoir, nuit "sans lever du jour", sans ces petits matins qui réveillent et dynamisent à nouveau.
Cette nuit humaine, certains la connaissent bien : les malades, ceux qui connaissent échecs de toutes sortes : soucis familiaux si nombreux aujourd'hui, souci d'un travail introuvable, etc…  Et quelques-uns vont jusqu'à dire : "je n'en peux plus ; je ne sais que faire, j'ai honte, je voudrais disparaître… !". Combien de fois j'ai entendu - vous avez entendu - avec déchirements au cœur, ces réflexions de la part de ceux qui croient au diable sans trop croire en Dieu. Ils viennent parfois voir le prêtre qui, seul, pensent-ils, peut ôter toute diabolisation !

Et pourtant, l’évangéliste répète... qu'aujourd'hui encore Jésus se manifeste sur le rivage de la vie des hommes...!".

Mais remarquons d'abord que dans l'évangile de ce jour il n'y a rien d'extraordinaire dans les gestes de Jésus : il est là..., simplement ! Il est là ! Et il demande : "Les enfants, auriez-vous du poisson ?"..… et encore : "Apportez donc de ces poissons que vous venez de prendre !".

Demandes simples, mille et mille fois répétées depuis
par les hommes et les femmes qui réclament à manger,
par tous ceux qui en appellent au partage,
par tous ceux qui crient leur désir de vivre,
par tous ceux qui ne réclament qu'un signe d'amitié, qu'un sourire réconfortant et qui ne veulent pas être oubliés sur la marge de l'humanité.
Voix de tous les souffrants quels qu'ils soient et qui, par leurs appels, manifestent déjà, inconsciemment, la présence du Ressuscité dans notre monde : "Auriez-vous quelque chose à manger ?", répètent-ils. Auriez-vous quelque chose à me donner - même un simple verre d'eau, disait Jésus en son temps, même un simple sourire réconfortant ?
C'est toujours la voix du Seigneur qui quémande. Et qu'allons-nous répondre ? Le pape François ne cesse de remarquer : toutes les lois d'une bonne navigation de vie, tous les commandements d'une bonne conduite etc. toute l'autorité d'un maître avisé n'y suffiront s'il n'y a pas l'amour !

Car devant ces divers cris d'humanité en détresse, oserons-nous dire comme Jean et reconnaître : "C'est le Seigneur !".
Aurons-nous alors autant de cœur que ces disciples qui repartent jeter leurs filets, malgré la fatigue d'une nuit de travail stérile ? Serons-nous assez ouverts et disponibles pour nous laisser remuer par les demandes de ceux qui s'adressent à nous ?
Dans la demande du Christ et dans la réponse des disciples, tout à la fois, oui, déjà là, le Christ se manifeste.
Dans l'appel des uns et dans l'écoute accueillante et active des autres, oui, déjà là, le Christ se manifeste.

Mais il faut aller plus loin : le Christ parle et les disciples surmontent l'échec désespérant d'une "nuit sans rien prendre". Ils se remettent à l'œuvre, et alors le filet se remplit, comme jamais il ne s'était rempli. La stérilité fait place à la fécondité... le désespoir est vaincu, la confiance et le courage l'ont emporté sur la résignation et l'abandon.

Alors, le premier disciple proclame : "C'est le Seigneur !".
Et Pierre se jette à l'eau.
... comme tous ceux qui osent accorder de l'importance aux moindres petits signes d'espoir.
... comme ceux qui savent répéter ce proverbe (chinois) : "Mieux vaut allumer une minuscule chandelle que de maudire l'obscurité".
... comme ces hommes et ces femmes de tous les jours et de tous les pays qui repartent chaque matin glaner les quelques fruits de labeur pour vivre,
... comme ces malades très atteints qui s'accrochent à la vie, qui osent sourire et accueillir malgré le poids de leur douleur,
... comme tous ceux qui affirment : "Si je n'avais pas la foi, il y a longtemps que j'aurais mis fin à ma vie !"

Car, par le cri des uns et par l'écoute aimante des autres, un refrain alors se murmure, s'enfle et éclate : "C'est le Seigneur !", Oui, c'est bien Lui qui est présent chaque fois que le cœur de l'un est aidé par l'autre à surmonter le désespoir, chaque fois que la vie continue quand même.

Et comme dans un filet bien rempli, tous recueillent les fruits de leur foi et de leur courage en autant de moments de paix profonde et de joie intense.
Ils savent recueillir ces moments... Bien plus, ils les partagent.

Car il faut aller encore plus loin...  ... jusqu'au repas au bord du lac, où Jésus rassemble les disciples pour leur donner à manger... de ces poissons qu'ils ont eux-mêmes rapportés.

Dernier signe de la présence du Christ ressuscité : il rassemble les hommes et leur partage le pain qui fait vivre.
Alors, tous savent que c'est bien Lui, le Seigneur, présent au milieu d'eux.
Le repas partagé, le rassemblement de tous, la communion dont nul n'est exclu, comme cette Eucharistie célébrée aujourd'hui par des millions d'hommes et de femmes dans le monde entier, les voilà bien les signes décisifs de la présence du Christ, vivant au milieu de nous.

Présence du Christ ressuscité
dans nos cris d'affamés de bonheur
et aussi dans nos gestes quotidiens de partage
et dans ces multiples moments de joie partagée,
dans ces invitations faites à l'inconnu de s'asseoir auprès de nous,
dans ces amitiés acceptées... !

Oui, n'allons pas chercher le Christ ressuscité loin de nos lieux de vie, loin de notre ordinaire.
Sachons l'entendre dans les appels de ces frères qui nous sont parfois si proches !
Sachons le reconnaître dans les échecs surmontés. Et sachons le célébrer dans tous les gestes de partage.

Écoutons sa Parole qui nous redit : "Confiance... Allez plus loin... N'ayez pas peur !".
...et prêtons-lui nos bras, nos esprits et nos cœurs pour que davantage d'hommes et de femmes soient touchés par son Amour.

Et je terminerai par cette remarque :
Ce que je viens de dire, je le crois profondément.
Ce que je viens de dire n'est pas toujours facile à entendre et à mettre en pratique. Bien sûr !

Mais une chose est pour moi d'une certitude absolue : Par-delà conseils, observances, commandements et que sais-je encore... de tout l'arsenal de moralité, c'est l'amour qui l'emportera, l'Amour du Christ qui, lui-même, a vaincu toute mort ! Et surtout la mort du premier péché, l'orgueil du premier homme, cet orgueil de l'homme de tout temps qui le rend si aveugle pour mieux reconnaître le Seigneur sur le rivage de notre vie !

C'est seulement cet amour qui légitime notre cri : "C'est le Seigneur !". Il est là !

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