Octave de
Pâques - Mercredi
La guérison de l’infirme se fait à l’entrée du temple, hors du temple. Il faut se rappeler que les infirmes n’entraient pas dans le temple d’après une loi qu’on trouve dans le Lévitique :
Lv 21,18 : "Aucun homme ne doit s'approcher
s'il a une infirmité, que ce soit un aveugle ou un boiteux, un homme défiguré
ou déformé" !
Les aveugles et les boiteux sont
particulièrement visés. Il faut se rappeler le récit de la prise de Jérusalem
par David, racontée en 2 Samuel.
2 S 5,6-8 : "David avec ses gens marcha
sur Jérusalem contre les Jébuséens qui habitaient le pays, et ceux-ci dirent à
David : "Tu n'entreras pas ici ! Les aveugles et les boiteux t'en
écarteront" c'est-à-dire : David n'entrera pas ici. Mais David s'empara de
la forteresse de Sion ; c'est la Cité de David.
Ce jour-là, David dit : "Quiconque frappera les Jébuséens et montera
par le canal...". Quant aux boiteux et aux aveugles, David les hait en son
âme. C'est pourquoi on dit : "Aveugle
et boiteux n'entreront pas au Temple".
Jésus contrevient à cette loi.
Mt 21,14.15b : "Il y eut aussi des
aveugles et des boiteux qui s'approchèrent de lui dans le Temple, et
il les guérit… les grands prêtres et les
scribes furent indignés ".
Quant à St Jean, il a retenu, parmi les 7
signes qui composent son Evangile, deux miracles opérés dans les deux piscines
qui se trouvent l’une au nord et l’autre au sud du temple : Le boiteux de
Bethesda et l’aveugle-né de Siloé qui, une fois guéris, entrent dans le
temple qui leur était interdit tant qu’ils étaient atteints par leur
infirmité.
Le miracle, que nous rapporte cette lecture,
s’inscrit tellement dans l’iconographie première de Jérusalem qu’il serait
dommage de ne pas rappeler la mutation qui s’opère dans le passage de l’Ancien
au Nouveau Testament.
Dans l’Ancien Testament, les maladies et
les infirmités sont un handicap dans le rapport avec Dieu.
Dans le Nouveau Testament, elles sont
assumées par le Christ qui est
venu guérir nos infirmités comme nos péchés ; et les miracles préfigurent
la restauration totale de notre humanité dans le Royaume.
Le paralytique guéri par Pierre entre dans le temple
en franchissant la Belle Porte : "d'un bond il fut debout, et il
marchait. Il entra avec eux dans le
Temple, il marchait, bondissait et louait Dieu".
L'évangile rapporte l'apparition de Jésus aux disciples
d'Emmaüs ! Le célèbre Renan a dit que ce
texte est le plus beau morceau de littérature qui n'ait jamais été écrit.
La présence de Jésus ressuscité est plus
réelle que jamais ; mais elle n’est plus perceptible immédiatement comme elle
l’était auparavant. On a déjà vu cela avec l’Evangile d’hier, en parlant de
Marie Madeleine qui croit d’abord voir le gardien du jardin.
Cléophas et son compagnon partagent la
mentalité courante du judaïsme de l’époque qui attend un Messie restaurant la
Royauté Davidique et chassant l’occupant romain.
Jésus chemine un certain temps avec eux et
leur donne l’occasion d’exprimer leur déception et leur scepticisme vis à vis
du témoignage des femmes qu’ils considèrent comme des racontars de pure
imagination. C’est une bonne chose de laisser les gens s’exprimer et prendre,
par le fait même, du recul par rapport à leurs idées toutes faites. Prendre son
temps, c’est la meilleure manière de préparer celui qui va écouter à accueillir
le message qui lui est destiné.
Vient ensuite la grande leçon de la
lecture chrétienne de la Bible.
Lc 24,25-27 : "Alors il leur dit : "O
cœurs sans intelligence, lents à croire à tout ce qu'ont annoncé les Prophètes
! Ne fallait-il pas que le Christ endurât ces souffrances pour entrer dans sa
gloire ?" Et, commençant par Moïse
et parcourant tous les Prophètes, il
leur interpréta dans toutes les Écritures ce qui le concernait.".
On parle beaucoup dans les cercles bibliques
d’herméneutique et d’exégèse. Le mot "herméneutique" vient de ce
texte :
"Il
leur interpréta : "dièrmèneusen" en grec.
Il serait bon de rappeler l’origine
chrétienne de cette "lectio divina" et des effets qu’elle produit : "Notre
cœur n’était-il pas brûlant en nous, tandis qu’il nous parlait sur la route
et qu’il nous faisait comprendre les Ecritures ?".
On se préoccupe moins actuellement de savoir
où se trouvait la maison de Cléophas. A Latrum ?, à Abou Gosh ?, ou
autres lieux encore… !
Actuellement, quand on sort de Jérusalem vers
l’ouest, on a compris que la route d’Emmaüs est d’abord et avant tout dans
l’esprit de St Luc, une catéchèse eucharistique liant indissociablement la
liturgie de la Parole et la fraction du Pain.
"Ils le
reconnurent à la fraction du pain".
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