lundi 6 août 2018

Pour notre foi... en notre transfiguration !


Transfiguration 2018/B

Si la confession de Pierre à Césarée qui précède l’épisode de notre évangile d’aujourd’hui (selon St Matthieu)
- est l’un de sommets de la vie du Seigneur puisque Pierre – un homme - proclame Jésus “Fils de Dieu”,
- le ré-cit de la Transfiguration est encore plus important ; car là, c’est Dieu, le  Père, en personne, qui le reconnaît comme tel.
             
Dans cette lecture nous est enseigné, en effet, tout le mystère d’un Dieu fait homme. “Dans l’éclat glorieux d’un instant nous est manifesté ce à quoi avait droit, dès l’Incarnation, Notre Seigneur, ce dont il se dépouillait volontairement, pour remplir sa mission de Rédempteur” (Dom Delatte).
Bien sûr, Jésus conservait en son âme cette gloire qui lui revenait en tant que Dieu ; mais elle ne rejaillissait pas sur son corps. Par amour et libre choix, il s’était dépouillé de cette richesse de gloire qui aurait dû, normalement, resplendir sur toute sa personne. "Lui qui était de condition divine, dira admirablement St Paul (Phil 2.6), il s’est anéanti en prenant la condition d’un homme". Volontairement, en choisissant l’anéantissement, Jésus a “caché” sa divinité !
             
Aussi, St François de Sales a raison de dire que le mystère de la Transfiguration ne fut pas un miracle, mais plutôt une cessation de miracle”, de ce miracle qui consistait dans “la suspension et la mortification de la gloire du Christ” en tant que Dieu (Bérulle).
             
Oui, Jésus est vraiment le “Fils de Dieu” : “Celui-ci est mon Fils bien-aimé !”. Jésus est vraiment Dieu. Et tel apparaît-il en ce moment de la Transfiguration.
Aussi, dans le langage traditionnel de la Bible, bien des éléments de cette scène veulent traduire cette présence de Dieu auprès des hommes :
- la mention de la montagne, lieu traditionnel de la rencontre avec Dieu,
- celle de la nuée, à travers laquelle Dieu se manifestait souvent aux Hébreux,
- celle de la lumière, rayons de la gloire divine, comme au Sinaï.
St Jean dira que le Christ, “Lumière née de la Lumière”, Lumière qui va rayonner, est venu pour éclairer tout homme vivant dans les ténèbres.

Et les apôtres qui sont de ces hommes qui "cherchent la face de Dieu", sont rassasiés par cette Lumière de Gloire qui émane du visage de Jésus. Ils en garderont un souvenir inoubliable.
- St Pierre écrira plus tard : “Nous avons été les témoins oculaire de sa Majesté, car il reçut de Dieu le Père, honneur et gloire quand se fit entendre cette voix  : ‘Celui-ci est mon Fils bien-aimé’. Nous-mêmes avons entendu cette voix venant du ciel quand nous étions avec lui sur la montagne sainte”.  (2 P. 1.16-18)
- Et St Jean affirmera de son côté : “Nous avons contemplé sa gloire, gloire qu’un Père donne à son Fils unique”.(Jn 1.14)

             
Jésus manifesta donc sa gloire à ses disciples. Déjà, St Jean en parlant du premier miracle de Notre Seigneur à Cana, avait noté : “Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui. A la Transfiguration comme à Cana, ces manifestations de gloire, chacune à sa manière, sont destinées à affermir la foi des disciples (1). C’est la foi qui conduit à la vision de la gloire divine. Voilà l’enseignement important qui nous est transmis. “Si tu crois, dira Jésus à Marthe avant la résurrection de Lazare, tu verras la gloire de Dieu”. (Jn 11.40)
             
La foi est donc le germe de la gloire. La foi : oui, parce qu’il faut croire que le grain de blé doit être mis en terre et mourir pour porter son fruit. Nous voilà remis au centre même de notre objet de foi : le mystère pascal de mort et de vue que notre intelligence humaine ne peut appréhender en sa totalité.

Pour le Christ - et de même pour nous, chrétiens -, l’insatisfaction, l’humiliation et parfois la souffrance de notre condition humaine doivent être assumées pour parvenir à la gloire divine. Jésus aura même l’audace d’affirmer que l’heure de sa passion est déjà l’heure de sa gloire. “L’heure est venue, dira-t-il au moment de sa Passion, où le Fils de l’homme doit être glorifié”. (Jn 12.23 - Cf Jn 16.32sv). Comme Jésus glorifie son Père par son offrande de lui-même jusqu’à la mort, ainsi le Père va-t-il glorifié son Fils par la Résurrection.
             
La croix et la gloire sont les deux faces d’un unique mystère : Pâques. Et la Transfiguration, en faisant entrevoir quelque chose de la gloire de Jésus, doit préparer les apôtres au scandale de la croix, afin que leur foi qui, dans cette épreuve, doit être, comme dit St Luc (22/31) “criblée comme le froment” ne défaille pas.
             
Quelle leçon pour notre propre foi ! “Que le Christ soit glorifié prouve sa divinité, dira le pape St Léon. Qu’il doive souffrir prouve son humanité”, dira St Léon.
C’est ce que les apôtres, c’est ce que tous, nous devons comprendre. Car si le mystère de la Transfiguration de Notre Seigneur devait affermir la foi des apôtres, il doit fonder aussi notre espérance, l’espérance de toute l’Eglise. Car cet épisode de la Transfiguration manifeste de quelle transformation tout le Corps du Christ - dont nous faisons déjà partie depuis notre baptême - doit être gratifié : désormais, nous pouvons espérer avoir part à la gloire qui a resplendi en Jésus, le jour où se réalisera pour nous également “notre transfiguration”.
             
Comme les trois apôtres, contemplons, nous aussi, la gloire de Dieu qui transparaît sur le visage du Christ. Jésus lui-même l’a dit : “Père, ceux que tu m’as donnés, je veux que là où je suis, ils y soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent la gloire que tu m’as donnée”. (Jn 17.24)
             
Mais pour voir la lumière divine, il faut une certaine “accommodation”, non pas optique, mais de tout notre être, il faut une nouvelle “naissance” : “nul, s’il ne naît d’eau et d’esprit, dit Jésus à Nicodème, ne peut entrer dans le Royaume de Dieu” .(Jn 3.3)
             
Ainsi, Jésus a voulu nous donner dans sa Transfiguration le signe de cette “régénération” que nous devons opérer. Car avant d’être “transfigurés” avec le Christ, une “configuration” avec lui est nécessaire ; et elle ne s’opère que dans et par la foi. Pour voir Dieu, “Père des Lumières” (I Jac 1/17), lui qui “habite une lumière inaccessible” (I Tim 6/18), il faut que nous devenions “des fils de lumière” (Luc 16/8), “que nous soyons transformés en son image, de clarté en clarté par son Esprit” (II Cor 3/18).
Et cette transfiguration ne s’accomplira pas sans une purification ; Jésus l’accorde à ceux qui le suivent en son mystère pascal. Il faut que nous comprenions qu’au milieu des épreuves de la vie présente, - tous, nous en avons -, nous devons solliciter la grâce de les supporter avec constance, avant d’obtenir la gloire divine. “Mais quand le Christ, note vie, apparaîtra au grand jour, alors, nous aussi, nous apparaîtrons avec lui dans la gloire" (I Cor 3/4).

(1) il me plait de rapprocher :
- la phrase de Saint Luc après le "signe" de Cana : "Telle fut le commencement des signes de Jésus. Il manifesta sa gloire ; et ses disciples crurent en lui !'. 'Jn 2.11).
-  Et la phrase du livre de l'exode, après la traversée de la mer Rouge : "Israël vit avec quelle main puissante le Seigneur avait agi... Il mit sa foi dans le Seigneur et en Moïse son serviteur !". (Ex 14.21)

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