EPIPHANIE 88 / B
Il
y a quelque chose de profondément mystérieux et même de dramatique dans ce
récit de l'Epiphanie : les mages, des païens, arrivent à Jérusalem d'un
pays lointain et, sans avoir jamais entendu parler du vrai Dieu, ils
reconnaissent dans le petit enfant de Bethléem son envoyé, le Sauveur promis
par Dieu.
Et
au même moment, les responsables religieux de Jérusalem qui sont sur
place, qui sont croyants, qui connaissent le vrai Dieu, restent parfaitement
indifférents à la nouvelle de la naissance de Jésus : ils ne se dérangent même
pas ; plus tard, ils rejetteront le Messie.
Ce
récit est donc un peu comme une prophétie, comme une annonce de ce qui se
passera par la suite : globalement, le peuple juif, le peuple croyant rejettera
Jésus ;
En
revanche, ce sont des étrangers, des païens, qui se convertiront au
Christ et qui constitueront par la suite le nouveau Peuple de Dieu.
Il
y a là comme un mystère : le mystère
de la foi et le mystère de l'incroyance;: ce sont les plus lointains
qui découvrent Jésus, et ce sont les plus proches - disons les croyants
traditionnels -, ceux qui semblaient les plus prêts à l'accueillir, qui finalement
le rejettent.
Et
cette situation ne doit-elle pas nous interroger ? Car ne sommes-nous pas, nous
aussi, de ces croyants traditionnels : nous croyons en Dieu, mais
accueillons-nous véritablement Jésus et son message ?
Dans
ce récit de l'Evangile, une première chose est frappante, me semble-t-il:
les Mages, tout païens qu'ils sont, sont
en recherche du vrai Dieu qu'ils ignorent. Les croyants de
Jérusalem, eux, s'imaginent le posséder, le connaître une fois
pour toutes: ils sont satisfaits, contents d'eux-mêmes, sûrs de leurs
certitudes, sûrs de leur savoir religieux. On leur demande où doit naître le
Sauveur; ils ont immédiatement la réponse ; ils estiment ne rien avoir à
apprendre des autres…, ni même du Saint-Esprit.
Et
pourtant, la Bible ne leur dit-elle pas sans cesse : "Cherchez le Seigneur, recherchez toujours sa face!… Cherchez le
Seigneur et vous vivrez!… Recherchez le Seigneur, il se laisse trouver!"
(Ps 68
- Is 55/6).
Les
Mages, eux, ont faim et soif de Dieu ; ils cherchent à le découvrir: "J'ai soif de Dieu, du Dieu vivant!
Quand pourrais-je découvrir sa face?"
Pour
trouver quelque chose ou quelqu'un, il faut le chercher. Si je ne cherche pas,
je passerai à côté sans le voir. Ce jeune homme qui a remarqué une jeune fille,
va-t-il attendre passivement qu'elle vienne vers lui ? Au contraire, il
cherchera à la rencontrer à nouveau, à faire sa connaissance et à la
fréquenter. C'est ainsi que s'établit toute relation.
Pour
trouver Dieu, pour découvrir le Christ, il faut chercher. Les autorités juives de Jérusalem
s'imaginaient avoir trouvé Dieu parce qu'elles connaissaient leur doctrine
religieuse. Mais Dieu n'est pas une doctrine ; Dieu n'est pas une
idéologie. Dieu est quelqu'un ; et on n'a jamais fini de le connaître.
Comme dit St Paul, ici-bas, nous ne le connaissons que d'une manière confuse,
comme à travers un mauvais miroir. D'ailleurs, même entre nous, qui nous
connaît parfaitement? Personne. A plus forte raison pour Dieu!
Une
deuxième chose est frappante à propos des Mages : ils avaient certainement
leurs croyances personnelles, leur manière de penser, leur mentalité. Or, ils
n'hésitent pas à "se remettre en question", comme on dit, pour aller
à la recherche du vrai Dieu. Ils quittent leur pays, ils quittent leur famille,
ils partent pour un long voyage qui les mènera ils ne savent où. Ils ne sont
pas prisonniers de leurs idées personnelles ; ils sont conscients d'avoir
bien des choses à découvrir. Alors, ils sont prêts, ils sont ouverts à la lumière.
Les
croyants de Jérusalem, au contraire, sont prisonniers de leurs certitudes
; ils sont fermés à tout ce qui leur viendrait de l'extérieur, ils prétendent
tout savoir ; ils se prennent pour Dieu.
Pour
découvrir le vrai Dieu, pour découvrir Jésus-Christ, il nous faut un peu
d'humilité, être convaincus que la vérité nous dépasse, que Dieu nous
dépasse, et Jésus-Christ aussi. Personne ne détient toute la vérité, nul n'en
est propriétaire; ceux qui croit en avoir découvert quelques lueurs, qu'ils
continuent donc à chercher humblement avec les autres, avec tous ceux qui, eux
aussi, croient en avoir découvert quelque chose.
Le
vrai Dieu est surprenant. Il ne correspond pas toujours à nos idées toutes
faites.
Le
message de Jésus, de même, ne répond pas toujours à ce que nous attendrions,
quand il parle par exemple des pécheurs et des prostituées qui parviendront
avant les autres dans le Royaume.
Et
l'Esprit de Dieu bouscule souvent également les "bons principes" qui
sont les nôtres.
La
découverte du vrai Dieu, la rencontre de Jésus-Christ, c'est le début d'une
aventure jamais terminée, une aventure qui mène on ne sait où. Mais
comme les Mages, il ne faut pas avoir peur, pour s'y lancer, de quitter nos
certitudes un peu trop confortables.
Mais
il y a surtout une troisième chose nécessaire pour découvrir Jésus-Christ; une
troisième chose toute simple, mais c'est la plus difficile. Il faut faire comme
les premiers apôtres de Jésus : se mettre à son écoute, le contempler
et commencer à le suivre sans attendre d'avoir parfaitement découvert
qui il est.
Oui,
c'est ce qu'ont fait les premiers apôtres: ils ont suivi Jésus, ils se sont
attachés à Lui; ils sont devenus ses disciples; et c'est longtemps après qu'ils
ont vraiment découvert que cet homme Jésus, c'était le Messie, l'Envoyé de
Dieu, et même le Fils de Dieu.
Jésus
disait un jour: «Celui qui fait la vérité vient à la lumière».
Cela
veut dire: Pour trouver la pleine lumière, pour découvrir qui est Jésus-Christ,
commence donc par le suivre dans ses solidarités avec les petits, les pauvres,
tous ceux qui souffrent et tous ceux qu'on rejette !
Pour
découvrir peu à peu qui est Dieu, commence donc par suivre Jésus-Christ dans sa
prière à Dieu son Père, en priant toi-même avec Lui et comme Lui dans le secret
de ton cœur, et tu viendras à la lumière !
Pour
découvrir ce qu'est l'Eglise, commence donc par rejoindre quelques chrétiens
pour créer avec eux une communion agissante de foi et d'amour; et tu parviendras
à la lumière!
Oui
pour découvrir ce que c'est que d'être chrétien, il faut commencer par suivre
Jésus-Christ en essayant de vivre comme Lui.
La
lumière de Dieu, la lumière de Jésus… n'est pas au bout de discussions ou
d'idées savantes ; elle vient dans la foulée de l'amour et de la vie
; elle jaillit de ce que l'on fait, des engagements que l'on prend, et de la
manière dont on aime, à la suite de Jésus-Christ!
Aujourd'hui,
c'est la fête des Mages, c'est la fête de tous ceux qui cherchent Dieu
et qui se mettent en route à la découverte de Jésus-Christ!
Demandons
au Seigneur de creuser en nous cette soif de Dieu qui stimulera notre
recherche.
Prions
surtout pour nos frères incroyants qui, comme les Mages, sont attirés par Jésus
et cherchent à le connaître.
Prions
pour les Jeunes qui nous entourent. Comment pourront-ils découvrir et
rencontrer la vraie lumière, Jésus et son message ? N'avons-nous pas, là, une
responsabilité ?
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