T.O. 13 Samedi 2013 -
Jacob !
Nous faisons aujourd'hui la connaissance
de Jacob. Vous vous en êtes déjà
rendu compte : parmi les patriarches, c'est mon préféré. Pourquoi ? Parce que,
tels que nous sommes et là où nous en sommes, nous lui ressemblons tellement !
Car Jacob, c'est un grand "farceur", si je puis dire. Et “farceurs“,
pécheurs, nous le sommes tous et devant Dieu et devant nos frères !
Il faut d’abord savoir ce que signifie son
nom ! Pour cela, revenons un instant à sa naissance. Il y a la pauvre Rebecca
qui était jolie, dit le texte, mais stérile. Aussi, Isaac prie pour elle…, et
avec une telle force qu'il est exaucé - c'est à retenir cette efficacité de
la prière à laquelle nous nous consacrons dans les monastères ! -. Rebecca
devient enceinte et - bien plus - de deux jumeaux. Mais dans son sein, ces deux
jumeaux se battent ! Elle va consulter Dieu, se disant : "si c’est comme cela, à quoi bon vivre ?". Elle est en
pleine dépression, la pauvre. On la comprend. Ses fils se battent en elle !
Déjà !
Et Dieu lui dit : "Deux nations sont dans ton sein ; deux peuples.... L'un sera plus
fort que l'autre et le grand servira le petit".
Jacob et Esaü ! Mais c'est
l'humanité qui bat, qui lutte au rythme de notre propre cœur pécheur !
"Le
premier sortit : il était roux et
tout entier comme un manteau de poils". On l'appela “Esaü“ c'est-à-dire le "velu". Plus tard, un jour, il ira
à la chasse, car c'est lui qui apportait de quoi manger. Courageux, cet Esaü ! Jacob,
lui, restait plutôt sous la tente ; c'était le petit préféré de sa maman,
n'est-ce pas. Cela arrive ! Il préparait un “brouet“, dit le texte, un plat de
lentilles, dira-t-on. Esaü revient de la chasse, épuisé. Il dit à son frère : "laisse-moi avaler de ce roux-là, car
je suis épuisé...". Vous connaissez la suite. Jacob le lui donne en
contrepartie de son droit d'ainesse. Parce qu'affamé, épuisé, Esaü accepte Inconsciemment.
Aussi, on l'appela encore “Edom“, c'est-à-dire "Roux", parce qu'il
était roux et avait accepté le plat de Jacob. Plus tard, les Edomites,
descendants de Edom/Esaü, seront assujettis à David (2 Sam 8.14).
Et lors de sa naissance, son frère jumeau,
tenait son talon. Aussi, on l'appela "Jacob"
: "Ya`aqov". "Aqeb", c’est le talon. Mais on transforma
vite "Aqeb" en "Aqob" qui veut dire "le Tordu". Car il
fut vraiment le "Grand farceur" qui savait "rouler" tous
ceux qu'il rencontrait. Et c'est ainsi qu'aidé de sa mère, il vola à son frère
aîné la bénédiction de son vieux père, Isaac. Esaü aura beau se plaindre et
demander : "Est-ce parce qu'il
s'appelle Jacob - donc "le farceur", celui qui ne fait que des “coups
tordus" - que par deux fois il m'a
supplanté ?", la bénédiction de l'ancêtre avait été donnée au cadet !
Dès lors, dans la Bible, il y a souvent des
mots très durs pour souligner la traitrise, la fausseté d'un frère, la
malhonnêteté d'un l'homme envers un autre homme ! "Soyez sur vos gardes, dira Jérémie (9.3) ; Méfiez-vous de tout frère, car tout frère ne
pense qu’à supplanter" ! Il faudrait traduire : "tout frère ne pense qu’à jacober !".
Et le prophète dira encore : "Le cœur
est rusé plus que tout, et pervers, qui peut le pénétrer ?" (17.9).
"Rusé", c'est encore le mot "aqab" dont la racine est
"aqob". Le coeur est "jacobé" plus que tout !
Esaü et Jacob ! Voilà l'état de
l'humanité, l'attitude du frère pour son frère, de l'homme pour l'homme : "Homo homini lupus", dira le
dicton latin ; "L'homme est un loup
pour l'homme".
Cela, on le sait ! Mais pourquoi Dieu
choisit-il souvent ses plus grands serviteurs parmi les plus
"farceurs". Je ne sais. C'est un fait ! C'est le secret de Dieu ! En
tous les cas, d'après l'Apocalypse, "Moi,
dit Dieu, je scrute le cœur ; je sonde
les reins" (Apoc.
2.23).
Dieu seul connaît l'homme, chaque homme, chacun de nous, tels que nous sommes
et là où nous en sommes ! Il nous
connaît tous, nous tous les "Jacob-farceurs" de la terre ! Il n’y a
que Dieu qui peut voir les tortuosités de notre cœur. Les psychanalystes n’y entendent
rien !
Et il sait, lui, Dieu qui scrute les cœurs,
que les plus "farceurs", se reconnaissant tels qu'ils sont et là où
ils en sont, sont capables de devenir de grands saints. Jacob deviendra
Israël. Rendez-vous compte ! Bien plus, Jacob va devenir, dans l’Évangile, Nathanaël,
ce vrai Israélite en qui il n’y a pas de tortuosités, dira Jésus, ce Jacob qui,
en final, verra en Jésus la véritable échelle qui relit ciel et terre sur
laquelle les anges ne cessent de monter et descendre ! C'est l'Alliance… entre
ciel et terre, entre l'homme et l'homme. “Gloire
à Dieu ! Paix aux hommes ! Joie du ciel sur la terre !“.
C'est ainsi encore que le grand persécuteur
Saul deviendra l'apôtre des Gentils ! Et de beaucoup d'autres ainsi !
Mais pour changer un “Jacob-farceur“ en un
homme qui nous montre le ciel, pour changer un cœur d'un persécuteur en apôtre,
il ne faut rien de moins qu’une nouvelle création ! "Crée pour moi un cœur pur", demandait David qui, lui
aussi, était un fameux "farceur" avant de devenir le Saint Roi David,
ayant humblement laissé la vérité divine balayer le fond de son cœur. “Crée en moi... !“. Comme par une
nouvelle création, il reçut un “cœur loyal“, selon l'expression d'Ezéchiel qui
prophétisa la grande résurrection de tous les “Jacob“ de la terre en la sombre
vallée de Sodome et Gomorrhe !.
"Je
ne suis pas venu pour les justes, mais pour les pécheurs !", disait Jésus. Et si
ces fameux justes demandent : "Et de
nous alors, qu'en est-il ?, je crois que c'est l'attitude la plus
irrécupérable. Car la grâce ne mouille pas sur ceux qui se croient justes,
disait Pascal.
C'est dans la mesure où l'on se reconnaît
pécheur que Dieu nous rend digne de lui ! N'est-ce pas la raison pour laquelle
St Benoît désirait que l'on dise chaque jour le psaume 50ème, le
fameux psaume de David ? “Seigneur, crée
en moi, en moi qui ressemble tellement à Jacob, crée en moi un cœur pur !“.
Comprenez-vous désormais pourquoi j'ai une
grande affection pour Jacob ?
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