7e Dimanche de Pâques 19/C
“Oh ! vous
savez, nous, nous sommes croyants mais pas pratiquants !”
Souvent,
nous entendons cette réflexion... Et pour cause !
Car parler,
finalement, de “croyants non-pratiquants”, c'est parler de Dieu, certes
! Mais c'est aussi parler d’une épouse, d’un mari, d’un frère, d’une sœur,
c'est parler des enfants ou de bien des amis. D'aucuns d'eux, nous mettons en
doute leur existence. J'y crois, surtout à certains moments heureux ou
malheureux de leur existence.
Mais
sommes-nous pratiquants pour autant ? Je veux dire : Avons-nous une légitime
et véritable relation avec eux ?
Bien sûr, "comparaison
n'est pas raison ". Cependant…, les prêtres entendent tellement cette
affirmation : “Nous sommes croyants mais pas pratiquants !”
- au
moment où des jeunes préparent leur mariage, avec beaucoup de sérieux,
d'ailleurs…, comme des croyants, mais non-pratiquants, de
- à
l’occasion d’une sépulture ; on entre dans l'église par honneur du défunt, mais
comme des croyants, non-pratiquants,
- au
moment où des parents inscrivent leur enfant au catéchisme, comme croyants,
affirment-ils, mais non pratiquants.
Tous sont croyants,
mais non-pratiquants. Mais que veut
dire cette phrase en réalité ?
On la dit
parfois avec le sentiment d’une négligence : “nous sommes si mal organisés ; et
puis, il y a tellement de choses à faire ! On n'a guère le temps ! ”.
Beaucoup
plus souvent, on la dit, cette phrase, avec cette certitude tranquille : on
est croyant ; et c'est bien suffisant, c'est l'essentiel. Pourquoi
pratiquer ? Est-ce si important que cela d'aller à la messe le dimanche ?
Ne vaut-il pas mieux vivre en chrétien toute la semaine ?
C'est là
que les choses s'embrouillent, me semble-t-il ! Comment y voir clair ?
Aussi, avant
de faire appel à l'Evangile, il est peut-être utile de se mettre
d'accord sur les mots CROYANT… PRATIQUANT… Que mettons-nous sous
ces mots-là ?
Il m’arrive de penser (et même,
plus rarement, de le dire) : “Croyants
non-pratiquants ? En êtes-vous sûrs ?
Vous êtes beaucoup plus pratiquants que
vous le dites,
mais vous êtes probablement moins
croyants que vous le pensez !”
+ Vous êtes plus pratiquants que
vous le dites.
Sans
doute, vous ne "pratiquez" pas la messe du dimanche, mais vous "pratiquez"
des valeurs importantes :
° vous
êtes fidèles dans votre couple, fidèles à vos amis, résolus dans vos
engagements,
° vous "pratiquez"
la tolérance, l’ouverture d’esprit, la justice, le partage,
° vous
êtes plus "pratiquants" que vous le dites !
+ Mais vous êtes probablement moins
croyants que vous le pensez : Vous ne croyez pas assez !
° vous
ne croyez pas assez que Jésus est quelqu'un de vivant aujourd'hui,
présent au milieu de nous. Il vous arrive de parler de lui, mais jamais vous ne
lui parlez (ou presque…, sauf dans un
moment de grande difficulté, comme pour lui faire un reproche).
Justement,
les chrétiens se rassemblent pour cela, pour un entretien avec le Christ
!
° vous
ne croyez pas assez que l’évangile lu, proclamé, commenté chaque dimanche,
est Parole de Dieu. Vous ne venez pas l'écouter. Si la foi n'est pas réfléchie, comment rester
croyants ?
Les
chrétiens se rassemblent pour alimenter leur foi à cette Parole !
° vous ne croyez pas assez que Jésus ressuscité veut
nous communiquer sa vie, son Esprit d'Amour, par l'Eucharistie notamment.
Les chrétiens savent qu'ils puisent là à une source d'amour,
régulièrement. Ils ne peuvent s'en passer.
Vous pensez, vous, pouvoir vous en passer. Vous ne croyez pas assez !
° vous ne
croyez pas assez que le dimanche est pour les chrétiens le jour où ils font
mémoire du Christ, de sa vie, de sa mort et de sa Résurrection. Si vous ne
venez jamais avec d'autres faire mémoire du Christ, vous finirez par en perdre
la mémoire.
Mais ayant
pensé cela, et l’ayant dit parfois, je m'aperçois que ces réflexions
essentielles et parfaitement vraies ne s'adressent pas uniquement à ceux qui se
disent “croyants/non-pratiquants”.
Elles sont essentielles
et vraies pour tous. Elles nous interrogent tous.
L’Evangile
de St Jean nous rappelle cet essentiel, l'essentiel de la vie du chrétien…,
l'essentiel qui nous conduit bien au-delà de la distinction
“croyants/pratiquants”.
Jésus prie
pour tous ceux qui croiront en Lui. Et il demande : “Je veux qu'ils soient UN… unis entre eux, comme Toi, Père, tu es en
moi et moi en Toi”. (Remarquons
;c'est la seule fois, dans l'Évangile, où Jésus s'adresse à son père en disant
: je veux !) Et à un autre endroit : “Je veux qu'ils DEMEURENT en moi, comme je DEMEURE en eux”.
Retenons
ce mot “DEMEURER”. Il est plus suggestif que le mot “pratiquer”.
° Le
chrétien, c'est celui qui demeure dans le Christ et donc qui ne fait pas
que passer !
° le
chrétien est invité à demeurer dans la Parole du Christ…, à la faire
descendre en son cœur, en sa vie…, et donc à ne pas se contenter de quelques
phrases, souvent les mêmes, lues ou entendues rapidement,
° le
chrétien est invité à demeurer dans la prière et les sacrements et donc à
ne pas se contenter d'une “petite prière
en passant” ou de “prendre la messe en passant”, et au fond de l'église, réalisant
ainsi l'intitulé d'un petit ouvrage de Paul Claudel : "La messe, là-bas", pas près de moi, pas en moi…
° le chrétien est invité à demeurer dans l'envie réelle
de convertir sa vie à l'Evangile et donc à ne pas se contenter de “vœu
pieux”. Il faut prendre le temps de s'arrêter pour demeurer !
° le
chrétien, c'est celui qui apprend à DEMEURER dans le Christ… et c'est
l'affaire de toute une vie, c'est un long chemin.
Un jour,
un journaliste interrogea un professeur d'Histoire. Et il lui demanda
finalement : “Etes-vous croyant ?” – “Oui,
je suis croyant” – “Chrétien ?” – “J’essaie de le devenir !”. Il avait bien
répondu ce professeur, car on n'a jamais fini de devenir chrétien !
9
- On a
jamais fini ! Que ceux qui affirment : “Je suis croyant mais pas
pratiquant…”, qu’ils essayent de devenir plus croyants..., en
demeurant dans la prière, l'Eucharistie, les sacrements. C’est si important
pour demeurer dans le Christ !
- Et nous
qui sommes croyants et pratiquants,...
essayons de devenir plus chrétiens, de demeurer davantage dans le Christ !
Et quand
nous parlons de nos frères croyants/non-pratiquants, n’en parlons surtout pas
en termes de supériorité..., certes, mais ni non plus en termes d'anxiété,
comme tant de parents qui se culpabilisent en pensant à leurs enfants…
non-pratiquants. Le Seigneur saura les rejoindre sûrement, si nous-mêmes
devenons plus croyants...
Donc, ni
supériorité, ni anxiété, mais responsabilité.
Si nous
célébrons l'Eucharistie le dimanche, nous avons une responsabilité. Nous avons
la responsabilité de ceux qui nous sont proches. Nous devons les porter dans
notre prière et confier à Dieu ceux qui ne sont pas là et qui reçoivent parfois
cet appel à “demeurer” dans le Christ qui, lui, demeure en son Père, source de
tout amour.
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