6 Août - Transfiguration,
"Ils ne virent plus que jésus seul !".
L'évènement
de la vie du Seigneur intitulé "La Transfiguration" est à la fois un mystère
de solitude et de communion : Jésus est "avec" ; et Il est
"seul" !
- Il est
avec Moïse et Élie. Il est avec Pierre, Jacques et Jean. Il est avec son Père
qui lui parle.
- Mais Il
est aussi tout seul : "Ils ne virent
plus que jésus seul !".
Et comme le
Christ, chacun doit en effet accomplir sa destinée à la fois seul et avec
d'autres, personnellement et communautairement.
D'ailleurs,
le modèle de toute société - pour un chrétien du moins -, n'est-il pas le
mystère de la Sainte Trinité ?
- Chaque
personne est distincte ; chacune s'engage et dit "Je" à son tour.
C'est la vraie solitude, celle du Père, "un seul Père", celle du Fils, "un Fils unique", celle
de l'Esprit, "dans l'unité d'un seul
Esprit".
- Mais, en
même temps, chacune de ces Personnes est tellement donnée aux autres qu'elles
ont en commun une même existence. C'est la communion absolue, "moi en toi, toi en moi"
disait Jésus (Jn 17.11), dans
l'affirmation d'un "nous" !
Et le "Fils Unique", en venant
sur terre, a voulu vivre dans ses relations humaines cette éternelle
tension entre solitude et communion.
La
Transfiguration est le sommet d'une vie solitaire et d'une vie partagée. La croix qu'elle annonce en
sera l'achèvement.
- Au
Golgotha c'est le moment où jésus a été plus seul que jamais, face au
Père, face aux hommes.
Et c'est le moment où il a été plus lié que
jamais : Par le sacrifice de sa vie pour les autres, il reçoit la gloire de
devenir le "Frère aîné d'une
multitude de frères" (Rm 8.10). "Quand j'aurai été élevé de terre,
lui fait dire St jean (élevé sur la croix, élevé au ciel par l'Ascension), j'attirerai tous les hommes à moi" (Jn 12, 32).
En cette
fête de la Transfiguration, je vous propose de parcourir les évangiles en
découvrant ce va-et-vient entre "le Jésus seul" et "le
Jésus avec les autres".
Très
souvent, il est dit dans les évangiles que Jésus se retirait dans un "désert",
ayant besoin de silence, de solitude et même de repos. Mais les foules le
recherchent. Il les accueille. les instruit. Il guérit les malades. Jésus ne
fuit pas les contacts. Il est l'homme "livré aux autres".
Il en est
ainsi à chaque instant de la vie de Jésus : il se retire et il revient !
Quand Jésus
se retire dans la solitude du "Grand Nord", près des grandes
montagnes de l'Hermon, avec seulement les douze apôtres - la foule et les
disciples l'ayant abandonné -, c'est en cet instant, en cet endroit désert
qu'il fonde une "communion", son Eglise sur la parole
de foi de son apôtre Pierre. Toujours ce mystère de solitude et de communion !
Et sur la
montagne de la Transfiguration, Jésus se retrouve avec Elie et Moïse. Ce
sont les deux grands solitaires de l'Ancien Testament, les retirés du
désert sur la montagne de Dieu. Mais Moise et Élie sont aussi des meneurs
d'hommes, des rassembleurs du peuple autour du Dieu Unique. On retrouve
toujours la même loi : plus on est seul, seul avec le seul et unique Dieu,
et plus on est lié à ses frères.
Et, en cet
évènement lumineux de la Transfiguration, Pierre, qui se trompe une fois de
plus, croit que le Royaume est arrivé. La solitude est finie ; on va dresser trois
tentes avec Moïse et Élie, et demeurer là, toujours, sur la montagne, loin des
foules et des combats de l'existence. L'Église à peine née a failli devenir une
secte. On est bien entre nous, on s'entend bien, alors on se réfugie dans un
coin bien chaud, à l'abri du monde et de ses problèmes. Jésus les fera
descendre de la montagne avec Lui pour retrouver les foules et marcher vers la
Croix.
Certes, on
diré que Jésus sur la montagne de la Transfiguration n'est pas seul, mais
avec le Père qui lui parle : "Celui-ci
est mon Fils bien-aimé. Il est tout mon amour". Jésus est l'être "lié"
par excellence, relié à Dieu, comme un Fils à son Père. Il n'est donc jamais
seul. Et cette gloire de Fils qui n'était pas apparente, éclate aux yeux des
témoins privilégiés.
Et pourtant,
en même temps, la Transfiguration est aussi la révélation de la solitude, ou mieux de la distinction du Fils.
Un fils, par définition, est celui qui un jour, s'il veut devenir grand, s'il
veut dire "Je" au singulier, ne doit plus compter sur les autres, ni
sur son père, pour accomplir son destin, mais uniquement sur lui-même.
C'est
pourquoi Jésus dira à l'agonie : "Non
pas ce que je veux, Père, mais ce que tu veux". Il est "avec",
avec son Père pour accomplir sa volonté !
Mais sur la
croix, Il déclarera : "Mon Dieu, mon
Dieu, pourquoi m'as-tu abandonné ?". Il est seul.
Sa mort - et notre propre mort le sera
sans doute - est un mystère de solitude et de communion.
C'est le
moment où ce n'est plus le Père qui parle, mais le Fils qui prend la parole en
son propre nom et dit, à l'égard de son Père : "Je Suis !". - "Personne
ne m'enlève la vie, mais je m'en dessaisis de moi-même. J'ai le pouvoir de m'en
dessaisir et le pouvoir de la reprendre...Tel est le commandement que j'ai reçu
de mon Père !" (Jn 10.18). C'est l'affirmation suprême de
sa personnalité de "Fils". Cette vie reçue du Père, et que les hommes
veulent m'arracher, dit-il, c'est Moi, Moi seul, qui la donne librement.
Et il faut que le Père se retire pour que le Fils, en le mystère même de son
incarnation, devienne pleinement Fils, distinct de Lui, et puisse abriter à son
tour en son propre cœur tous les enfants de Dieu dispersés.
Mais la Transfiguration
annonce et proclame aussi cette gloire de l'égalité parfaite dans la puissance
de l'amour entre le Père et le Fils.
Et nous, dans le quotidien de nos vies,
comment allons-nous équilibrer notre vie dans l'alternance des temps de désert,
de solitude avec Dieu, avec l'expérience d'une vie partagée, en
famille, dans les communautés, les groupes divers, bref en cette Eglise
que le Christ a voulu ouverte à l'immense foule des hommes ?
Notre monde
ressemble trop à une société anonyme, malade de l'individualisme ou du
collectivisme, où l'homme n'est plus qu'un numéro. Il est temps d'enlever ces
caricatures et de retrouver sur chaque visage incomparable le Visage ensoleillé
du Transfiguré, c'est-à-dire du Ressuscité, qui nous fait déjà "fils de
Dieu", parce que, désormais" frères du "Fils Unique" d'un "Unique
Père" dans l'unité d'un "seul
Esprit".
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