dimanche 3 mai 2020

Etre témoins !


4e Dimanche de Pâques 20

4e Dimanche de Pâques ! Traditionnelle journée des vocations ! Et - une fois n’est pas coutume -, ouvertement, je rends grâces pour l’appel que j’ai reçu il y a maintenant plus d’un demi-siècle. Je peux le dire, surtout aux plus jeunes : c’est dans ma prime jeunesse que j’ai ressenti l’appel de Dieu equi peu à peu s’est concrétisé :
- un appel qui embrassait le monde entier par l'exemple de missionnaires que ma paroisse faisait connaître.
- un appel à l’infini de Dieu : Seul Dieu suffit ! C’est le sens de la vie monastique.
- un appel qui finalement s’est concrétisé en paroisse et en bien des endroits…

Souvent, mon bonheur fut, avec le Seigneur, de partager le plus possible peines et joies, soucis et espérances, certitudes et doutes aussi, du moins questions, m’émerveillant souvent de la “splendeur dont Dieu vous a revêtu”, comme dit le prophète Ezéchiel (16). Faisant comprendre en bien des circonstances ma propre réflexion : "mille questions ne font pas obligatoirement un doute" (Cal Newman)

Et c’est cela l’important : faire grandir en chacun de nous la “splendeur du Christ”, sa lumière malgré les questions qui nous assaillent et qui portent toutes sur le mal, la souffrance…

Pourquoi cette inondation ou ce tremblement de terre ? Pourquoi telle épidémie pandémique ? Pourquoi cet accident ? Pourquoi les guerres avec leurs malheurs… et les famines… ? Pourquoi ?

Élie Wiesel, juif rescapé des camps nazis, a osé écrire une lettre à Dieu ; et il disait : “Auschwitz avait comme but non seulement de nous détruire, mais de Te détruire, Toi le Père de l'Humanité. Pourquoi alors ne pas songer en même temps à Ton chagrin ? Regardant Tes enfants souffrir, n'as-Tu pas souffert comme eux, voire avec eux ?”. Et après l'exécution de trois jeunes devant tous les prisonniers, il avait entendu une interrogation qu'on lui adressait : "Où est-il ton Dieu ?". Alors, désignant les trois suppliciés pendus, il avait répondu : "Il est là !"

Il me semble entendre le Christ crucifié et ressuscité dire à Élie Wiesel : “Tu n'es pas loin du Royaume de Dieu”. Aucune parole n'est à la démesure de certaines souffrances ; mais savoir que Dieu souffre avec nous peut nous délivrer d'un Dieu indifférent ou malveillant. Il l'a fait à Gethsémani et sur la croix.

Aussi, Dieu est si peu indifférent qu'Il ne cesse d'appeler, de mobiliser, de solliciter nos générosités pour diminuer la part de malheur. “Sauve Mon peuple”, demande-t-Il à Moïse. “Sauve cette femme qui va être condamnée”, demande-t-Il à Daniel. “Sauve Mon Église”, demande-t-Il à François d'Assise. “Sauve l’homme”, demande-t-Il à chacun de nous aujourd'hui.

Chaque homme, chaque femme est en mission pour le monde. Les talents que Dieu nous a confiés ne sont pas pour nous. Ce sont des énergies pour empêcher les désastres ou secourir les victimes.

Le pape Jean-Paul Il s'adressait aux jeunes en 1985 : “Vous vous posez la question : Réussirons-nous à changer ce monde ? Que devons-nous faire pour ne pas être écrasés par l'injustice, le mépris de l'homme ?”. Il lançait ce jour-là une mobilisation générale : “Ne soyez pas passifs... C'est de vous que dépend l'avenir”.

Est-ce trop difficile de comprendre que la cause de nos malheurs n'est pas dans une indifférence venue de Dieu, mais dans une passivité venue des hommes ? “Tu as vu ces choses et Tu les as permises”, ne cesse-t-on de dire à Dieu, comme pour ne pas entendre que Dieu justement ne cesse de nous poser la même question ! Qui enverrai-je ?”, ce cesse-t-il de clamer.

Dieu aurait-il pu créer un monde où les hommes sauraient découvrir l'urgence de la solidarité, l'enjeu de l'amour et qu'en même temps ce soit Lui, Dieu, qui doit supprimer cette urgence en réparant Lui-même par des miracles tous nos manques ?

“Ta lèpre, c'est de l'amour inemployé ”, disait Jean Giono ( + 1970), "l'écrivain de la violence humaine".

Un journaliste demanda un jour à Mère Teresa : “Qu'est-ce qui ne va pas dans le monde, ma sœur ?”.  Elle répondit brièvement : “Vous et moi Monsieur”.

Si nous admettons que Dieu veuille, lors de notre séjour terrestre, nous initier à l'éternité de l'amour, alors nous comprenons pourquoi Dieu s'est effacé. Dieu ne peut pas à la fois nous demander d'apprendre à aimer et nous retirer nos responsabilités. Dieu a remis Sa Toute-Puissance entre nos mains.

Alors face à ce cri : “Mais Dieu, que fait-il ?”, nous pouvons entendre un autre cri : “Viens. J'ai besoin de toi. Viens tailler Ma vigne. Viens récolter Ma moisson. Prends soin de Mes brebis”. C'est surtout Dieu qui prie l'homme. Il n'est pas toujours exaucé !

“Il y a beaucoup d'appelés et peu d'élus”. Ces paroles ne sont pas à entendre comme une limitation des entrées au ciel, mais comme une convocation à servir ici et maintenant. Ce n'est pas une exclusion, c'est une plainte. Dieu ne manque pas de lancer des appels. Ce sont les réponses qui manquent à Dieu ! Tous ont vocation à aimer ; peu y répondent. Tous sont appelés. Mais toi viendras-tu ?

S'il y a parmi vous un jeune homme ou une jeune fille qui rêve de donner un sens à sa vie, qu'il entende les appels qui montent de l'immense douleur humaine. "L'amour n'est pas aimé." Il y a trop de haines, trop de blessures, trop d'injustices, de solitudes !

Ce qui m’étonne, parfois, c’est d’avoir dit, paraît-il, une, deux paroles dont je ne me souviens même plus et que le Seigneur a employées pour faire son chemin en tel ou tel cœur. Et il ne cesse de répéter : qui enverrai-je porter ma parole ?

Ne laissons pas mourir l'Espérance. Soyons des témoins de ce monde nouveau où Dieu effacera toute larme de nos yeux. Découvrons encore et encore les trésors inouïs que le Pasteur et Sauveur du monde a mis à la disposition des hommes. Dieu peut rendre fécond, au centuple  tout ce que l’on peut faire en Son nom.

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