dimanche 26 avril 2020

Le Christ reconnu et annoncé

3e Dimanche de Pâques 20/A
         
Qui n'a pas connu, un jour ou l'autre, les affres du désespoir?

On était heureux, on s'aimait, on vivait… bien ! Et puis, brutalement, c'est l'accident de voiture ou l'infarctus, le décès soudain d'un proche… ou sais-je encore…L'expansion brutale d'une pandémie avec toutes ses conséquences !  -   L'horizon apparaît irrémédiablement bouché : la maladie, l'échec conjugal, le chômage, l'enfant qui prend une route qu'on estime dangereuse… Subitement l'avenir s'assombrit, c'est la consternation, le désarroi, le désespoir.

Les deux disciples de Jésus qui, le soir de Pâques, cheminaient vers Emmaüs, étaient non moins déses­pérés. Leur espérance s'était brutalement effondrée à la mort sur la croix de celui en qui ils avaient mis toute leur confiance. "Nous espérions, disaient-ils pour s'expliquer, qu'il serait le libérateur…!".
"Nous espérions", disons-nous souvent également !  Mais maintenant, tout est anéanti… !

Pourtant, les deux disciples, s'ils savaient lire les signes qui leur sont donnés, ils pourraient reprendre es­poir. D'ailleurs des bruits circulent : "Des femmes qui sont allées au tombeau" n'ont pas trouvé le corps;  elles ont eu, paraît-il, une apparition : "des anges disaient qu'il est vivant". Mais faut-il croire ces histoires de femmes ?  
Faut-il croire toutes ces histoires d'hommes, de femmes qui disent avoir rencontré Dieu ? Personne n'avait vu Jésus ressusciter ! Personne n'a jamais vu Dieu ! Tout espoir est donc mort ! L'avenir est irrémé­diablement noir.

L'inconnu qui chemine avec les deux disciples a écouté ce récit désespéré. Et voilà qu'il prend la parole : "Vous n'avez donc pas compris !" Et il révèle le sens de plus en plus évident d'évènements jusque là incompré­hensibles. Il fait surgir la lumière dans un horizon enté­nébré.
Ce n'est pas une révélation fulgurante. Mais la lumière se fait de plus en plus éclatante, au long du chemin où l'inconnu, "en partant de Moïse et de tous les prophètes" explique, dans toute l'Ecriture, ce qui con­cerne le Christ. Comme la lumière se fait de plus en plus grande également au cours des années… pour nous !

Cet inconnu leur explique si bien l'Ecriture, sa pré­sence est si réconfortante que, arrivés à l'étape, ils le supplient : "Reste avec nous". Ils vont partager le repas. Gestes de tous jours… C'est alors que "leurs yeux s'ouvrirent et qu'ils le reconnurent".  
Celui qui rompt le pain et le leur donne, c'est ce Jésus qu'ils croyaient à jamais disparu. A l'instant tout s'éclaire : "notre cœur n'était-il pas brûlant en nous tandis qu'il nous expli­quait les Ecritures ?"
Et la joie qui est la leur désor­mais, ils n'ont de cesse de la communiquer : "C'est vrai, le Seigneur est vivant, nous l'avons reconnu quand il a rompu le pain".

Nous aussi, quel que soit notre âge, nous avançons sur la route de l'existence et il nous arrive d'être triste et désespérés.
Nous nous souvenons avec nostalgie des jours d'antan, des jours heureux, alors que, peut-être, nous sommes actuellement dans l'épreuve ! Chrétiens, nous nous souvenons de la foi vive et facile de notre jeu­nesse. Or, en avançant sur la route, mille embûches hu­maines et spirituelles nous font trébucher; et mainte­nant nous ne voyons pas très clair en nous-mêmes et autour de nous. Les événements n'ont pas répondu à nos projets les plus légitimes. L'Eglise elle-même ne paraît-elle pas vaciller par des attaques fortes et mul­tiples. Et il nous arrive, au gré des événements de l'Eglise elle-même, en considérant actes ou paroles de ses mi­nistres, d'être déconcertés. Serait-ce d'ailleurs très étonnant ? St Paul ne disait-il pas : "Que les voies du Seigneur sont impénétrables ! Qui en effet a connu la pensée du Seigneur!".  Et alors, tout en marchant sur la route de notre vie, nous causons de tout et de rien; et souvent nous paraissons si tristes dans notre igno­rance…

Pourtant, le Christ chemine avec nous sur la route de nos vies : "Je suis avec vous tous les jours…". Il nous faut seulement reconnaître cette présence fraternelle. Les disciples d'Emmaüs ont reconnu le Christ lorsqu'il rompit le pain, mais déjà "leur cœur était tout brûlant" lorsque, sur la route, ils méditaient avec lui les Ecritures.
Il y a bien des façons par lesquelles le Christ se rend présent à nous-mêmes. Mais ces deux moyens (Ecritures et repas du Seigneur) sont toujours privilé­giés.

Il nous est bon de chercher dans la lecture et la médi­tation de l'Evangile la présence du Seigneur qui nous donne des raisons de vivre et d'espérer. De plus en plus de personnes - individuellement ou en groupe - lisent et méditent l'Evangile ou, plus simplement, les lectures que la liturgie nous propose chaque jour. Ne pourrions-nous pas tous prendre cette initiative pour acquérir force et courage tout au long de notre vie ?

Et puis, prenons-en conscience de plus en plus : le Christ vient au cours de cette célébration eucharistique. Il vient partager aujourd'hui notre vie comme il a voulu partager un repas avec ses amis rencontrés sur le che­min d'Emmaüs. Accueillons dans l'espérance sa venue parmi nous. L'Eucharistie est la présence par excellence du Christ parmi nous.

Et après l'Eucharistie, quand nous nous en retournerons dans nos demeures, puissions-nous avoir au cœur la joie des pèlerins d'Emmaüs. "Ils racontaient ce qui s'était passé sur la route et comment ils avaient reconnu le Christ quand il avait rompu le pain". Repartons vers nos frères pour être des témoins du Christ et "pour rendre compte de l'espérance qui est en nous". La foi,, insiste le pape François, est obligatoirement "sociale" :  elle doit annoncer le Christ reconnu en notre existence ! Surtout à l'intérieur de notre propre famille humaine ! Sinon, trop cachée, elle risque de s'anéantir

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