mercredi 15 août 2018

Regarder Marie... et prendre la route !


 Assomption 18/A

"Une femme ayant le soleil pour manteau... "? nous dit le livre de l'Apocalypse.  Voilà une évocation pour le moins mystérieuse !
      
Cette femme vêtue de soleil désigne-t-elle Marie, la Mère du Messie ? On peut, à bon droit, le penser. Mais à lire le travail de gens compétents, certains versets du passage que nous venons d'entendre donnent le sentiment qu'il peut être également question ici du "peuple de Dieu", de l'Église, de l'Eglise d'aujourd'hui personnalisés par cette femme.  Alors... Marie ? Le peuple de Dieu ?... L'Église ?

L'auteur de l'Apocalypse n'est pas le seul à entretenir un certain "flou". St Luc, lui aussi, prend plaisir à "brouiller les cartes" dans le Magnificat (Evangile). Est-ce la prière de Marie, ou la prière d'un peuple ?
      
Marie parle bien d'elle-même au début. C'est elle dont l'âme exalte le Seigneur, dont l'esprit exulte en Dieu son Sauveur. Elle parle d'elle quand elle évoque la servante sur qui le Seigneur s'est penché, ce qui souligne la préférence de Dieu pour les humbles, les petits. Elle a confiance en cet amour divin qui dure : "Tous les âges me diront bienheureuse !" - "Tous les âges !"…
      
Mais quand elle poursuit sa prière, ce n'est plus d'elle seule dont il est question, mais d'un peuple. C'est sur un peuple que Dieu étend son amour. "Son amour s'étend d'âge en âge sur ceux qui le craignent". Un amour qui dure... "D'âge en âge" ! Et dans ce peuple, il est question des puissants qui sont renversés et des humbles qui sont relevés.
      
Ainsi, dans la première partie du Magnificat, la servante, c'est Marie. "ll s'est penché sur son humble servante...".
Et à la fin du Magnificat, le serviteur, ce n'est plus Marie, c'est le peuple de Dieu, Israël. "ll relève Israël, son serviteur..."
    
Comme si Luc, en mettant dans la bouche de Marie le Magnificat, voulait nous dire avec la même ferveur que l'auteur du livre de l'Apocalypse : "Quand je vous parle de Marie, je vous parle en même temps de vous... Allez ! Regardez Marie, et prenez la route."

Regardez Marie à l'Annonciation. Marie est tout étonnée quand l'ange Gabriel vient à elle. Elle a autre chose en tête que cet appel bousculant de son Seigneur. Beaucoup d'iconographies la représentent, à cet instant solennel, occupée aux simples travaux quotidiens. Elle écoute cependant l'appel. Elle interroge, cherche à comprendre. Mais elle fait confiance avant d'avoir tout compris.

Regarder Marie et prendre la route ...
Oh ! si aujourd'hui nous pouvions
nous étonner des appels si divers  de Dieu,
nous étonner davantage des gens - souvent très différents mais complémentaires - que Dieu appelle,
nous laisser surprendre par sa préférence pour les petits, pour les humbles...
Et pourquoi ne pas nous laisser déconcerter par les appels de Dieu en nos vies, en particulier à ces moments où nous nous y attendons le moins : nous avions d'autres projets, d'autres espérances, d'autres préoccupations. Voilà que Dieu fait signe...! Une rencontre, un événement, une parole qui résonne au plus intime de nous-mêmes.
Commençons déjà alors par ne pas dire ou penser: "Je suis trop petit, je ne suis pas assez compétent, je suis trop jeune, je suis trop vieux..." Comme Marie, cherchons à comprendre. Interrogeons. Acceptons que le Seigneur puisse faire  appel à des petits, à nous-mêmes. Et alors, comme Marie, faisons lucidement confiance avant même d'avoir tout compris.

Il y a l'Annonciation. Il y a aussi la Visitation.
Regardons Marie à la Visitation. Marie s'émerveille... de ce que Dieu peut faire dans sa vie comme dans celle d'Élisabeth, comme dans l'histoire de tout un peuple.
Et alors Marie se met en route. Elle le fait rapidement. Une traduction de mon enfance disait : "Marie partit en diligence !". Et avec un humour inconscient, je comprenais que Marie était partie en une diligence ! Aussi, en moi-même je m'écriais : "Alors ! Fouette cocher !". Peut-être qu'en certaines circonstances, le Seigneur nous recommande cette diligence-là !
En tous les cas, la rencontre de Dieu met Marie en route à la rencontre d'autres personnes pour partager leurs vies, leurs espoirs, leurs inquiétudes, leurs Joies.

Regarder Marie et prendre la route.
Oh! Si aujourd'hui nous pouvions, à la manière de Marie,
nous émerveiller davantage de la présence de Dieu en nos vies comme en l'histoire des hommes,
vérifier que la rencontre de Dieu nous met bien en route vers d'autres, met l'Église en capacité de partager joies, espoirs, angoisses, tristesses des hommes, nos frères.

Annonciation... Visitation... Deux événements de la vie de Marie. Et pourtant il y est déjà question du terme de sa vie terrestre. Il y est déjà question de l'Assomption que nous fêtons aujourd'hui.

Cette élévation de Marie au ciel n'est pas dans la foi de l'Église un geste simplement merveilleux ! Au contraire ! Assomption veut dire "prendre avec soi".
Dès l'Annonciation, Dieu a proposé à Marie de la prendre avec lui dans la mesure où elle se laissait librement habiter par son amour.
Dieu propose toujours ; l'homme répond librement. Et c'est la fidélité de cette complicité, de cette alliance entre Dieu et Marie que nous fêtons aujourd'hui.

Regarder Marie et prendre la route.
L'auteur de l'Apocalypse, St Luc et la tradition de l'Église nous redisent aujourd'hui que cette libre complicité peut être la nôtre, que cette proposition d'alliance nous concerne. Nous sommes le peuple de l'alliance. Voulons-nous répondre à la proposition de Dieu de "nous prendre avec lui".

Regarder Marie et prendre la route, nous aussi ! Dieu a appelé Marie. Il ne cesse de nous appeler, nous aussi, à travers mille "annonciation" et mille "visitation", avant d'opérer en nous une "assomption" qui nous fera "être avec lui pour toujours". St Paul avait cette aspiration : "Je voudrais bien m'en aller, disait-il, pour être avec le Christ..." (Phil. 1.23) Allons-nous répondre aujourd'hui à l'appel du Seigneur ?

Regarder Marie et prendre la route, nous aussi !
Tu es belle, Marie. Avec toi, nous prions le Seigneur pour toutes celles et ceux qui se laissent étonner par l'appel déroutant de Dieu dans leur histoire, un appel à l'assomption de toute leur vie.

Te regarder Marie, et prendre la route. Je vous salue, Marie ! Veuillez nous aider à prendre la route avec le Seigneur qui, un jour, nous prendra pleinement avec lui !

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