Sainte Trinité (2015 B)
La scène est
bien connue ! Elle se renouvelle et se renouvellera jusqu'à la fin des temps.
Mais il est bon de le rappeler aujourd'hui en cette fête des mères à qui je
transmets mes vœux humains et spirituels.
Oui, la
scène est bien connue : sur le quai de la gare, c'est le moment du départ.
L'enfant devenu grand, le fils, la fille quitte sa mère. C'est la première
fois, au moins cette fois d'importance ! Les mots qu'ils échangent sur ce quai
de la séparation est plus que des mots. Ils sont lourds d'une présence qui
grandit tandis que les mains, les bras se desserrent et que l'on se quitte.
"Je
suis avec toi. Je penserai à toi demain. Je t'écrirai". Tandis que le
train s'en va, les mains se tendent les unes vers les autres. Elles semblent
chercher une nouvelle présence comme pour combler la distance. Présence
mystérieuse de la pensée et du cœur.
Cette scène
est celle de l'Evangile d'aujourd'hui. Jésus se retrouve avec ses amis en
Galilée. Pour St St Matthieu, c'est le dernier rendez-vous terrestre avec
Jésus, avant son départ. Rendez-vous intime qui, pourtant, ouvre des
perspectives infinies : la puissance du Ressuscité unit désormais le ciel et la
terre. Nous aussi désormais, nous pouvons aller répétant les paroles du
Deutéronome : "Le Seigneur est Dieu,
là-haut dans le ciel comme ici-bas sur la terre. Il n'y en a pas d'autre
!". Aussi, de l'endroit évangélique dont personne ne retiendra le nom,
- peu importe d'ailleurs, il est tellement intemporel ! - voici que tout
l'univers s'étale : "De toutes
les nations, faites des disciples". A ce moment, solennel de
séparation, commence la trame d'une nouvelle présence : "Je serai avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps
"..
Le Seigneur
s'en va. Mais il n'est pas un être du passé dont on se souvient ! Pour lui,
s'en aller c'est changer sa manière d'être là.
Déjà, quand
l'amitié s'enracine dans l'absence de l'ami, quand l'amour s'enracine dans
l'absence de l'enfant, une présence, discrète et forte, vibre entre les êtres.
De même,
Jésus dit à ses amis : "Allez donc !"
Et presque aussitôt il ajoute dans la distance qui s'allonge et se creuse entre
eux : "Je suis avec vous tous les
jours jusqu'à la fin du monde".
Et le tissu
de la nouvelle présence sera : "Faites
des disciples. Baptisez-les. Apprenez-leur à garder tous mes
commandements".
Quand la
Bonne Nouvelle de l'Amour que s'échangent les trois Personnes divines, circule
entre les hommes, le Christ est là présent. Le cœur de Dieu bat dans le cœur
des hommes ! Car la Bonne Nouvelle c'est encore, à partir du cœur de
Dieu-Trinité-d'amour, c'est que les hommes soient des amis, et que les ennemis
deviennent des frères.
"Faites des disciples !" On pourrait traduire : "Répandez ma présence, la présence de
Dieu-Trinité-d'amour, comme une semence". Dieu est avec les hommes.
Israël n'est plus seul à pouvoir dire : "Dieu
avec nous". Toutes les nations, l'univers entier sont invités à
chanter : "Emmanuel" ! - "Dieu-avec-nous"
Ainsi, le
disciple est beaucoup plus que celui qui écoute la parole de son maître. Il lui
est uni. Il respire son souffle. Il est habité par son Esprit. Il s'en nourrit.
"Tous ceux qui se laissent conduire
par l'Esprit de Dieu, dit St Paul, ceux-là
sont fils de Dieu... L'Esprit-Saint lui-même affirme à notre esprit que nous
sommes enfants de Dieu !".
Les
disciples de Jésus connaissent son enseignement et sa vie, mais ils ne sont
vraiment ses disciples qu'en vivant de lui, de lui qui est uni au Père et à
l'Esprit. Et leur fidélité les entraîne dans le sillage de sa justice, de sa
paix et de son amour. "C'est à ce
signe que l'on vous reconnaîtra, si vous vous aimez les uns les autres",
disait Jésus lui-même. A Antioche, pour la première fois, les disciples de
Jésus sont appelés "chrétiens" parce qu'ils rendent visible la
présence invisible du Seigneur, de Dieu-Trinité-d'amour.
L'Esprit les
habite. Il les unit les uns aux autres. "Un
seul Esprit. Un seul Seigneur". Comme le Fils envoyé par le Père ne
fait qu'un avec lui, ainsi des disciples. Vivant du même Esprit, ils aiment
dire à Dieu : "Abba-Père" !
Alors que la
mère et l'enfant se perdent de vue, le train de la vie les séparant, une
présence de l'un à l'autre se creuse, s'approfondit, devient forte dans
l'invisible.
Il en est de
même avec le Seigneur : "Je suis
avec vous…" dit-il au moment de son départ. "Allez… !" Allez témoigner de Dieu-Trinité-d'amour. Je
vous envoie mon Esprit.
Alors,
sommes-nous de ces disciples qui tissent l'étoffe de la présence invisible du
Seigneur ?
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