mardi 28 août 2012

St Augustin


28 Août       

        Après avoir, hier, honoré la mère, Ste Monique, il est bon de parler du fils ! - Certains saints sont plus grands que les autres en ce sens qu’ils ont eu, de leur vivant, un grand prestige dans l’Eglise, et, après leur mort, une influence durable… jusqu’à nous ! St Augustin, évêque d’une petite ville provinciale en Afrique, Hippone, est l’un de ses grands saints. Son œuvre lui valut le titre de “Docteur de l’Eglise“ (1). Mais que ce titre important et bien mérité ne nous empêche pas de le lire ! Comme St François de Sales plus tard, il fut humble, bienveillant, accommodant, sachant merveilleusement utiliser son savoir pour se mettre à la portée des plus ignorants. Car cet aigle de science et de vertu était aussi, si je puis dire, une “mère-poule“ qui incitait avec douceur, par sa parole et son exemple, à l’amour de Dieu et du prochain, à celui de l’Eglise dans l’abnégation du dévouement obscur.

Passons sur le temps de sa jeunesse. La fête de Ste Monique a été l’occasion d’en parler.
De Milan où il fut baptisé par St Ambroise en 387, Augustin regagne son Afrique natale. De passage à Hippone, il fut élu évêque de la ville par acclamation, sous l’influence cependant du vieil évêque Valère qui cherchait un successeur. – Dès lors, pendant plus de trente-cinq ans, il parla à son peuple, presque tous les jours, et parfois matin et soir. Jamais théologie plus profonde et plus substantielle ne fut plus accessible, plus vivante. Ses commentaires des psaumes sont encore d’une vivacité étonnante !

Devenant célèbre, un labeur immense le sollicite : relations avec les autres évêques africains, réponses aux lettres de plus en plus nombreuses qui arrivent d’Italie, d’Espagne, de Gaule… et aussi de Bethléem. A propos de Bethléem, disons avec humour que la correspondance avec l’ombrageux St Jérôme lui donna bien des soucis : le susceptible savant tantôt lui tenait rigueur de ses silences, tantôt se fâchait de ses écrits. Il fallut toute la patience, l’humilité d’Augustin pour arriver à calmer le vieux grincheux qui devint finalement un grand ami de l’évêque d’Hippone !

Pour faire face à ses tâches très lourdes, Augustin jouissait, fort heureusement, d’une santé solide et résistante, grâce peut-être à un régime de vie régulier et simple… Il avait établi autour de lui une petite communauté de chrétiens où tout était en commun ; la table était frugale ; et au mur du réfectoire, un distique était affiché : “Celui qui aime à ronger les absents n’est pas fait pour cette table. Qu’il se le tienne pour dit !“.

Dès les premières années de son épiscopat, il écrit ses “Confessions“, mais non à la façon, plus tard, de J-J Rousseau : un aveu fastueux de son passé, un étalage complaisant de son “moi“ plus ou moins débraillé, mais une reconnaissance, une action de grâces envers Dieu dont l’amour s’est tellement manifesté à son égard.

Vers 400, il entame un livre pédagogique, la “catéchèse des ignorants“ ; et un autre sur “le travail des moines“ en lequel la fausse piété fainéante est traitée comme elle le mérite. Il entame encore un grand ouvrage, “La doctrine chrétienne“ où le thème de la grâce face aux erreurs du manichéisme (2) et du donatisme (3) prend une place importante.

La prise de Rome par Alaric (410) donne l’occasion à St Augustin d’écrire son grand ouvrage “La Cité de Dieu“ pour réconforter les esprits désemparés par l’écroulement d’une civilisation. Il montre l’Eglise de Dieu d’ici-bas en marche vers  le bonheur et la paix qui lui sont réservés au terme de son pèlerinage. Mais elle est mêlée, comme le blé et l’ivraie de la parabole, aux “impies,  aux méchants“ qui peuvent s’élever en des triomphes éphémères ne provoquant, en fait, que de grandes catastrophes.

Puis ce fut son important traité sur “La Trinité“, avec le commentaire du livre de la Genèse et celui des psaumes

Le pélagianisme (3) fut soudain à l’ordre du jour. Cette hérésie qui tendait à diminuer la grâce divine n’était pas pour plaire à l’auteur des “Confessions“.

Cependant, pendant que St Augustin, vieillissant, ne cesse de combattre les erreurs et déviances dans l’Eglise, le fracas des armes allait prédominer. Les Vandales ariens arrivent, par l’Espagne, en Afrique, ruinant les églises. Ces envahisseurs charriaient avec eux mille impuretés : le culte des idoles renait. Un vent de folie souffle sur le pays. On devine la tristesse d’Augustin, âgé alors de 76 ans : quarante ans d’épiscopat, quarante ans de labeur pour en arriver à un tel résultat !

Mais une forte fièvre le prit soudainement. Sachant qu’il allait mourir, il fit tapisser les murs, près de son lit, de longues feuilles où étaient inscrits, en grosses lettres, les psaumes de pénitence qui le réconfortaient… Il devait certainement s’entretenir aussi des pensées qu’il livrait jadis à son peuple : “La mort sera engloutie dans la victoire. Et nous serons en vacance pour voir Dieu dans la paix éternelle, devenus citoyens de Jérusalem, la Cité de Dieu !“ (4). Sa mort survint le 28 ou 29 Août 430.

            Pour terminer, je me permets de citer un texte repris et commenté récemment par Benoît XVI, à propos des évangiles sur le “Pain de Vie“ :  “Tu disais : « J’ai besoin de comprendre pour croire » ; et moi : « Crois d’abord pour comprendre“Car “Dieu dit par son prophète : « Si vous ne croyez pas, vous ne comprendrez pas. » (Is 7, 9)  […].
Certes, il n’est pas faux de vouloir comprendre avant de croire, car “moi qui vous parle, en ce moment, si je parle, c’est pour amener aussi à la foi ceux qui ne croient pas encore. Donc, en un sens, cet homme a dit vrai quand il a dit : «Je veux comprendre pour croire » ; et moi également je suis dans le vrai quand j’affirme avec le prophète : « Crois d’abord pour comprendre. »
Nous disons vrai tous les deux : donnons-nous donc la main ; comprends donc pour croire et crois pour comprendre : ... comprends ma parole pour arriver à croire, et crois à la parole de Dieu pour arriver à la comprendre !“.
Ainsi donc, “croyez pour mériter de comprendre. La foi doit précéder l'intelligence pour que l'intelligence soit la récompense de la foi !“.

 (1) l’un des quatre premiers de l’Eglise latine avec Ambroise, Jérôme et Grégoire le Grand.

 (2) Religion syncrétique du Perse Mani (ou Manès) (3ème s.) alliant des éléments du christianisme, du bouddhisme et du parsisme. Elle enseigne que le bien et le mal sont deux principes fondamentaux, égaux et antagonistes.

 (3) Le donatisme est une doctrine chrétienne schismatique qui prit son essor dans l’Eglise d'Afrique, aux 4ème-5ème siècles. Il tire son nom de Donatus, évêque en Numidie. Le principal point d’achoppement des donatistes avec l’Église officielle concernait le refus de validité des sacrements délivrés par les évêques qui avaient failli lors des persécutions de Dioclétien (303-305). Cette position fut condamnée en 313 au concile de Rome.

 (4) Doctrine développée à partir du 4ème siècle par l'ascète breton Pélage et ses partisans, caractérisée par l'insistance sur le libre arbitre de l'homme. C’est, dit Pélage, la liberté humaine qui règle les rapports entre l'homme et Dieu, alors que, pour l’Eglise, c’est la grâce divine qui est première !

 (5) In ps. 134 – P.L. 37.1755

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