lundi 11 novembre 2019

Après la mort... !


 32 e Dimanche 19/C

La mort dont il est question aujourd'hui, comme elle nous rejoint parfois avec cette cruauté particulière lorsqu'elle fauche des êtres en pleine jeunesse. Et en ce mois de Novembre où l'on pense à nos défunts, vous êtes peut-être habités par le souvenir d'un visage trop jeune pour avoir quitté ce monde.
Il y a une véritable provocation dans la mort d'un être jeune. La vie ne doit-elle pas se prolonger en ceux qui nous suivent ? Et, au cimetière, devant la dureté des pierres tombales qui séparent comme un mur les morts des vivants, une question lancinante monte de nos cœurs : où sont-ils donc ?

La Parole de Dieu nous apporte aujourd'hui force et  douceur.
Elle seule est capable de rejoindre en nous-mêmes le scandale de la mort.
Elle nous affirme que notre vie a plusieurs dimensions :
- Une dimension familiale : on a tous des parents, des enfants, un conjoint…
- Notre vie a aussi une dimension professionnelle : on est étudiant, menuisier, cultivateur… et que sais encore !
- Elle peut avoir aussi une dimension artistique : on joue de la flûte, on chante, on danse, on fait de la peinture…
- Elle peut avoir encore une dimension sportive…

Mais notre vie a aussi une dimension spirituelle, religieuse. Une vie d'homme, c'est quelque chose de beau, de riche… Mais nous savons bien, en même temps, que cette vie, ce n'est pas nous qui nous la sommes donnée. Nous l'avons reçue par nos parents, avec un capital de santé, d'intelligence, de courage, de talents. Tout cela est à nous, mais tout cela vient d'ailleurs et nous dépasse.

Et tout cela, en même temps, est fragile, à la merci d'un échec, d'un accident. Nous sommes limités dans nos possibilités, dans notre intelligence, notre santé…
- Notre vie est bien à nous sans être totalement à nous. Nous n'en sommes pas les maîtres absolus. Elle vient d'ailleurs
- Et n'est-elle pas faite aussi pour aboutir ailleurs ?  C'est le sens de cette parole de Notre Seigneur, aujourd'hui: "Dieu n'est pas le Dieu des morts, mais le Dieu des vivants, car tous ont par lui la vie". Notre vie, même si nous la menons comme nous l'entendons, vient de Dieu et va ailleurs : c'est ce que l'on appelle la "résurrection des morts", la "résurrection de la chair".

Eternelle question qui divise les hommes : "Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas", comme dit le poète  (Louis Aragon). Éternelle question : les lectures de cette messe en témoignent; et Paul le dit : "Tous n'ont pas la foi !".
Certains Sadducéens, au temps de Jésus, ne croyaient pas à la résurrection.
Il en est de même chez nous !
Et pourtant, la première lecture nous montre la foi admirable de Juifs persécutés deux siècles avant Jésus-Christ. L'extrait que nous avons entendu mériterait d'être prolongé : "Ce n'est pas moi, disait une mère à ses fils qu'on allait tuer, ce n'est pas moi qui vous ai gratifiés de l'esprit et de la vie… Aussi bien, le Créateur qui a opéré la naissance de l'homme et qui préside à l'origine de toutes choses, vous rendra-t-il et l'esprit et la vie…".

"Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas !"… 
Oui, éternelle question qui nous est posée à nous aussi : où sont-ils les amis que l'on aimait tant ?
La réponse, c'est le cœur même de la foi chrétienne, l'essentiel du christianisme. La réponse, c'est la foi en Jésus ressuscité, toujours vivant, et en sa parole : "Celui qui croit en moi, fût-il mort, vivra !".
         
Mais que signifient au juste ces mots: "résurrection des morts"? - Il serait ridicule d'y voir un phénomène biologique, comme un retour en arrière… Non, la résurrection des morts n'est ni un phénomène biologique, ni un retour en arrière, comme l'imaginaient les Sadducéens.
C'est une réalité toute spirituelle. C'est un bond en avant vers une plénitude de vie qui nous dépasse ac­tuellement.
Il n'y aura plus de limites à nos affections, à nos amitiés, à nos connaissances… "Dieu essuiera toute larme de nos yeux, dit l'Apocalypse… De mort, de pleurs, de cris ou de peines, il n'y en aura plus!"..

Dieu sera tout en tous, et l'amour sera tout en chacun. Nous serons parfaitement transparents les uns aux autres. Ce sera joie d'aimer, de comprendre, de découvrir tant de ri­chesses insoupçonnées en ceux que nous avions cru bien connaître ici-bas. Tel sera le monde de Dieu auquel nous sommes appelés à naître, le jour de notre mort.                    

Je sais bien : la vie d'un homme se prolonge en ses propres enfants ; et c'est pourquoi la mort de l'un d'eux est un contre-sens. C'est vrai. Mais écoutons Jésus : "Les enfants de ce monde se marient. Mais ceux qui ont été jugés dignes d'avoir part au monde à venir et à la résurrection d'entre les morts ne se marient pas car ils ne peuvent plus mourir : ils sont semblables aux anges, ils sont fils de Dieu étant héritiers de la Résurrection".

En ce texte un peu énigmatique, il y a d'abord cette affirmation : la vie d'un homme vaut par elle-même et n'a nul besoin d'être justifiée par une descendance, comme le pensaient les Sadducéens. Chacun de nous a une identité personnelle dont le destin dépasse les limites du monde présent. Le vrai problème de la vie dépasse nos divers engendrements. Et, si cruelle qu'elle soit, la mort de l'un des nôtres, en est un signe provocant.

De plus, je pense à ceux, à celles qui choisissent, dès ce monde-ci, de ne pas se marier pour témoigner de ce Royaume de Dieu où chacun de nous est destiné à vivre autrement que dans les conditions de la vie actuelle.

Celui qui croit en Jésus vivant, qui croit en la vie éternelle au-delà de la mort, celui-là vit autrement sur la terre : il sait que la vie sur la terre est un pèlerinage dont le but est ailleurs. Il sait, celui-là, que le véritable trésor, ce n'est ni l'argent, ni le pouvoir, ni les honneurs, c'est l'amour ; l'amour désintéressé,
l'amour qui s'oublie et se sacrifie,
l'amour qui pardonne et reconstruit,
l'amour  qui sauve et fait vivre,
l'amour pur, noble, fort !

C'est cela la valeur suprême, l'amour même dont Jésus nous a aimés. C'est cela qui nous fait déjà vivre de la vie divine, par-delà notre propre mort. Car la vie éternelle est déjà commencée pour celui qui croit au ciel ; il en vit, dès maintenant. Et quand vient sa dernière heure, il ne s'agit pas tant de sa mort que de sa naissance en Dieu en qui tout l'amour de son cœur s'épanouit. Oui, pour celui qui croit au ciel, la mort est un passage : une Pâque vers la résurrection.

Où sont-ils donc les parents, les amis qu'on aimait tant ? Ils sont en Dieu, dans la mesure où ils ont aimé comme Jésus et ont cru en sa parole : "Celui qui croit en moi, fût-il mort, vivra !".
Après la purification nécessaire, ils vivent en Dieu, de la vie de son Esprit.

"Celui qui croyait au ciel et celui qui n'y croyait pas !"… 
La mère admirable de foi avec ses sept fils, méprisant la mort…
et les Sadducéens, sceptiques…

Et qu'en est-il pour nous ? Serions-nous gagnés par le scepticisme qui escamote la mort parce qu'on ne croit pas au ciel?

Le Concile Vatican II nous demande d'être chaque jour témoins d'une vie autre que celle d'ici-bas. Ce dimanche nous rappelle qu'un chrétien, c'est celui qui a choisi de croire au ciel, et qui vit en conséquence.

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