dimanche 17 février 2019

Portrait du Chrétien


6e Dimanche du T.O. 18/C

Il nous arrive, à nous chrétiens, de nous tromper de dieu. Certains semblent croire à un dieu
- qui ne serait jamais venu sur terre en la personne de Jésus,
- et qui se contenterait de regarder de loin les "terriens»" en ne s'intéressant à rien d'autre qu'aux prières qu'ils feraient monter vers lui.
Ces gens-là ont beau se dire chrétiens, ou même catholiques, ils ont beau fêter Noël et Pâques, ils sont tout au plus déistes.

Car l'Eglise ne cesse de nous rappeler
- que le Fils de Dieu est venu sur terre vivre une vie humaine comme la nôtre en la personne de Jésus,
- qu'il s'est fait pauvre avec les pauvres pour sauver les pauvres,
- qu'il s'est intéressé à toutes les situations humaines et sociales de son temps,
- et qu'il invite ses disciples - nous les chrétiens - à vivre un christianisme enraciné dans ces mêmes situations humaines et sociales de notre temps.

Si, par l'incarnation, par la naissance de Jésus dans une étable de Bethléem, le Fils de Dieu s'est fait solidaire de la condition humaine, c'est pour que nous, ses disciples, nous vivions de même dans cet esprit de solidarité et de partage dans lequel il a vécu lui-même le premier.

C'est ce que nous rappelle l'évangile d'aujourd'hui, qui résume en quelques lignes tout l'essentiel du message du Christ. Par ces quatre béatitudes que nous rapporte St Luc, Jésus nous peint en quelque sorte, en quatre ou cinq traits, en quatre ou cinq coups de pinceau, le portrait idéal du chrétien.

Le portrait idéal du disciple de Jésus
Et d'abord, le chrétien, tel que Jésus le désire, doit être un UN HOMME HEUREUX. Oui, Dieu nous veut joyeux, bien vivants, optimistes, amoureux de notre vie et de notre époque, des gens à l'amitié rayonnante, des gens dont la foi diffuse la "Bonne Nouvelle".
Heureux ! Heureux !... Ce mot revient cinq fois en cinq phrases. "Soyez heureux et sautez de joie", nous dit Jésus.  Dieu nous appelle au bonheur, et il veut que nous soyons des semeurs de bonheur partout… Un saint triste est un triste saint.

Et pour parvenir, à ce bonheur, cette joie, Jésus apporte quelques précisions !

Et d'abord : "Heureux, VOUS LES PAUVRES, le Royaume des cieux est à vous  !" - L'homme selon le cœur de Dieu ne cherche pas le bonheur dans les richesses et l'argent. Il sait s'en servir, les goûter à l'occasion  ; mais il ne court pas après. Au contraire, il sait parfaitement s'en passer, car il sait que là n'est pas l'essentiel. Et surtout, si par hasard il en possède, il trouve sa joie en les partageant.  "Heureux les pauvres… !"

"Heureux VOUS QUI AVEZ FAIM MAINTENANT : vous serez rassasiés !"  L'homme selon le cœur de Dieu, c'est celui qui aura toujours faim et soif ici-bas, car il ne se contentera jamais des nourritures terrestres qui le laisseront toujours sur sa faim.
Heureux vous qui êtes affamés d'autre chose que de réputation, d'autre chose que de confort, d'autre chose que d'argent, de renommée ou de gloire !
Heureux vous qui avez faim du Royaume de Dieu et de sa justice !
Heureux vous qui avez faim d'un monde plus juste, plus fraternel, d'un monde de paix, d'un monde où tout être humain puisse vivre sa vie en homme libre…
C'est le grand témoignage des saints, de St François d'Assise, particulièrement  et, à sa suite, me semble-t-il, le témoignage de notre pape François.
             
"Heureux VOUS QUI PLEUREZ MAINTENANT !". L'homme selon Dieu, c'est celui qui a un cœur sensible aux peines et aux souffrances des autres, qui a le souci de ne jamais les laisser tout seuls, mais qui pleure avec eux et partage avec eux leurs peines et souffrances.

Et voici le dernier coup de pinceau au portrait de l'homme selon le cœur de Dieu : "Heureux êtes-vous, quand les hommes vous haïssent et vous repoussent... A CAUSE DU FILS DE L'HOMME, A CAUSE DE MOI..."
"A cause du Fils de l'homme, à cause de moi…". Voilà les mots importants. Autrement dit : Heureux celui qui s'attache à moi, même quand ça va mal, même quand on l'insulte, même quand on se moque de lui, même quand tous ses amis le repoussent... à cause du Christ, Fils de Dieu fait homme … et qui lui reste  fidèle quand même et toujours, quoiqu'il arrive ! Oui, ce jour-là, sautez de joie, soyez heureux, car "votre récompense sera grande dans les cieux !"
Tel est le portrait du disciple de Jésus selon le cœur de Dieu.

Le portrait de Jésus
Ce portrait, vous l'avez compris, c'est celui de Jésus lui-même. Au fond, Jésus seul l'a réalisé parfaitement.
Lui seul a été parfaitement pauvre, lui qui est né dans une étable, qui n'avait pas ou reposer la tête, sauf, un jour, sur une croix.
Personne n'a su comme lui pleurer avec ceux qui pleurent et prendre sur lui leurs peines et souffrances, lui qui ne cessait de guérir, de relever, de rendre la vue aux aveugles et de réhabiliter les marginalisés.
C'était là, disait-il, la volonté de son Père : que pas un seul de ces petits ne se perde ! Pour lui, la faim qui le torturait, c'était cela : "faire la volonté de son Père ". C'était là sa mission, et il l'a remplie jusqu'au bout, jusqu'à être rejeté par les siens et condamné par son peuple….

Notre portrait à nous ?
Et pour nous, ce portrait du chrétien dépeint par Jésus ne doit-il pas être l'idéal vers lequel nous avons à tendre ?
- Proximité avec les pauvres, ce qui signifie : ne pas faire de notre niveau de vie, de nos revenus, de notre avoir, le centre de nos préoccupations. Mais savoir nous faire solidaires de nos frères, partager avec eux, donner et nous donner nous-mêmes.
- Proximité avec ceux qui pleurent, qui souffrent, qui sont dans la peine. Ne jamais laisser qui que ce soit seul avec ses larmes, seul avec sa souffrance.
- Avoir faim et soif d'autre chose que des nourritures terrestres : faim de justice, de fraternité, de paix, pour nous et pour les autres.  En sachant qu'à travers tout progrès dans la justice, la fraternité et la paix, c'est le Royaume de Dieu lui-même qui progresse invisiblement sur terre.
Et tout cela, même si c'est dur, même si nos amis nous critiquent ou nous rejettent... Car L'EVANGILE N'EST PAS NEUTRE, et le chrétien ne peut pas rester neutre devant ceux qui souffrent, ceux qui pleurent et ceux qui ont faim.

On nous dit parfois, à nous les prêtres : "Parlez-nous donc de Dieu, c'est cela votre rôle, - et c'est vrai - ; mais on ajoute :  au lieu de toujours nous parler des pauvres et des malheureux !"
Il faut répondre : Dieu est amour. Jésus Christ est son Fils. Il s'est fait pauvre et solidaire des pauvres et de tous ceux qui souffrent. Il nous appelle à cette même solidarité. Tel est le chemin pour parvenir à lui.

Et puis, pour terminer, une remarque importante. On dit souvent – et c’est vrai – que l’essentiel de la vie, du message du Christ, c’est d’aimer. Et le Christ a dit : "Aimez-vous come je vous ai aimés". Mais il a dit également : "Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés". Ce désir d’aimer est dans le cœur de beaucoup d’hommes, c’est la consigne de bien des religions. Mais aimer comme Dieu aime, voilà bien la nouveauté de l’Evangile. Cela suppose qu’on contemple le cœur du Christ ouvert sur la croix, et qu’on médite ce mystère de la Sainte Trinité où les Personnes n’existent que comme pures relations d’amour (Thomas d’Aquin, Su.th.  Ia, q. 29 ss) et où tout égoïsme est comme exorcisé, supprimé. 

C’est toute la nouveauté du N.T., qu’on oublie facilement. Le commandement nouveau, c’est : "aimez-vous comme je vous ai aimés". Et c’est alors que l’on puise en Dieu la force d’aimer même ses ennemis… ; et cette force, on ne la trouve pas ailleurs … qu’en Dieu pour aimer comme Dieu !

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