32ème
Dimanche du T.O. 16
Croyez-vous vraiment à la résurrection des morts ?
La question est d’importance. Elle n'est pas théorique. Un sondage récent
révèle que plus de 50 % de gens, en France, ne croient à aucun au-delà de la
mort.
Croyez-vous que l'homme en général, et nous tous en
particulier, nous sommes faits pour la mort, ou que nous sommes faits pour la
vie ?
De façon un peu alambiquée, c'est ce que les
Sadducéens demandent à Jésus. Pour eux l'homme est fait pour la mort. Tout
homme qui naît doit mourir. Et “personne
n’est revenu du séjour des morts”. Il n'y a pas de résurrection, ni
aujourd'hui, ni plus tard. C'est un fait d'observation !
Aussi ne voient-ils qu’un seul moyen de survivre,
c'est d'avoir une descendance, un enfant, des enfants pour prolonger la vie,
pour maintenir le nom et garder le souvenir de l'ancêtre. On ne ressuscite pas
! On se suscite une descendance. C'est tout ! Il n'y a pas de résurrection.
Tout juste une succession. C'est le bon sens ! C'est l'évidence !
Ce sera encore cette question qui sera très
débattue entre St Paul, les Sadducéens et les Pharisiens, lors du dernier
passage de l'apôtre à Jérusalem. Ce qui lui vaudra d'être arrêté et envoyé au
procurateur romain à Césarée maritime. Et ce dernier, Festus, de bien comprendre
le litige qu'il lui faut trancher : "Il
s'agit, dira-t-il à son invité le roi Hérode, d'un certain Jésus qui est mort et dont Paul affirme qu'il est vivant
!". (Ac. 25.19). Remarquons qu'il
n'y a pas de meilleure définition du christianisme. Et c'est un païen qui l'a
prononcée : Jésus est bien mort. Mais nous affirmons qu'il est toujours vivant !
Il y a deux
morts
Dans notre évangile, Jésus insistait déjà : Non !
L'homme n'est pas fait pour la mort. Il est fait pour la vie. Il peut ne pas
mourir. Mais attention ! Il y a mort et mort, et il ne faut se prêter à une
confusion !
La première mort, nous la connaissons bien.
Elle vient par usure, et elle est inévitable. C'est la mécanique qui s’épuise.
A un moment, plus ou moins brutal, il faut se séparer. Cette première mort, dit
le Christ, - et il sème le scandale en disant cela - n'est pas la vraie mort.
Elle est un passage. Les chrétiens diront plus tard : elle est une pâque, et
non un point final.
Mais il y a une deuxième mort. C'est la
vraie mort. Celle-là seule est redoutable, car elle supprime le vivant, si l’on
peut dire, de la mémoire même de Dieu. Cette mort est un enfer ; c’est
l’enfer ! L'enfer c’est, en quelque sorte, de ne plus exister du tout,
d'être hors-Dieu, d'être hors-la-vie.
Remarquons, au passage, que ce n'est pas Dieu qui
nous met hors de Lui, hors la Vie qu'il est. C'est l'homme qui affirme, d'une
manière ou d'une autre, que Dieu n'existe pas, que la Vie n'existe pas ! Et,
Lui, Dieu, parce qu'il respecte notre liberté, ne peut que dire : "Que ta
volonté soit faite !".
Et cependant, cette mort n'est pas fatale. On peut
y échapper en nous adressant à Dieu, à la Vie qu'il est pour lui dire
finalement, de manière un peu confuse peut-être : "Que ta volonté, ta
volonté d'amour, ta volonté de vie soit faite !".
Et s’il y a deux façons de mourir, il y a donc deux
façons de vivre, dit Jésus aux Sadducéens et, au-delà d'eux, à nous-mêmes.
Une façon où vivre n'est que survivre. Elle est
sans grande espérance, quasi désespérée ; et on comprend que les sept frères
s'acharnent à procréer !
Et il y a une autre façon où vivre c'est vouloir
éviter cette mort qui nous séparerait de Dieu. Car ceux qui vivent de cette
vie-là, “ils ne peuvent plus mourir, dira
un jour Jésus. Ils sont pareils aux anges
car ils sont fils de Dieu étant fils de la résurrection”. (Lc 20,36). “Pareils
aux anges” veut dire précisément “être
avec Dieu”. C’est une expression comme une autre pour exprimer ce mystère,
comme l’expression : être “fils de
Dieu”, où être “fils de la
résurrection”. Jésus récuse donc cette histoire des sept frères qui, sans y
parvenir, veulent à tout prix une descendance, et qui utilisent une femme, non
pour l'aimer mais pour en avoir un enfant.
Et Jésus leur oppose l'exemple d'Abraham. Abraham, souvenez-vous, c'est cet homme qui a
eu un fils dans sa vieillesse. Et il pense - selon la mentalité de l'époque -
que Dieu lui demande de sacrifier ce fils. Tuer sa descendance, lui, le
vieillard qui avait bien failli mourir sans descendance ! C'est vraiment se
rayer des vivants. Or Abraham part pour le faire. Pourquoi ? Parce que pour
vivre, il fait davantage confiance en son Dieu qu'en son fils. Ce ne sont pas
les enfants qui font la vraie vie, se dit Abraham, c'est le Dieu vivant ! Dieu
disposera. Aussi, à cause de sa foi, Dieu a-t-il aimé Abraham. Il en a fait le
père des vivants, de tous ceux qui dès aujourd'hui vivent de cette vie qui
échappe à la seconde mort.
De même en est-il des sept frères martyrs d'Israël (1ère lecture). Ils préfèrent la mort
qui vient des hommes plutôt que la trahison entraînant la mort qui les priverait
de Dieu.
Il y a une
vie qui ne meurt pas
Et Jésus nous redit sans cesse cette parole, à laquelle
Abraham a cru par avance, parole que nous négligeons d’entendre parce qu’elle
nous inquiète au lieu de nous apaiser, même si cette parole est de celles dont
nous avons le plus besoin.
Oui, Jésus nous redit cette parole
aujourd’hui : Il y a une vie qui ne meurt pas ! Il y a une vie
éternelle ! D’ailleurs, combien de fois a-t-il pris la peine de la dire, cette
parole !
“Qui mange ma
chair vivra à jamais”, dira-t-il après la multiplication des pains (Jn 6,51) .
“Qui boit de
cette eau que je donnerai, dit-il à la Samaritaine, deviendra en lui source de vie éternelle”. (Jn 4,14)
“Celui qui
voit le Fils et croit en lui possède la vie éternelle”. (Jn 6,40).
Et puis cet autre passage où il est encore question
d'Abraham : “Si quelqu'un garde ma
parole, il ne verra jamais la mort”. Les gens lui dirent : “Maintenant nous savons que tu es fou.
Abraham est mort, les prophètes aussi, et tu dis : Si quelqu'un garde ma parole
il ne goûtera jamais la mort. Es-tu plus grand qu'Abraham, notre père qui est
mort ? Qui prétends-tu être ?”. Et Jésus de répondre en quelque
sorte : Non, Abraham n'est pas mort ! Il est vivant, et il n'est pas votre
père, car il est le père des vivants, et vous vous êtes des morts-vivants, vous
qui cherchez à me faire mourir pour me faire taire ! (Cf. Jn 8).
Vous êtes
faits pour vivre
A nous que la mort préoccupe parfois, c’est à nous
que Jésus adresse cette parole. Elle fonde notre espérance. Oui, nous croyons
le Ressuscité, quand il nous dit : Vous êtes faits pour la Vie ! Non pas
pour une survie éphémère, mais pour une vie éternelle, celle-là même que Dieu
seul peut donner, sa Vie, sa Vie divine ! La vie n'est pas une question de
durée, ni de santé. ni de réussite ou de descendance. La vie, c'est d'“être
avec Dieu”. Elle est offerte à tous.
Et en ce sens, il y a déjà des vivants parmi nous.
Nous les appelons les saints, et ils sont nombreux, même s'il y a, hélas, des
morts parmi les vivants, de ceux qui oublient Dieu et leurs frères et même qui
les exploitent, les torturent et les tuent : ils piétinent la vie et leur
faute est vraiment mortelle. Nous le constatons bien, hélas, en notre monde !
Telle est notre espérance : Il y a une résurrection.
Nous la tenons de Dieu lui-même qui est un Dieu des vivants, et non des morts.
Cette parole, - St Paul le disait déjà - est folie pour beaucoup. Mais pour
nous elle est salut.
Et je la redis, cette parole, pour renouveler notre
courage et notre patience. Voilà pourquoi nous ne devons pas quitter des yeux,
quelle que soit notre faiblesse, notre maladie, notre sentiment d'échec ou
notre solitude, l'icône du Christ ressuscité. Nous l'avons solennellement
chanté Mardi dernier, en la fête de tous les Saints : Jésus est le premier-né
d'une immense foule de vivants qui chantent inlassablement la gloire de notre
Dieu.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire