6ème
T.O 18/B -
Il y a comme un double mouvement
dans ce court récit de l’évangile d’aujourd’hui.
- Au début, nous voyons un exclus
qui n’ose s’approcher ; et, à la fin du récit, il parle ouvertement
aux autres.
- Au début, Jésus parle
ouvertement en public. A la fin du récit, il évite les lieux habités
: “Il n’était plus possible à Jésus
d’entrer ouvertement dans une ville”.
I - Oui,
le lépreux, déjà victime d’une pénible maladie, est, pour de confuses raisons
humaines et religieuses, l’”exclu” par excellence. Loin de Dieu et loin
des hommes, le lépreux est l’”impur” par excellence. Sa maladie est un
châtiment divin.
Et Jésus, le “Pur” par
excellence, se penche sur l’”Impur”.
“Pris de compassion”, Jésus souffre
de la souffrance du lépreux. Il va jusqu’à “toucher” le lépreux”, cet
“intouchable” !
Et cette “compassion” du Seigneur va
rendre à cet homme toute sa dignité : il peut aller vers les prêtres, vers les
autres. Il est ré-introduit dans la société. En quelques instants, il
fait une ascension fulgurante.
Tandis que Jésus, lui, par son geste
et ceux qui suivront, commence à se mettre “hors-société”. “Il était obligé d’éviter les lieux habités”.
Jésus touche le lépreux et le mal
change alors de camp, au point que la vie de Jésus est passée au lépreux, et la
lèpre - c’est-à-dire la ségrégation, le mal - est passée sur Jésus !
II -
Mais la lèpre, par sa ténacité, sa virulence, sa contagion, n’est-elle pas
le signe du péché ?
Et, nous sommes tous, à ce propos,
des lépreux. Le péché colle à la peau de l’homme comme une lèpre. Nous en
sommes tous atteints. St Jean affirmera : “Si
nous disons : ‘Nous n’avons pas de péché’, nous nous égarons, et la vérité
n’est pas en nous”. Et d’une telle maladie qui nous guérira, qui nous
relèvera ?
Jésus, le “Saint” par
excellence, lui, de condition divine, dira St Paul, il est descendu jusqu’à
l’homme ! “J’ai vu la misère de mon
peuple…, et je suis descendu pour le délivrer” (Ex 3/7). Par
l’Incarnation, Dieu manifeste son infinie bonté par la vibration d’un cœur
humain : Jésus, est toujours “pris de
compassion”, c’est-à-dire “souffre avec”.
Jésus veut nous “toucher”, pour nous
purifier, nous élever ! Oui, Jésus s'approche, il vient sur cet autel vers
nous. Nous le recevrons, il se laissera toucher (corps et cœur). Et le toucher
de Dieu nous guérira, nous élèvera à la dignité de “fils de Dieu”; Nous
pourrons légitimement nous adresser à Dieu en disant : “Père” ; et nous aurons
une multitude de frères ; nous serons ré-introduits
dans la société même de Dieu, dans la Jérusalem céleste.
Mais n’oublions pas que Jésus, en
nous touchant, s’est fait, à notre place, l’”exclus” par excellence : Le
“sans-péché, s’est fait péché et il mourra, abandonné, hors de Jérusalem,
hors de la ville. Et dès lors, et toujours, et aujourd’hui, il est plus ou
moins un “hors-la-loi” pour les hommes. Jésus Christ n’a pas toujours “bonne
presse” et ses disciples non plus !
III - Mais il y a encore une troisième lecture que nous pouvons
faire de ce merveilleux petit récit :
Car il y a toujours actuellement,
dans notre société, des “lépreux”, des exclus, des “laissés pour
compte”, hommes, femmes, victimes de la méfiance et des préjugés, hommes,
femmes dont on se détourne et dont on préfère ignorer l’existence.
Et nous que le Christ a transformés
en lui, appelés à être de plus en plus à son image, n’est-ce pas à nous,
désormais, à la place du Christ, de “toucher”, de “tendre la main”
pour effacer d’un coup les idées reçues, pour remettre debout l’homme écrasé
par la souffrance. Oui, ayons ce geste : une parole, un regard, une simple
attitude peuvent rendre la dignité à un homme qui se sent exclu d’une manière
ou d’une autre.
Oui, que notre bonté, à l’exemple de
celle du Christ, soit “compatissante”, c’est-à-dire proche de la souffrance.
Notre charité ne doit jamais être condescendante, mais ascendante ; elle doit
anoblir en reconnaissant la valeur de tout homme aux yeux de Dieu.
Pour cela, certes, comme le Christ
lui-même, il faudra se sacrifier, se renoncer, se gêner. Tendre la
main à son frère suppose renoncement…
Pour cela, comme le Christ, nous ne
serons pas toujours compris par notre société moderne ; on pourra parfois être
jugés “hors-la-loi”, hors normes administratives, hors idées reçues, et cela au
sein même de notre famille humaine ou spirituelle.
Mais le disciple n’est pas plus
grand que son maître !
Cependant nous savons ce qui en
résultera : “le lépreux, une fois guéri,
se mit à proclamer et à répandre la Nouvelle”, la “Bonne Nouvelle” du
salut de Dieu pour tout homme : Le Fils de Dieu est descendu jusqu’à
l’homme pour que l’homme soit élevé en fils de Dieu ! Allons, nous aussi
proclamer par nos paroles, par nos actes et par toute notre vie la Parole de
Dieu, source de salut pour tout homme.
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